Uruguay : un petit pays aux grandes ambitions pour son élevage
Coincé entre les géants brésilien et argentin, l'Uruguay n'en demeure pas moins un acteur croissant du marché de la viande bovine avec lequel il va falloir vraiment compter.
Quatre fois plus de vaches que d'habitants : l'Uruguay, qui a accueilli en novembre dernier le Congrès mondial de la viande, a un point commun avec le Cantal dont le ratio est de trois (vaches) pour un (habitant). Mais pour Bruno Dufayet, éleveur salers et membre de la délégation française à ce congrès au titre d'Interbev, les similitudes ne s'arrêtent pas là. En marge de ce sommet, il a ainsi pu partir à la découverte de ce petit État sud-américain de 3,4 millions d'habitants, coincé entre les géants argentin et brésilien. Un pays qui, sur la décennie écoulée, a triplé ses surfaces agricoles avec l'ambition de nourrir... 50 millions d'habitants. "C'est un élevage à dominante herbagère avec de grandes étendues d'herbe et un climat tempéré très propice à une pousse régulière de l'herbe, quasiment toute l'année. Les animaux pâturent au moins neuf mois par an", relate l'agriculteur cantalien. Mais aussi un élevage bovin (11,9 millions de têtes) très clairement tourné vers l'export, avec un secteur maigre, concurrent direct du bassin allaitant français.
Fournisseur de la Turquie
Les races utilisées sont essentiellement de l'angus et de l'hereford. "Ils produisent des veaux légers d'environ 7 mois, de 250 à 300 kg, sur des fermes méga extensives, à destination de la Turquie, du pourtour méditerranéen (Turquie(1), Liban, Libye,...) ; pas mal de pays où nous sommes présents..." a pu constater l'éleveur mauriacois. Et les Sud-Américains se sont engouffrés l'an dernier davantage encore sur le marché turc laissé orphelin par la France pour cause de FCO. "On a visité un centre de quarantaine avec 20 000 têtes prêtes à partir pour la Turquie", souligne Bruno Dufayet, pour qui l'excellent statut sanitaire de l'Uruguay, de même que son système de traçabilité individuelle, lui ont permis de diversifier ses débouchés et "d'accéder aux mêmes marchés que nous. Et puis, ils ont une vraie culture d'exportateurs". Des systèmes plutôt autonomes, une bonne maîtrise sanitaire et technique, "c'est loin d'être la pampa que parfois on imagine..." Guère rassurant donc pour les éleveurs allaitants du Massif central. Si ce n'est que la supposée hyper-compétitivité tarifaire des produits sud-américains à l'export n'est finalement pas celle vantée par les opérateurs et importateurs pour faire pression sur le prix du maigre cantalien...
Pas plus compétitifs sur les prix
"Sur le JB (jeune bovin), le prix sortie ferme est de 3,10-3,2 EUR/kg, le maigre tourne autour de 2,80-3 EUR/kg vif, soit des prix complètement alignés sur les nôtres. S'ils produisent à des coûts relativement réduits, en revanche, les animaux sont valorisés au même niveau que les nôtres", affiche le Cantalien. En parallèle, ces dernières années, les gauchos "uruguayens" ont développé de l'engraissement(2) "dans des ateliers intensifs type feedlots avec des animaux nourris aux céréales, sans hormones, à destination de l'export et notamment du contingent européen". S'y ajoute la production d'animaux finis à l'herbe qui fournissent le marché intérieur, où les vegans ne semblent guère en odeur de sainteté (55 kilos équivalents carcasse consommés annuellement en moyenne par habitant), mais aussi l'Amérique du Nord et la Russie. Cet élevage reste cependant entre les mains de capitaux argentins. "Pour beaucoup, ce sont des entrepreneurs argentins qui se sont installés en Uruguay et y ont développé des structures importantes, entre 800 et 2 000 vaches avec des surfaces de 1 200 à 3 000 ha, qui tournent avec des salariés", analyse Bruno Dufayet.
(1) Plus de 150 000 têtes exportées vers la Turquie en 2015. (2) 537 000 tonnes équivalents carcasse (téc) de bouvillons et vaches abattus en 2015 pour une consommation intérieure de 188 000 téc.
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
Droits de reproduction et de diffusion réservés.