Une installation pour trois départs en retraite : comment conjurer le sort ?
Les solutions pour relancer l’installation de jeunes en agriculture sont sur le terrain et c’est ensemble qu’on pourra les trouver. C’est en substance ce qui est ressortie d’une très intéressante table ronde en marge du Sommet organisée par plusieurs associations engagées dans la défense et l’accompagnement des jeunes.
Objectif : un départ en retraite, une installation. Oui, mais comment ? « En ouvrant les oreilles, les portes et les échanges », a lancé Benoît Julhes, éleveur dans le Cantal et secrétaire général d’Installer en Massif Central. Il est le fer de lance du projet « Témoin », qui tente depuis fin 2016 de relancer l’installation dans le Massif central via une grande enquête de territoire. À l’heure où le risque du repli sur soi se fait de plus en plus lourd, il a réuni plusieurs associations et élus pour échanger autour du sujet hautement délicat de l’installation des jeunes avec un mot d’ordre : allons voir ce que fait le voisin. Successivement, élus et associations ont ainsi pu témoigner.
Une approche pluridisciplinaire
Mettre les gens autour de la table, c’est tout l’objet du projet « Témoin », qui travaille via de nombreux partenariats, notamment Sol et civilisation et audits à trouver des solutions pour redonner l’envie aux jeunes de s’installer : quels sont les freins à la transmission ? Quelle est la nature des initiatives qui germent ici et là pour accompagner les porteurs de projets ? Comment construire des démarches concertées… Par une approche à la fois économique, sociologique, géographique, politique… le projet ambitionne d’apporter des éléments de réponse à l’enjeu de la transmission de manière décloisonnée pour faire émerger des solutions innovantes mais aussi des pistes qui seront de l’ordre de la facilitation et de l’évolution réglementaire.
Un enjeu pour demain
Ainsi, Ghyslaine Pradel, présidente de Hautes Terres Communauté a présenté les grands enjeux agricoles auxquels son territoire, le Cézallier, qui participe activement au projet, est confronté, ses difficultés, mais aussi ses atouts. « Sur les 242 chefs exploitations que compte le Cézallier, 50 % ont plus de 52 ans. La question de la transmission est capitale pour nous, et c’est demain que ça se joue ». Face à ce chiffre saisissant, elle en a donné un autre, tout aussi inquiétant : deux. C’est le nombre d’installations depuis deux ans sur le même territoire. Le prix du foncier sur des terres de transhumance, le coût de l’installation, l’isolement sont autant de critères qui effraient la jeune génération. La réputation des prairies cantaliennes et ses cinq AOP fromagères n’y ont rien fait : « Tout doit être réinventé et très vite », a t-elle lancé. Elle en a fait un cheval de bataille. Pour le Cézallier, le projet Témoin est vital. « La richesse de nos services publics et du tissu social en dépendent : « la question n’est pas qui, ou comment, mais quelle agriculture nous installons pour demain ? » « Et pour répondre à cette question, il n’y a que la méthode ascendante qui fonctionnera », a conclu Benoit Julhes : « à l’heure où l’État ne cesse de se désengager, il est grand temps de redonner du sens à l’action individuelle ». Le réseau s’est donné trois ans pour aboutir à des propositions concrètes, concertées et adaptées aux territoires, matérialisées par une charte Massif central et un guide de recommandations concrètes.