Une banque de travail pour une entraide solidaire, équilibrée et sans obligation
Un GVA du nord Cantal a mis sur pied depuis le début de l’année une banque de travail dont l’idée est de renouer avec l’entraide, qui fait partie de la culture du monde agricole.
En agriculture, l’entraide est une forme simple et traditionnelle de coopération entre voisins. Si peu à peu elle a eu tendance à disparaître, au profit notamment des Cuma (coopératives d’utilisation de matériel agricole), l’entraide connaît un regain d’intérêt. Dans le Cantal, le GVA de Mauriac - Pleaux - Salers(1) fait revivre depuis peu ce principe : s’offrir mutuellement du temps, des savoir-faire et du matériel dans le cadre d’une “banque de travail”. Pierre Baladuc, éleveur laitier au Vigean (système tout herbe sur 90 ha, 45 vaches laitières pour 300 000 l. de référence), préside le GVA.“L’idée, elle est née d’une réflexion, lancée l’année dernière”, révèle-t-il. “Comment palier le surplus de travail que nous enregistrons tous, alors que nous sommes souvent seuls pour effectuer les tâches. Faut-il sous-traiter ? Ou investir dans du matériel ? Un petit groupe de travail a été chargé d’examiner diverses pistes.” Olivier Roche, éleveur de bovins viande à Jaleyrac (production de salers croisés charolais, 50 vaches allaitantes sur 79 ha), faisait partie de ce groupe de réflexion.
Question d’équilibre
“Des banques de travail, il en existe en Aveyron. Nous avons organisé une visite fin 2012 dans l’une d’elle. Créée dans les années 80 par des agriculteurs du même âge pour faire des bâtiments au moment où ils s’installaient, elle a perduré après les constructions”, explique Olivier Roche, ravi de constater que l’esprit d’entraide fonctionne encore à plein. Alors, depuis le début de l’année, les agriculteurs cantaliens se sont inspirés de cette banque de travail. Pour son fonctionnement, ils veillent à ce que personne n’abuse du système et que, à contrario, aucun ne soit lésé. L’équilibre sert donc de fil rouge à l’organisation. Il se concrétise par une comptabilité basée sur des points, acquis ou dus. Une recette qui pourrait faire des petits... “Nous ne sommes pas une association, donc pas de cotisation. Il suffit pour en profiter d’adhérer au GVA qui a eu l’initiative et a su la concrétiser avec l’aide de nos conseillers de secteurs, Annick Bouscarat et Didier Nureau”, précise Pierre Baladuc. Des explications qu’il avait déjà fournies lors d’une réunion de présentation de la banque de travail, à laquelle une trentaine d’agriculteurs avait prêté attention, en début d’année.
“Plus on est nombreux, mieux ça marche”
“Très vite, les participants à la curiosité éveillée se sont montrés intéressés, posant beaucoup de questions. Notre idée a reçu d’emblée un accueil très positif”, se souvient-il. Pour preuve, un sur deux s’est inscrit dans la démarche depuis le lancement de la “banque de travail des Monts du Cantal”. Quatorze agriculteurs - sur un territoire de trois cantons - ont signé un contrat, les engageant dans le cadre d’un règlement intérieur simple. Chacun dépose la liste des missions qu’il propose et/ou du matériel qu’il met à disposition. “C’est le propriétaire du matériel qui se déplace et effectue les tâches”, expliquent Olivier Roche et Pierre Baladuc. Alors, pour faciliter les échanges, des petits groupes se sont instaurés naturellement. Une moitié des effectifs se trouve sur Mauriac, tandis qu’une autre se répartie entre une section sur Pleaux et l’autre sur Salers. “Plus on est nombreux, plus il y a d’offres et donc de chances de trouver le service adéquat”, précise le président du GVA. D’autant que le principe solidaire ne vaut pas obligation. En clair, si l’un refuse une mission (parce qu’il n’a pas le temps, par exemple), un autre adhérent pourra s’en acquitter. Une fois le travail effectué, la tâche et le temps passé sont notés sur un carnet à souches, traduits en points selon le barème établi et validé par tous (voir ci-dessous). Après 12 mois de fonctionnement, le GVA dressera un bilan de l’équilibre des comptes. Mais ses responsables sont confiants : “Ça marche bien ; tout le monde a compris comment utiliser la banque de travail.” Si chacun y trouve son compte, c’est que les atouts sont encore plus nombreux qu’il y paraît. Bien sûr, il y a un volet économique, avec un travail qui, contrairement à une entreprise de sous-traitance (ou vétérinaire dans le cas d’un écornage, par exemple) ne sera pas facturé sur le compte de l’exploitation. Le volet rationel est également évident, puisque les missions sont effectuées par des “spécialistes” qui ont l’habitude du maniement de leur outil. Ce savoir-faire se traduit par un gain de temps, autre avantage de ce dispositif. De fait, il autorise les éleveurs à se dégager un peu plus de temps libre. Enfin, il peut jouer un rôle social, en échangeant les uns avec les autres sur des méthodes de travail et, le cas échéant, rompre une forme de solitude sur son exploitation.
(1) Groupement de vulgarisation agricole qui compte quelque 150 adhérents.
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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