Un article nommé désir
Adopté en 2018 en pleine polémique sur les accords de libre-échange (UE-Mercosur, Ceta), l’article 44 de la loi Égalim entendait imposer qu’aucune denrée entrant sur le sol français ne soit cultivée avec des produits interdits en UE. Mais ce texte est resté jusqu’ici lettre morte, car il relève d’une compétence européenne.
En France, l’équation posée par le syndicalisme majoritaire est relativement simple : des alternatives techniques aux produits phytosanitaires existent (biocontrôle, agroécologie…) et les agriculteurs seraient prêts à les utiliser. Mais elles engendrent des surcoûts qui les exposent à une concurrence qui, à l’autre bout du monde, continue d’utiliser du 2,4-D dans ses champs.
En effet, la réglementation qui les protège des distorsions est très incomplète. Dans le cas des productions végétales, lorsque l’UE prononce des interdictions de phytos, elle abaisse à zéro les limites maximales de résidus (LMR) tolérées pour cette molécule, d’où que proviennent les denrées. Mais ce mécanisme a deux failles pour les produits importés.
D’abord, les produits bannis peuvent continuer à être utilisés dans les pays exportateurs, pourvu qu’ils ne laissent pas de résidus quantifiables dans les récoltes exportées dans l’UE. Et les limites de quantification étant assez élevées, elles sont dans la plupart des cas compatibles avec une utilisation du produit sur la culture, à un stade suffisamment éloigné de la récolte.
Ensuite, les produits bannis peuvent faire l’objet de demandes de « tolérance à l’importation », et de relèvement des seuils limites, lorsque leur interdiction est liée au seul motif environnemental ou à la protection des applicateurs. C’est notamment le cas de l’atrazine, interdite en UE depuis 2003, mais utilisée par de nombreux pays tiers.
Ce sont ces deux trous dans la raquette que l’article 44 de la loi Agriculture et alimentation entendait résoudre, dans un contexte où les interdictions pour les motifs environnementaux sont de plus en plus courantes.