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Les puces ADN vont-elles révolutionner l'agriculture ?

Véritable concentré de technologie, les puces ADN sont en passe de transformer les connaissances humaines du vivant et offrent de formidables avancées à l'agriculture.

Incontournable depuis des années dans les domaines de la médecine et de l'investigation policière, l'ADN permet de résoudre bien des énigmes. Si le séquençage complet du génome humain a été annoncé depuis 2003, il n'en reste pas moins beaucoup de mystères quant à son fonctionnement.

En moins de dix ans, les évolutions technologiques qui ont été développées et mises à disposition de la recherche génétique ont considérablement transformé notre compréhension du génome autant humain, qu'animal ou végétal. Les progrès ne vont pas s'arrêter là et s'annoncent très prometteurs.

Un séquençage massif des organismes

A Clermont-Ferrand, la plateforme de génotypage et de séquençage « Gentyane » de l'Inrae, utilise des puces ADN depuis 8 ans pour essayer de mieux comprendre à quoi peuvent bien servir tous ces gênes. Leur but : en apprendre plus pour tenter d'améliorer les productions agricoles et relever le défi des évolutions climatiques.  Charles Poncet est directeur de production et responsable opérationnel de la plateforme. L'ADN et ses différentes combinaisons sont à la base du travail de son équipe composée de dix  ingénieurs et techniciens experts : « Les nucléotides sont les quatre briques élémentaires qui s'agencent sous formes de séquences spécifiques et composent les molécules d'ADN. Leurs combinaisons varient en fonction de chaque individu. Comprendre ces agencements c'est saisir l'information héréditaire des êtres vivants ».

La science du génome (génomique) ouvre désormais de formidables perspectives de développement à travers de nouveaux concepts, de nouvelles méthodologies mises en application au sein du laboratoire Gentyane : « En seulement une dizaine d'années, nous avons pu constituer d'énormes bases de données génétiques permettant, par comparaison, d'attribuer des fonctions pour certains gènes. Nous pouvons ensuite vérifier les fonctions que nous pensons avoir identifiées en observant directement les animaux ou les plantes. Mais attention, il faut en appréhender le fonctionnement global et cela n'est pas chose aisée car plusieurs gènes peuvent être acteurs dans une ou plusieurs fonctions. A cela s'ajoutent aussi des fonctions réservées à la modulation et à la régulation mais aussi à la préservation de l'ADN » complète Charles Poncet. Un travail titanesque de rapprochements avec les connaissances acquises associé à un repérage des gènes et à un catalogage des données pour mieux connaitre les génomes de chaque plante, chaque animal étudié.

Un concentré de haute technologie

Le séquençage massif permet d'obtenir un alignement des séquences de l'ADN de différents individus. Grâce à cette étape, les chercheurs peuvent ainsi identifier des polymorphismes. Des petites différences entre les individus, parfois insignifiantes. Des petites variations mises en lumière sur les puces ADN. Les précisions de Charles Poncet : « On parle de Single Nucleotide Polymorphism  (SNP), une variation d'une seule brique, d'un seul nucléotide à un endroit précis d'une séquence ADN. Des différences qu'on qualifie de marqueurs moléculaires que l'on tente de lier avec des caractères d'intérêts agronomiques, d'où l'enjeux de telles recherches ».

Chaque puce est constituée de quatre-vingt-seize emplacements. Chacun d'entre eux est destiné à recevoir un échantillon d'ADN d'autant d'individus différents. Dans chacun de ces emplacements, ce ne sont pas moins de 700 000 marqueurs SNP qui pourront y être lus. C'est par photo-lithogravure que sont fixés les fragments d'ADN contenant les SNP sur la puce tout en respectant un agencement très précis qui sera ensuite lu par lecture optique associée à des scanners robotisés. La solution ADN destinée au test est ensuite appliquée sur chacun des petits carrés de la puce. A cette étape il est alors possible de réaliser des hybridations sous conditions de la présence de séquences correspondantes. C'est ensuite par une méthode assez simple mais ultra-rapide que l'analyse est faite: « C'est de la biochimie. Il se produit une réaction chimique lorsque l'ADN s'hybride, qui libère une fluorescence détectable par le scanner. Elle est localisée avec une très grande précision grâce à un quadrillage de 700 000 données » développe avec passion Charles Poncet. Une avancée extraordinaire que nous avons peine à imaginer tant l'évolution a été fulgurante ces dernières années.

Un outil d'aide à la sélection

Aussi formidables soient-elle, à quoi peuvent bien servir toutes ces recherches ? Charles Poncet répond: « Au sein de notre plateforme, nous travaillons sur de nombreuses espèces dans des objectifs bien précis commandés par des organismes publics ou privés. Nous sommes chargés d'identifier les marqueurs qui permettront par exemple d'obtenir des poules qui pondent de meilleurs oeufs, des rendements supérieurs pour le blé, une meilleure résistance des cultures face aux dérèglements climatiques, des chevaux aux capacités de courses démultipliées..., les champs d'applications sont infinis et nous pouvons concevoir des puces pour chaque espèce vivante sur Terre et pour autant de projets commandés. Depuis que l'homme cultive des plantes, élève des animaux, il a sélectionné, génération après génération, les individus les plus productifs. Aujourd'hui, avec notre connaissance, de plus en plus précise de l'ADN, nous accélérons simplement cette sélection ».

Des données issues de marqueurs moléculaires spécifiques ouvrant également la voie à la construction d'arbres phylogéniques permettant de mieux comprendre l'histoire évolutive des espèces mais aussi à une médecine humaine et à des soins vétérinaires personnalisés en prenant en compte la composition ADN propre à chaque être vivant. Une réalité qui n'était encore que fiction il y a encore seulement quelques années...

Sébastien Joly

Plus d'infos :

gentyane.clermont.inra.fr

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