Réforme des collectivités territoriales
Les maires n’en veulent pas
Les élus locaux font front contre cette mesure, dont l’examen en seconde lecture au Sénat a débuté le 28 juin dernier. Elle annonce pour eux la fin des communes.
Quelques jours avant la reprise de l’examen parlementaire au Sénat, en seconde lecture, du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, adopté le 8 juin dernier en première lecture par les députés à une courte majorité (voix UMP), le Groupe Monde Rural (GMR) a souhaité que les acteurs des zones rurales s’expriment à ce sujet. Un petit-déjeuner a été organisé le 24 juin, en présence de l’ancien ministre et actuel sénateur du Territoire de Belfort, Jean-Pierre Chevènement. A l’unisson de l’Association des maires de France (AMF) qui a dénoncé un texte « inacceptable » à l’issue de son adoption en première lecture, l’Association des maires ruraux de France (AMRF) a lancé une pétition contre le projet, ouverte aux signatures jusqu’au 26 juin. « Il y a un front uni contre ce texte de la part des maires et des élus locaux », affirme Vanik Berberian, son président. Il pourrait être définitivement adopté à l’Assemblée avant la fin de la session extraordinaire, cet été.
Conseiller territorial
Que dit le projet de réforme du Gouvernement ? Pour en finir avec l’empilement des structures administratives et l’enchevêtrement des compétences, source de concurrence entre institutions ; pour en finir avec le coût jugé exorbitant de ce « millefeuille administratif », coupable de faire déraper les dépenses publiques locales (un bond de 40 milliards d’euros entre 2003 et 2007, annonce le gouvernement) ; pour en finir avec « le maquis des financements croisés » ; bref, pour gagner en économie et en efficacité, le Gouvernement poursuit trois objectifs. Il veut alléger l’architecture territorial en regroupant les collectivités en deux pôles – pôle départements-région et pôle communes-intercommunalité –, et un seul élu, « le conseiller territorial » (3 000 au total), siégera à partir de 2014 à la fois au Conseil général et au Conseil régional (6 000 aujourd’hui au total), désigné selon un mode de scrutin mixte, en l’état actuel des discussions parlementaires (avec une dose de proportionnelle). Une clarification des compétences des collectivités territoriales interviendra par la suite. Le Gouvernement souhaite aussi renforcer la démocratie locale en instaurant le suffrage universel direct pour désigner les représentants des communes au niveau intercommunal ; enfin, il veut coller au « fait urbain » en proposant un nouveau cadre institutionnel, « la métropole » (plus de 450 000 habitants), qui doit renforcer la compétitivité des grandes agglomérations françaises au plan international.
Intercommunalité généralisée
D’accord pour « simplifier, clarifier, faire des économies », le président de l’AMRF juge néanmoins qu’il n’est « pas nécessaire de vouloir ébranler tout l’édifice », considérant que ce texte signifiera à terme « l’absorption du département par la Région », et craignant que l’intercommunalité soit « l’antichambre de la fin des communes ». L’AMRF dénonce ainsi la volonté du Gouvernement de « concentrer au maximum » les échelons locaux, sous la contrainte, « en regroupant les regroupements », affirmant que dans certains départements trois ou quatre intercommunalités sont envisagées. Les maires, au-delà de défendre leur pré carré, disent lutter pour une certaine idée de la démocratie de proximité.
Le consensus est réel pour achever la carte de l’intercommunalité, débutée en 1999 par une réforme de Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Intérieur dans le Gouvernement de Lionel Jospin. Mais selon lui, cette réforme de 2010 n’est « globalement pas nécessaire », le découpage actuel étant déjà « assez clair ». Il voit aussi dans ce texte la fin des départements. Enfin, il juge la critique des financements croisés « facile », lui opposant la nécessité parfois pour des communes de bénéficier d’un double financement, du département et de la Région.