Les éleveurs français au pays des Highlands
À l’initiative des comités régionaux d’Interbev du sud de la Loire, des professionnels de la filière viande française ont rencontré leurs homologues écossais, la semaine dernière, lors d’un voyage d’étude.
Durant cinq jours, une trentaine d’éleveurs, abatteurs, responsables d’entreprises, de coopératives… tous issus d’un des comité régional Interbev de Bourgogne Franche-Comté, d’Auvergne-Rhône-Alpes, d’Occitanie, de Nouvelle-Aquitaine et de Provence-Alpes-Côte-d’Azur ont découvert la filière bétail et viande écossaise en visitant pas moins de cinq élevages, un abattoir, une boucherie et une grande surface. Outre-Manche, la filière est boostée par une culture de l’herbe disons plutôt intensive, marquée par un retournement des prairies régulier tous les quatre à cinq ans, un travail assez abouti sur les amendements et la rotation des cultures. « L’herbe est la base de la ration, complémentée par les céréales, y compris pour l’engraissement. Les agriculteurs ne produisent pas de maïs. Le pays bénéficie d’un climat tempéré propice à la pousse de l’herbe », explique David Chaize, président de la section bovine du Puy-de-Dôme et administrateur d’Interbev Aura. Les éleveurs écossais détiennent en moyenne une cinquantaine de vaches et près de 200 brebis, qui cohabitent par endroit avec des fermes de 4 000 têtes notamment du côté d’Edimbourg et de Glasgow. « Nous avons pu mesurer une grande hétérogénéité selon les régions. Du côté des Highlands, par exemple, les exploitations sont assez proches des nôtres », poursuit l’éleveur puydômois. Pour autant, l’élevage écossais connaît comme en France, une forte décapitalisation, et est de plus en plus challengé sur des questions environnementales et sociétales.
Champion du croisement
Côté race, 80 % de la viande bovine écossaise provient d´animaux issus de croisements de races laitières avec des races à viande. Les taureaux utilisés sont issus de races spécialisées telles l’aberdeen angus, la galloway, la charolaise, ou la limousine. Les veaux sont élevés sous la mère et sevrés vers 9 mois dans les collines écossaises du nord-est. « Aussi déroutant que cela puisse paraître, vu de nos régions plus coutumières du travail en race pure, cette stratégie de croisement en Écosse répond à un objectif : produire de petites carcasses, assez homogènes, un peu plus grasses mais plus petites. Dans ce cadre, ils élèvent majoritairement des jeunes génisses et des bœufs, et castrent les mâles », analyse David Chaize. La plupart de la viande est commercialisée via le réseau des GMS, tandis que les boucheries sont très rares. Les Écossais exportent aussi en bovins et en ovins vers toute l’Europe. De l’éleveur au magasin, peu d’intermédiaires, puisque grâce à un important maillage de marché aux bestiaux et de ventes aux enchères, pratiques très anglo-saxonnes, les éleveurs sont en prise directe avec les acheteurs. « Ils s’organisent entre voisins pour l’acheminement vers l’abattoir ». Niveau prix, les cours écossais sont actuellement au même niveau qu’en France. Dépendante du Royaume-Uni, et Brexit oblige, l’Écosse est par ricochet sortie de l’Europe. Une situation que déplorent les éleveurs, qui ne voulaient pas être écartés de la PAC. « Ils craignent que leur pays désormais isolé, opte pour un cap incertain. Sortir du Royaume-Uni pour réintégrer l’Europe est d’ailleurs une option en cours de discussion en Écosse », conclut David Chaize.