Face à la hausse des charges en viande bovine
« Le contrat : une arme de proposition massive que doivent utiliser les éleveurs »
Alors que la décapitalisation s’accélère dans un contexte de hausse de charges sans précédent, la vente des animaux aux coûts de production doit s’imposer selon Delphine Freyssinier et Laurent Courtois, éleveurs dans le Cantal et dans le Rhône, y compris pour les broutards soumis à la contractualisation obligatoire dès le 1er juillet prochain.
Alors que la décapitalisation s’accélère dans un contexte de hausse de charges sans précédent, la vente des animaux aux coûts de production doit s’imposer selon Delphine Freyssinier et Laurent Courtois, éleveurs dans le Cantal et dans le Rhône, y compris pour les broutards soumis à la contractualisation obligatoire dès le 1er juillet prochain.
La chute du nombre d’animaux dans les cheptels allaitant se poursuit. Au niveau des vaches allaitantes, ce sont plus de 100 000 animaux qui ont disparu des élevages français en un an. « Ce sont d’autant plus de veaux qui ne naîtront pas. Le secteur s’inquiète, autour de 5 000 bovins manquent chez les abatteurs chaque semaine. En steak haché, certains opérateurs avancent le chiffre de 30% de manque. La décapitalisation se poursuit et cela ne nous surprend pas : les coûts de production, les charges, augmentent. Mais du côté des éleveurs, le prix de vente ne suffit pas à couvrir les hausses de charges », regrette Delphine Freyssinier, éleveuse dans le Cantal. « Même chez nous, où nous étions un peu préservés jusqu’à présent, on perd des vaches ». Pour elle, comme pour son homologue du Rhône, Laurent Courtois, plus que jamais « les éleveurs doivent impérativement proposer leur contrat aux coûts de production comme le prévoit la loi ». En effet, à ce stade, la contractualisation en permettant à chaque éleveur de proposer son tarif de vente en corrélation avec son coût de production est la meilleure des réponses pour enrayer l’hémorragie.
La balle est dans notre camp
Et il y a urgence : « Que les fournisseurs passent des hausses de charges, c’est compréhensible. Il n’y a pas d’autres solutions, nous avons tous des factures à payer. Mais de notre côté, nous devons en faire autant en proposant un prix de vente pour répercuter nos charges. Aucune profession n’accepte de travailler à perte. Il est temps que cela soit vraie aussi pour les éleveurs », estime Delphine Freyssinier. Concrètement, la contractualisation démarre chez l’éleveur. Il doit échanger avec son acheteur et lui faire parvenir une proposition de contrat, auquel il doit obligatoirement répondre sous un délai légal d’un mois. « S’il ne veut pas jouer le jeu, alors il faut saisir le médiateur », insiste Laurent Courtois, éleveur dans le Rhône et administrateur à la FNB. Alors certes, difficile d’envisager modifier quarante de pratiques en quelques mois, mais le jeu en vaut vraiment la chandelle. « Les FDSEA sont là pour accompagner les éleveurs à se familiariser avec cette nouvelle mécanique de tarif évolutif ». Et plus le nombre d’éleveurs qui contractualisera sera important plus les opérateurs de l’amont seront contraints d’acheter au prix juste, et pas juste à un prix. C’est mathématique…
Broutards : contractualisation obligatoire dès le 1er juillet
Pour le moment, la contractualisation ne concerne que les vaches allaitantes, les jeunes bovins (de 12 à 24 mois) et les génisses de plus de 12 mois. D'ici le 1er juillet ce sera au tour des veaux maigres et des broutards d'être concernés (voir par ailleurs le modèle de contrat). Et là-aussi l’enjeu est fort : « la période de vêlage est pratiquement finie, au lieu de faire un ticket de vente lorsque que les premiers flocons de neige vont tomber, on anticipe, on prépare ses contrats. Dans des régions, comme les nôtres, les éleveurs doivent prendre ce tournant. On n’installera pas des jeunes si rien ne change. Et demain, ce sont les banques qui vont demander des contrats signés pour accompagner les jeunes. Ne ratons pas le coche ! », résume Delphine Freyssinier.