Santé
Le cœur des femmes, un organe essentiel à chouchouter
La cardiologue Claire Mounier-Vehier, cofondatrice de la fondation Agir pour le cœur des femmes, a participé à une conférence en ligne sur la prévention des maladies cardiovasculaires. Celles-ci touchent encore trop sournoisement les femmes, faute de prévention et d’une prise en charge adaptée.
La cardiologue Claire Mounier-Vehier, cofondatrice de la fondation Agir pour le cœur des femmes, a participé à une conférence en ligne sur la prévention des maladies cardiovasculaires. Celles-ci touchent encore trop sournoisement les femmes, faute de prévention et d’une prise en charge adaptée.
Les femmes ont du cœur, un cœur que les maladies cardiovasculaires sont loin d'oublier et qui les touchent de plus en plus. Depuis plusieurs années, Claire Mounier-Vehier, cardiologue et médecin vasculaire au CHU de Lille, se bat contre ce qui ne doit pas être une fatalité. Elle a participé à une conférence en ligne organisée par la mutuelle Aésio pour "maintenir le cœur des femmes en pleine forme". Car le cœur des femmes en a bien besoin, et la bonne nouvelle c’est que l’on peut "agir plutôt que subir".
Première cause de mortalité
Les maladies cardiovasculaires (AVC, infarctus, ischémie, embolie pulmonaire, anévrisme...) sont la première cause de mortalité chez les femmes. " Elles tuent six fois plus que le cancer du sein et 50 fois plus que les accidents de la route, illustre la cofondatrice d'Agir pour le cœur des femmes et présidente de la fédération française de cardiologie Nord-Pas de Calais. On pense encore trop souvent que ce sont les hommes, avec un peu d’embonpoint, fumeur, avec du cholestérol qui vont faire un infarctus du myocarde. C’est vrai, il y a toujours trois fois plus d’infarctus chez les hommes que chez les femmes. Ce qui nous inquiète, c’est qu’il y a de plus en plus de femmes de 45 à 55 ans qui sont hospitalisées pour un infarctus ou une embolie pulmonaire, alors que le nombre d’hommes décroît. " La faute à " un engrenage négatif très puissant " dans lequel sont entraînées les femmes dès l’adolescence : mode de vie de plus en plus sédentaire, facteurs de risques plus délétères, défaut de prévention et de dépistage, symptômes atypiques... " Les femmes n’ont pas forcément les mêmes symptômes que les hommes (voir aussi l’infographie), et sont souvent en première intention traitées pour autre chose, ce qui retarde la prise en charge et leurs chances de survie. Ce n’est pas acceptable. On doit d’abord penser au cœur, et procéder par élimination pour sauver des vies, surtout si on est fumeuse, à l’entrée dans la ménopause, qu’on a du cholestérol, qu’on a fait un accident de grossesse ou qu’on ait eu trois grossesses. " Une fois prises en charge, encore faut-il que les femmes soient soignées comme les hommes. " C’est la dernière injustice : ces femmes ne vont pas sortir forcément avec la même ordonnance qu’un homme. Les statines (médicaments) sont moins prescrites, comme la rééducation cardiovasculaire, alors qu’elle permet de diminuer de moitié le risque de récidive ! "
Mieux dépister
Trois moments clés permettraient d’identifier les risques face aux maladies cardiovasculaires : le début d’une contraception, une grossesse, et le début de la ménopause. Autant d’étapes qui permettent d’identifier l’hypertension, le cholestérol... C'est aussi un moment décisif car les œstrogènes jouent un rôle certain dans l’apparition de ces maladies. " Ils ont un effet protecteur sur nos vaisseaux et notre métabolisme, c’est pour ça qu’à la ménopause, l’arrêt de leur production peut être déclencheur. " Face à ce constat, Claire Mounier-Vehier expérimente dans la région une proposition de consultation de dépistage à l’entrée dans la ménopause avec un cardiologue. " Sur le même principe qu’une mammographie proposée dès 50 ans. "
Pas une fatalité
La bonne nouvelle, après ce constat à couper le souffle : " Dans huit cas sur 10, nous pouvons l’éviter. " Car l’ennemi n° 1 de ces maladies, c’est une mauvaise hygiène de vie. " Si on ne peut rien au fait d’être une femme, d’être ménopausée, d’être précaire, on doit agir sur les autres facteurs de risques modifiables pour limiter les risques. Il n’y a pas de petite prévention : on peut agir sur le cholestérol, le tabac, la consommation d’alcool, l’activité physique… " Trois à quatre cigarettes par jour, c’est trois fois plus de risque de faire un infarctus. " Avant 50 ans, le tabac est retrouvé dans huit cas sur 10 comme cause de l’infarctus ", note la cardiologue. Le poids est aussi un facteur de risque, " et une femme dans les quatre à cinq ans qui précédent la ménopause, si elle ne fait pas attention, prend 20 à 30 grammes par jour ! " Il y a aussi le développement de l’hypertension : " Après 50 ans une femme sur deux est hypertendue. " La spécialiste conseille d’acheter un matériel d’automesure au bras et de mesurer sa tension deux fois par an, à raison de trois fois par jour, trois jours de suite pour la détecter. " Elle ne doit pas être supérieure à 135/85 à la maison. " Et bien sûr avoir une activité physique ne serait-ce que marcher ou monter les escaliers à pied, " au moins trente minutes par jour (ou trois fois dix minutes), tous les jours ". Bouger ne permet pas de lutter que contre les effets de la ménopause, mais aussi contre le développement ou l’aggravation de toutes les maladies chroniques. " L’essentiel est que les femmes s’emparent du sujet et en discutent autour d’elles ", conclut Claire Mounier-Vehier, en délivrant le cocktail gagnant : " Alerter, anticiper, agir, s’écouter et se faire dépister ".