Le blé manque en Limagne
Les récoltes céréalières sont bien entamées dans le Puy-de-Dôme permettant d’établir un premier bilan peu réjouissant.

C’est la deuxième voire troisième année consécutive d’un interminable coup dur. Encore une fois, les rendements des grandes cultures ne sont pas à la hauteur des espérances. En moyenne, les producteurs ont perdu sur cette campagne entre 20 et 30% des volumes en blé d’hiver. A cela, il faut ajouter les cours du marché céréaliers qui ne suffiront pas à couvrir l’intégralité des charges de production. La situation devient critique dans les campagnes. Claude Raynaud, président de la section Productions végétales à la FNSEA 63 observe chaque jour une baisse de moral inquiétante parmi les céréaliers.
Des rendements désastreux
Samedi dernier, environ 75% des surfaces de Limagne étaient moissonnées. Les premiers résultats laissent à désirer comme l’explique le responsable syndical : «nous accusons entre 20 et 30% de perte de volume. En moyenne, 5,5 tonnes à l’hectare ont été récoltées avec, dans certains secteurs, seulement 3 tonnes à l’hectare». La faute aux conditions météo de mai et juin qui ont lourdement impacté les cultures. L’excès d’eau, le manque d’ensoleillement et la baisse des températures ont limité le développement des végétaux. Ce contexte pousse aujourd’hui les agriculteurs à prononcer une phrase peu habituelle : «cette année, les meilleures terres n’ont pas fait les meilleurs rendements». En effet, les résultats se maintiennent davantage dans certains secteurs de Limagne Sud où les terres, plus légères, ont avalé rapidement l’eau excédentaire. A contrario, en Limagne Nord, pays à la terre noire, l’eau s’est évacuée lentement, asphyxiant les cultures.
Onde de choc
Devant de tels résultats, le moral est en berne chez les céréaliers. Financièrement, les premières estimations laissent présager le pire. «Entre le prix des céréales, les charges de production, les investissements, les pertes de rendements… nous sommes au minimum à -500 €/ha. Il y a 40 000 ha de grandes cultures dans le Puy-de-Dôme, faites le calcul !» L’application de la nouvelle PAC, dont les aides du 1er pilier ont été grignotées, prévoit une baisse de 30% des aides sur trois ans pour les céréaliers. A cela, il faut encore ajouter les charges liées aux contraintes environnementales. Si le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll a annoncé un plan de soutien (voir page 4), les mesures immédiates ne sont, selon Claude Raynaud, qu’un pansement temporaire. «Il faut bien entendu agir et soutenir immédiatement les producteurs mais il faut surtout des solutions à long terme. Il faut redonner de l’espoir et de la visibilité. Les producteurs sont dégoutés et de plus en plus nombreux à dire qu’ils vont cesser leur activité». Seulement dans cette histoire, c’est le chien qui se mord la queue ! Moins de producteurs égal moins de produits et des acteurs (coopératives, prestataires de service…) qui tournent au ralenti. Claude Raynaud craint qu’à long terme, après plusieurs années de crises successives, le tissu agricole de la Limagne ne se réduise à peau de chagrin, d’où l’urgente nécessité d’après le responsable syndical de revoir l’organisation de l’ensemble du système. «Aujourd’hui, nous sommes réduits à souhaiter que nos voisins européens et d’outre-Atlantique subissent en 2017 une catastrophe naturelle dévastatrice ou (encore) un fléau sanitaire pour espérer voir remonter les cours des céréales. Nous en venons à parier sur le malheur des autres ! C’est une situation loin d’être saine et qui témoigne de la défaillance du système, tant en céréales, que dans les autres productions agricoles.» Or, il faudra plusieurs décennies pour réformer une telle machine, sans compter qu’elle profite à ceux qui ont su la dompter. En attendant, la situation est critique dans le Puy-de-Dôme et Claude Raynaud est formel : «les cultures de printemps (maïs semences, grains et betterave) ne suffiront pas à compenser les pertes».