La Sopa, un outil à l’avant-garde
Petit poucet dans le monde de l’équarrissage, la société cantalienne pilotée par la profession agricole poursuit ses investissements et sa modernisation logistique.
C’est une entreprise au positionnement atypique sur l’échiquier national que la profession agricole cantalienne - à l’origine de sa création - préserve jalousement. Alors que le marché de l’équarrissage s’est concentré en France entre les mains de deux opérateurs (Akiolis et Saria), la Sopa poursuit sans complexe son activité et sa modernisation en restant fidèle aux principes qui ont prévalu à sa fondation : “Rendre service aux paysans et à l’agroalimentaire qu’il y a derrière, faire vivre des salariés localement”, résume Jean-Pierre Chateau, nouveau président de la société qui remplace depuis quelques semaines Serge Paran, lequel avait succédé à son père Roger, président fondateur.
La Sopa se met au gaz
“La Sopa est un modèle qui n’existe nulle part ailleurs : c’est une Sica-SA pilotée par la profession agricole(1), mais dont l’actionnariat est composé à 50-50 avec l’un de deux grands nationaux, Saria”, expose celui qui se félicite de la trajectoire de cette “petite entreprise qui marche bien et qui donne satisfaction”. Pour preuve, une réactivité qui se traduit, entre autres, par un délai de passage dans les 48 heures (après l’appel) respecté dans 97,6 % des cas. “On atteint même un tiers des animaux ramassés le jour-même de l’appel, c’est un ratio qu’on est les seuls à tenir du fait d’une zone d’intervention proche”, relève le président. Une entreprise dont il reprend donc les rênes, dans le cadre d’un tandem formé avec Pierre-Olivier Prévot, directeur en poste depuis le printemps. Un équipage dont le carnet de route est déjà bien rempli avec un chantier en cours de réalisation : l’installation d’un réseau au gaz (500 000 €) qui sera opérationnel en début d’automne. Jusqu’alors, la Sopa brûlait les graisses, l’un des sous-produits de l’élimination des cadavres animaux et déchets, pour faire tourner l’usine. Une option que le prix de vente de ces mêmes graisses pour alimenter les filières de biocarburants, ne rend plus intéressante économiquement.
Anticiper les évolutions réglementaires
Autre enjeu, environnemental et économique : la gestion de l’eau sur ce vaste site, qui récupère beaucoup d’eaux pluviales et qui se doit de procéder à l’élimination des eaux issues des cadavres (près de 25 000 t/an). Actuellement, une partie est “brûlée” pour être évaporée, une autre acheminée dans la station d’épuration homologuée “C1” la plus proche, celle de Bayet dans l’Allier. On comprend vite les limites d’un tel système... “Il nous faut aussi sécuriser notre process, notre usine neuve ne l’est plus, et il faut prévenir les pannes”, affiche Pierre-Olivier Prévot. Au programme également, la nécessité d’anticiper sur des évolutions réglementaires potentielles. Ainsi, sans nouveau cas d’ESB d’ici deux ans, la France devrait retrouver son statut de pays à risque négligeable. Conséquence : “On pourrait perdre 25 % de nos tonnages, ce n’est pas neutre”, expose le dirigeant.
Co-responsabiliser les paysans
“L’un de nos chantiers, c’est aussi de sensibiliser les agriculteurs dont on constate une hétérogénéité de comportements, relève Jean-Pierre Chateau. Pour moi, quand on prend un cadavre, on ne prend pas un tas de ferraille ou de cailloux de l’éleveur. Il faut que chacun se responsabilise.” Des morceaux de métaux qui peuvent coûter cher dans le process industriel jusqu’à mettre en panne l’ensemble de la chaîne. “S’il faut que nos gars passent deux heures pour trouver l’animal mort ou qu’ils soient gênés avec la grue par des branches... on perd un temps fou. On ne peut plus faire d’épicerie !” D’où l’appel du président à prévoir dans chaque cour de ferme une petite dalle de béton de 3-4 m2 pour déposer les cadavres. De son côté, la société a lancé Sopaweb (lire L’union du 19 juillet) pour accélérer encore les délais de ramassage en permettant aux éleveurs de faire leur demande d’enlèvement en ligne (via Selso). À la clé, un gain de temps et de qualité : “Plus on traite vite, plus la qualité des graisses à l’aval sera bonne”, indique le directeur.
(1) Chambres d’agriculture du Cantal, Lot et Corrèze, groupe Altitude et GDS de Corrèze.
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