Interview
« La FNSEA demande une réforme des retraites courageuse »
Jean-Bernard Bayard, vice-président de la FNSEA, détaille la position de la FNSEA sur les retraites agricoles.
Quels sont les objectifs de la FNSEA pour cette négociation ?
Jean-Bernard Bayard : La réforme doit restaurer la confiance. Depuis plus de 20 ans, les réformes des retraites se succèdent. Et les Français finissent par se demander si leurs régimes de retraite ne vont pas un jour mettre la clef sous la porte. Pour la FNSEA, il est aussi important de trouver une solution aux déficits que de restaurer la confiance dans l’avenir par des règles équitables. Nos politiques doivent faire preuve de courage vis-à-vis des jeunes générations. Il ne suffit pas de parler de justice sociale et d’équité. Il faut que ces mots reprennent sens. En disant cela, je pense bien évidemment à la nécessité de relever les plus faibles retraites agricoles qui demeurent à des niveaux indignes. Les promesses du candidat Hollande doivent ainsi être tenues (voir encadré).
Concernant les mesures de retour à l’équilibre financier, quelles sont les pistes de travail de la FNSEA ?
J-B. B : Les déficits des régimes de retraite imposent de trouver rapidement des ressources. Il y a trois solutions pour cela : augmenter les cotisations, diminuer (ou moins revaloriser) les retraites et allonger la durée de cotisation en retardant l’âge de départ ou en augmentant le nombre de trimestres nécessaires. La FNSEA refuse toute baisse du montant des retraites et tout décrochage des retraites par rapport à l’inflation. Il est impensable d’éroder des pensions agricoles déjà, en moyenne, inférieures au minimum vieillesse (787 € par mois). La retraite minimale des exploitants n’atteint même pas l’objectif minimal de 75 % défini en 2003 lorsque les salariés ne peuvent toucher de retraites inférieures à 85 % du SMIC. De même, la FNSEA refuse toute hausse des cotisations sur les revenus du travail. Il en va de la compétitivité de nos exploitations et de notre économie. Nous nous opposons également à un nouveau recul de l'âge de la retraite. Seule une augmentation de la durée de cotisation en lien avec l’espérance de vie peut être envisageable. En effet, tous ceux qui ont commencé jeunes ne sont pas impactés…
Dans ce cadre, nous demandons des possibilités de retraite anticipée pour les exploitants qui terminent leur carrière agricole en mauvaise situation physique ou financière. Ils sont aujourd’hui exclus de la retraite pour pénibilité qui implique un accident du travail ou une maladie professionnelle. Toutefois, je veux le dire avec force, notre syndicat appelle les acteurs de la réforme à élargir leur réflexion. Une réforme comptable n’est pas suffisante au regard des enjeux.
« Les 25 meilleures années »
Quelles seraient, selon vous, les bases d’une réforme plus ambitieuse ?
J-B B : Il est urgent de remettre de l’équité dans le calcul des retraites. Alors que certains bénéficient d’une retraite calculée sur les 6 derniers mois, les agriculteurs sont les seuls à recevoir une pension basée sur l’intégralité de leur carrière, bonnes et mauvaises années mêlées. Les autres indépendants commerçants et artisans ou les salariés calculent leur retraite sur leurs seules 25 meilleures années de revenus. Il est impossible de justifier de telles différences de traitement. Les variations de revenus de plus en plus fréquentes en agriculture imposent un changement. Un mouvement de convergence est donc nécessaire. Et la retraite des agriculteurs doit aussi être calculée sur les 25 meilleures années de revenus. Au-delà du mode de calcul de la retraite, l’assurance vieillesse doit assurer le même minimum pour vivre à tous les retraités qui ont cotisé une carrière complète. Ce minimum doit être forfaitaire, que l’on soit agriculteur, cheminot ou salarié… Il doit être l’expression de la solidarité nationale. A ce titre, son financement doit être assuré par l’impôt (TVA ou CSG). Aujourd’hui, le minimum de retraite agricole n’est pas calculé de la même façon que le minimum de retraite du régime général. Un minimum d’activité agricole de 17,5 ans est exigé et les plafonds de ressources sont moins favorables aux agriculteurs. Ce n’est pas normal ! C’est en respectant ces priorités que nous restaurerons la confiance des Français dans leur retraite. En les rassurant sur leur niveau de vie une fois en retraite. En garantissant l’équité entre tous.
D’après Actuagri