PAC 2013
La FNSEA affiche ses positions
Préférence communautaire, maintien du budget agricole à son niveau actuel ainsi que des outils de régulation, paiements directs « harmonisés » à la place des références historiques, recouplage des aides quand c’est possible, telles sont les lignes de force sur lesquelles s’est prononcée la FNSEA lors de son conseil décentralisé dans l’Ain, le 7 juillet.
A l’occasion de son conseil décentralisé qui s’est déroulé le 7 juillet, dans l’Ain, la FNSEA a adopté un document sur les orientations qu’elle entend faire prévaloir dans la prochaine Pac. Alors que les négociations ont démarré à Bruxelles et que les discussions s’intensifient entre Etats membres et que le Parlement s’est prononcé sur un projet, la FNSEA a tenu à apporter sa contribution au débat.
La rue de La Baume fixe deux préalables à toute évolution de la Pac. D’abord la préférence communautaire. Parce que l’agriculture européenne offre aujourd’hui des produits de haut niveau qualitatif et que les agriculteurs supportent des coûts sociaux, des coûts de production élevés et des obligations environnementales, cette réalité doit trouver une juste rémunération. « C’est tout l’enjeu du maintien d’une préférence communautaire, seul outil à même de protéger les acquis sanitaires, sociaux et environnementaux de l’Union : baisser la garde dans le cadre des négociations multilatérales (Doha) ou bilatérales (Mercosur) serait nier l’existence d’une politique alimentaire européenne » note le document.
Deuxième préalable, une enveloppe budgétaire suffisante. La FNSEA plaide pour un maintien du budget de la Pac (1er et 2ème piliers confondus) « au minimum identique à son niveau actuel ». Pas question non plus de remettre en cause la répartition de l’enveloppe entre les différents pays. « Quant à la part du budget de la Pac affectée à notre pays, elle ne représente que notre place dans l’ensemble européen : nous n’acceptons pas que cet équilibre soit remis en cause » insiste la centrale syndicale. Pas question non plus d’envisager des paiements directs harmonisés à l’hectare au niveau européen. L’équité ce n’est pas l’égalité. « Les enveloppes d’aides directes ne peuvent qu’être réparties entre Etats membres de manière équitable, en tenant compte de critères objectifs tels que les conditions de productions ou les parités de pouvoir d’achat ».
Désannualisation du budget agricole
Ces préalables étant fixés, la FNSEA se prononce pour de nouveaux outils de régulation des marchés. Son constat est le suivant : les outils originels de gestion des marchés, l’intervention publique notamment, « ne peuvent plus être opérationnels » en raison de la diversité des coûts de production entre pays. En outre, prévaut aujourd’hui la notion de filet de sécurité qui n’est pas en mesure de dégager un revenu suffisant, notamment en France, en raison de ses structures et de ses coûts de production. D’où l’idée de renforcer le pouvoir des agriculteurs dans les filières. Ce qui passe bien entendu par une évolution du droit européen de la concurrence qui « doit permettre les développements des politiques contractuelles, sans que les acteurs soient taxés d’entente ou d’entrave à la concurrence ». Pour autant la FNSEA n’entend pas renoncer à un système de régulation publique qui doit combiner stockage public, stockage privé, soutiens aux exports, dégagements de marché ainsi que l’aide alimentaire.
La politique d’intervention sur le marché doit certes bénéficier d’une dotation suffisante. Mais l’originalité de la proposition réside, à l’image de ce que pratiquent les Etats-Unis, dans « la dé-sannualisation » du budget agricole. De façon à ce que les crédits non utilisés une année soit reportés à l’intérieur d’une enveloppe pluri-annuelle, en fonction des aléas de la conjoncture.
Sept ans
Quant aux paiements directs, la FNSEA se prononce pour l’abandon de la référence historique. « Une convergence vers un système harmonisé des paiements directs doit être mise en place » , souligne la centrale syndicale. Comme cela a été fait chez nos partenaires. Mais prévient-elle, le changement de système ne peut être que progressif. « Passer dans notre pays d’un système sur bases « historiques » à un système « harmonisé » n’est concevable qu’à la condition expresse de prendre du temps ». En tout cas, pas une durée inférieure à sept ans. On le sait, la FNSEA n’est pas favorable au découplage total des aides, tels qu’il a été décidé dans la réforme de 2003. Mais faute de pouvoir le remettre en cause, - la France est minoritaire à Bruxelles sur cette question – elle souhaite néanmoins que le recouplage soit rendu possible dans la nouvelle Pac « pour soutenir des secteurs en risque de déprise ou des productions essentielles pour le maintien de la présence agricole sur certains territoires ».
De même, si elle considère que « le tout DPU n’est pas une politique » et que le soutien à l’hectare retenu par l’Union européenne « n’est pas pertinent » puisqu’il ne tient pas compte des actifs, ni des différentes valeurs dégagées à l’hectare selon les productions, la FNSEA ne se sent pas en mesure de revenir sur ce choix européen. Mais elle demande, en contrepartie, que les pays puissent utiliser une partie des soutiens directs « pour financer l’accompagnement des agriculteurs et de leurs productions ». « Avec des modalités d’intervention qui ne créent pas de distorsions de concurrence sur le marché européen, les pays qui le souhaitent doivent pouvoir prendre les moyens de soutenir les exploitations, les secteurs de production qui en ont besoin face à une crise qui met en danger leur avenir » insiste la centrale syndicale. Et de citer certaines productions fragiles, la mise en place d’outils de gestion des risques (assurance, fonds sanitaire...), les circuits courts, l’agriculture biologique….
Statu quo sur la conditionnalité
Pas question d’aller plus loin en matière de conditionnalité. « Un nouveau renforcement des règles de conditionnalité deviendrait préjudiciable à la qualité, aux volumes et à la compétitivité des productions européennes » insiste la FNSEA qui se prononce également pour le maintien du deuxième pilier. Sa vocation étant de financer, comme aujourd’hui, l’installation des jeunes, la compensation des handicaps naturels, l’accompagnement de politique se développement du milieu rural, des engagements volontaires des agriculteurs sur les attentes sociétales.
Quoi qu’il en soit, insiste la rue de La Baume, « la Pac doit être avant tout une politique économique » et l’essentiel des financements doit relever du premier pilier. Son affaiblissement « insidieux » est « inacceptable ». En d’autres termes, la FNSEA s’opposera à toute nouvelle modulation.
JM. Lemétayer : « Nous nous battrons pour que le budget soit préservé »
En présentant à la presse le document d’orientation de la FNSEA sur la Pac 2013, Jean-Michel Lemétayer a insisté sur le nécessaire maintien de la préférence communautaire et d’une enveloppe budgétaire suffisante au moins égale à celle d’aujourd’hui.
« Nous voulons une Pac ambitieuse parce que l’agriculture est stratégique » puisqu’elle doit « assurer la sécurité et l’indépendance alimentaire de 500 millions de consommateurs européens et contribuer à l’approvisionnement du monde » , a déclaré Jean-Michel Lemétayer en présentant le document d’orientation sur la Pac 2013 adopté par le Conseil décentralisé de la FNSEA, le 7 juillet dans l’Ain. Sans oublier la nécessaire sécurisation du revenu des producteurs face à la volatilité des prix et des marchés.
C’est la raison pour laquelle, « il est absolument nécessaire de préserver la préférence communautaire » pour « valoriser les normes sanitaires, sociales, environnementales » que l’Europe impose à ses producteurs face à « des importations dont les exigences ne sont pas les mêmes ».
Surtout, le budget agricole doit être maintenu à son niveau actuel. « Nous nous battrons pour qu’il soit préservé », a plaidé le président de la FNSEA. Avant d’évoquer de nouvelles régulations « pour prévenir et gérer les crises ». La FNSEA insiste notamment sur le renforcement du pouvoir des agriculteurs dans les filières qui passe par la réforme du droit européen de la concurrence et le maintien de mécanismes de gestion des marchés : stockage public, stockage privé, accompagnement à l’export… La FNSEA propose d’y réserver « une dotation budgétaire conséquente ». Mais elle avance surtout l’idée d’une « désannualisation » des dépenses d’intervention pour « reporter d’une année sur l’autres les dépenses non utilisées ». Plutôt qu’un système de paiements « flexibles », incompatible avec le découplage des aides.
Convergence
Sur le régime des paiements directs, la FNSEA a désormais sa religion : « On ne pourra pas rester une base historique » reconnaît Jean-Michel Lemétayer, mais il demande une période de transition suffisamment longue – 7 ans – pour « aller à la convergence des soutiens », en raison des écarts importants qui peuvent exister actuellement entre les niveaux d’aides à l’hectare.
Ceci étant, les Etats membres « doivent garder des éléments de soutien » à l’instar « de l’article 68 du bilan de santé » pour « flécher des aides » vers des productions fragiles, mettre en place des outils de gestion des risques (assurance, fonds sanitaire…), ou encourager de nouveaux types de production (circuits courts, signe de qualité, agriculture de qualité...). « Nous sommes hostiles au tout DPU », a résumé Jean-Michel Lemétayer.
Quant à la conditionnalité, « il convient d’arrêter de charger la barque », a déclaré le président de la FNSEA qui se prononce également pour le maintien du deuxième pilier. « Il a son importance » pour financer l’installation des jeunes agriculteurs et les indemnités compensatrices de handicaps.