La Caba va mettre les (bio-)gaz
À l’issue d’une étude de faisabilité, la communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac et un pool de partenaires sont prêts à mettre en œuvre rapidement une double unité de méthanisation.
Fervent partisan du nucléaire, le président de la Caba ne fait pas de l’atome une approche idéologique. Pour preuve, après la centrale photovoltaïque au sol du côté de Tronquières, l’Agglo s’apprête à emboîter le pas du pays de Salers dans le cadre d’un projet partenarial associant agriculteurs, collectivités et entreprises privées. D’ici 18 mois à 2 ans, deux unités de méthanisation pourraient en effet venir valoriser un potentiel d’effluents estimé à 35 000 tonnes annuelles selon l’évaluation issue d’une étude sur la faisabilité d’une filière méthanisation. Celle-ci a porté sur un territoire intercommunal volontairement restreint à un périmètre d’une trentaine de kilomètres autour d’Aurillac pour des questions de coût de transport des matières.
Une unité agricole, une autre industrielle
Tout est parti de remontées de différents acteurs économiques, industriels, GMS,... faisant état de la difficulté à optimiser le traitement de leurs déchets et le cas échéant, à les valoriser. La communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac s’est portée volontaire courant 2015 pour piloter une réflexion commune avec de multiples partenaires(1). Le bureau d’études Girus a été missionné pour évaluer le gisement et sa pérennité, analyser les différents scenarii d’exploitation et approfondir une solution technique en parallèle d’une approche financière et opérationnelle. Au terme de cette étude(2) nourrie d’éléments statistiques et de rencontres avec les acteurs potentiels, ce scénario de deux unités a été jugé le plus pertinent.
Injection directe dans le réseau gaz
Une première installation (silo) serait alimentée aux deux tiers par des effluents agricoles (fumier, lisier, à raison de 7 700 t/an) complétés par des déchets verts de collectivités (3 900 t/an) pour parer à la saisonnalité des effluents d’élevage. Elle fonctionnerait en voie sèche pour une production de biogaz (méthane) de l’ordre de 972 000 m3 annuels, soit l’équivalent d’une unité de 250 kWe. Les 23 000 t de digestat résiduel (4,7 % de MS après déshydratation) seraient restituées aux éleveurs fournisseurs pour épandage. Avec une aide au transport des effluents et du digestat en retour. La seconde unité, dite industrielle, installée sur le même site mais gérée de manière indépendante, fonctionnerait à partir de biodéchets d’origine industrielle (déchets de l’agro-alimentaire, de la distribution, de la restauration collective, graisses de vidange...) ainsi que des boues de station d’épuration de la Caba pour un tonnage à l’entrée de cuve évalué à 23 700 t. Le process serait celui de la voie humide avec co-digestion pour une production annuelle de biogaz d’environ 712 000 m3, soit un pouvoir méthanogène bien moindre de ces déchets. Les résidus pâteux de cette installation seraient en partie réutilisés en tête de process, le reste éliminé par incinération ou en station d’épuration. La quantité globale de biogaz produit avoisinerait 1,7 million de m3/an pour 876 000 m3 de méthane extrait annuellement.
Rentabilisé en neuf ans seulement
L’injection directe de ce biogaz dans le réseau gaz sera privilégiée compte tenu des moindres pertes associées à ce débouché et de son meilleur rendement. “Sachant que l’injection commence à être rentable à 50 m3/h, ici on serait au double”, a commenté Christian Franco, directeur des services techniques de la Caba qui a présenté vendredi le projet en présence des élus et partenaires. Ajoutant une autre prédisposition favorable : la présence sur le territoire d’infrastructures et d’un réseau capable de recevoir ce biogaz. Quid de la rentabilité de cette double installation ? Le cabinet Girus a chiffré l’investissement à 6,2 M€ HT, sachant que l’hypothèse de subventions à hauteur de 15 % semble réaliste. Le coût d’exploitation (avec amortissement) approcherait 1 M€/an pour des produits, principalement issus de la vente de gaz, de l’ordre de 1,3 M€. Soit un résultat d’exploitation lissé sur 15 ans qui atteindrait 366 000 €/an selon une approche prudente. Même sans subventions, le temps de retour sur investissement ne dépasserait pas 9 ans, ce qui est jugé déjà très satisfaisant. “Techniquement et économiquement, c’est un projet qui peut aller vite”, a affiché Jacques Mézard, Philippe Granier, vice-président en charge de l’environnement, évoquant une livraison sur 2018-2019 avec une maîtrise d’ouvrage qui pourrait prendre la forme d’une Sem, société d’économie mixte. “C’est un moyen de valoriser nos ressources locales, de produire de l’énergie en générant quelques retombées financières, a mis en exergue le président de l’Agglo. C’est aussi un message positif envoyé à nos concitoyens et aux exploitants agricoles qui ne nous ont d’ailleurs pas attendus pour travailler là-dessus.” “C’est un projet réellement novateur, de progrès et enfin un équipement public qu’on arrivera à rentabiliser !”, a réagi Jean-Antoine Moins s’exprimant au nom du Conseil départemental, partenaire. Le projet devrait très prochainement être soumis au conseil communautaire avant d’entrer dans une phase plus opérationnelle.
(1) Acteurs économiques, consulaires, DDT, Région, Département, Ville d’Aurillac, Ademe, Bois énergie 15 et méthanisation, Smoce, Lial MC, Lip, Biose, GRDF et Oser (banques). (2) De 28 740 € TTC, financée par la Caba avec une aide de l’Ademe à hauteur de 50 %.
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