Fréquentation touristique : “Depuis la mi-juillet, c’est le 15 août tous les jours !”
Après l’angoisse d’un été à blanc, les acteurs du tourisme ont retrouvé le sourire dès le mois de juillet avec une fréquentation exceptionnelle voire inédite partout dans le Cantal.
Si ce n’est pas encore Noël, depuis la mi-juillet dans le Cantal, “c’est le 15 août tous les jours !”, lance Philippe Fabre, président du syndicat mixte du Grand Site Puy Mary. Au Pas de Peyrol, l’éco-compteur s’affole : en juillet plus de 100 000 passages y ont été enregistrés, soit 35 000 de plus qu’en juillet 2019. Le Puy Mary a pris des allures de croisette. La fréquentation des maisons de site affiche elle aussi une nette hausse : + 28 % en juillet, + 42 % en août, avec des produits qui se vendent comme des petits pains. Et dans la vallée de la Jordanne, “on n’a jamais vu autant de monde depuis 40 ans”, avance le maire de Mandailles-Saint-Julien. Plus une chambre disponible à des kilomètres à la ronde... Au Bout du Monde (restaurant de Mandailles), on sert le cochon à la broche, non stop sept jours sur sept.
Autre motif de satisfaction pour le syndicat mixte : des navettes plébiscitées malgré les contraintes sanitaires. Plus en amont, les gorges de la Jordanne connaissent une telle affluence (500 à 600 visiteurs jour) que le port du masque a dû être rendu obligatoire. Même succès pour la visite d’un autre site de la Caba : celle, en 3D, du rocher de Carlat.
Du jamais vu depuis 20, voire 40 ans
Cette vague touristique inédite profite à l’ensemble du territoire : lacs, montagne, sentiers, cascades, châteaux... tous sont pris d’assaut. De quoi redonner le moral à tous les acteurs du tourisme cantalien qui se rongeaient les sangs au sortir du confinement. “Le mois de juin a été super calme, depuis on tourne à plein et on a deux fois plus de monde qu’un été normal”, confirme Antoine Tylinski, directeur de la base de loisirs Garabit-Mallet, qui a dû sacrifier ce printemps un mois et demi d’activité. “On a la chance en plus d’avoir eu du beau temps.” Une fréquentation telle que la structure n’a pas toujours pu répondre à la demande : pas assez de moniteurs disponibles pour les cours de voile, pas assez de matériel pour la location des catamarans, dériveurs, paddle,.... “C’est arrivé qu’on ait dû refuser des gens”, regrette le responsable qui prévoit de prolonger la saison jusque début novembre. “Mais ça dépendra de la fréquentation. On tourne pas mal avec les écoles de voile, les journées d’intégration lycéennes...”
“Les gens sont venus se mettre au vert”
Au Lioran, Félix Testut, qui a repris en 2019 la structure Lioran Aventures dont il était salarié, ne cache pas sa satisfaction : “Ça fait longtemps qu’il n’y a pas eu autant de monde dans la station et c’est le meilleur mois de juillet qu’on ait fait avec un démarrage dès le 6 juillet.” Lui aussi a dû, certains jours, refuser des clients qui n’avaient pas pris soin de réserver pour une sortie accrobranche. Et même s’il a fallu faire une croix ce printemps sur l’accueil des classes vertes et sorties scolaires, cet été hors normes “va compenser”, estime le jeune homme qui emploie quatre saisonniers.
Plus de fréquentation, plus de locations, plus de passages aux remontées mécaniques (+ 30 % de chiffre daffaires) : directrice de l’office de tourisme du Lioran, Sandrine Mourlon résume ainsi la saison estivale dopée par l’effet Covid, mais aussi par des conditions météo très favorables sur les sommets cantaliens.
Au premier rang des sollicitations : l’indétrônable randonnée, “mais on a vraiment senti un engouement pour toutes les activités de pleine nature : le VTT, le trail,... on a eu beaucoup de demandes pour de l’itinérance : pour le GR400 et la GTMC, la Grande traversée du Massif central”, précise la directrice qui note une évolution dans le profil de la clientèle : “Autant nous avions un public familial et des seniors actifs, autant cet été on a vu des jeunes couples, trentenaires, quadras.”
En attendant le Tour
“Les gens sont venus se mettre au vert avec la rando comme mot d’ordre”, abonde Sylvie Ganry, directrice de l’office de tourisme du pays de Salers, OT dont les activités et visites connaissent un succès inédit. Les craintes sur l’attractivité des sites fermés ont vite été levées avec, par exemple, un nombre de visiteurs doublé cet été à la Maison de la salers. “Après l’angoisse du printemps, l’optimisme est revenu. Ce n’est pas la catastrophe qu’on redoutait, au contraire, mais ça laissera des traces dans le fonctionnement de certains établissements et on s’interroge maintenant sur l’automne avec d’ordinaire une fréquentation essentiellement de proximité, des excursions de seniors”, conclut Sylvie Ganry.
Chacun espère ainsi que l’automne s’improvisera été indien, permettant à l’activité touristique de jouer les prolongations en misant sur plusieurs évènements phare dont l’arrivée du Tour de France au Puy Mary le 11 septembre, mais aussi le Volcan’X (triathlon) au départ du lac des Graves, la Dériv’chaînes... “On commence à avoir des appels de camping-caristes pour l’étape du Tour, indique Sylvie Ganry. Du côté des hébergements, certains ont reporté leur réservation prévue pour juillet en septembre...”
Marketing territorial :capitaliser sur cette aura touristique
“La Piste Verte en pays Gentiane, c’est une progression de 100 %, ce qui a amené la com com à recruter une agent supplémentaire, le Gentiane Express (train touristique, NDLR), c’est + 18 % ; à Vieillevie, à la base de canoë, ça a explosé également, avec 7 800 clients contre 3 000 l’an dernier à même époque ; à Chaudes-Aigues, le chef Serge Vieira a doublé sa clientèle”, liste Bruno Faure, président du Conseil départemental, qui se félicite “d’un été exceptionnel après le zéro pointé du printemps. Ce n’était pas gagné”.
Propulsé malgré lui sur le devant de la scène médiatique pour son faible nombre de cas de Covid, le Cantal a ainsi bénéficié d’une aura sanitaire qui a attiré les touristes.
“Nos efforts paient”
“Une côté rassurant, sécurisant qui a certainement joué mais on voit aussi les retombées des efforts qu’on fait depuis dix ans, ça me conforte dans toute la démarche de marketing territorial qu’on mène.” Pas question pour autant de s’enflammer: “L’année touristique 2020 ne restera pas globalement dans les annales et les questions se posent maintenant sur l’automne avec les incertitudes au niveau sanitaire.”
Et de l’avis de tous, il s’agit bien maintenant de transformer l’essai : “Il ne faut pas que cette nouvelle clientèle reparte du Cantal en se disant : c’est beau, mais c’est calme. J’espère que les gens feront la relation entre l’absence d’animations et le contexte Covid”, confie Bruno Faure. Battre le fer tant qu’il est chaud, martèle lui aussi Philippe Fabre, président de Cantal Destination : “Dès septembre, il faut que Cantal Destination et Auvergne Destination Volcans travaillent pour capitaliser sur cette opportunité.”