« Equité, transparence, unité, je m'inscris dans cette continuité »
Jérôme Aubert, éleveur laitier dans le Puy-de-Dôme, reprend la présidence de la section régionale de Sodiaal.
Jérôme Aubert succède à Laurent Duplomb à la présidence de la section Nord-Massif Central de Sodiaal. Producteur laitier à Chanat-la-Mouteyre dans le Puy-de-Dôme, l’éleveur de 42 ans a à cœur de rapprocher la coopérative de ses producteurs.
Quelle priorité donnez-vous à votre nouvelle fonction ?
La multiplication des outils rend parfois complexe la compréhension de l’utilisation, la transformation et la valorisation de notre lait. Sodiaal est une coopérative d’envergure nationale. Certains producteurs, comme moi, ont le sentiment d’être éloignés de leur outil. C’est là tout le travail des élus : être au plus proche de leurs attentes, les rencontrer régulièrement sur des sujets techniques et des projets d’avenir. Il est indispensable de redonner se sentiment d’appartenance aux producteurs. Le modèle même de Sodiaal repose sur cet ancrage territorial. La coopérative est un modèle réellement pertinent, différent qui est équitable, transparent et unitaire. Ce ne sont pas de vains mots. C’est une réalité et une continuité dans laquelle je m’inscris.
La filière laitière traverse une crise d’une rare ampleur. Quelles sont les orientations de Sodiaal pour y faire face ?
La filière laitière connaît surtout une décroissance de la consommation de lait (environ moins 3 à 4% par an). Aujourd’hui, l’éducation alimentaire des jeunes enfants réduit de plus en plus tôt les quantités. Il y a aussi un fort discours anti-lait, antitout. C’est un ensemble d’éléments. Derrière cette déconsommation se cache des segments spécifiques. Les marchés du lait Bio, vitaminé ou délactosé ne se sont jamais aussi bien portés. A nous donc de nous positionner sur ces marchés. Le projet de Sodiaal est de redynamiser la consommation. Les conclusions des États Généraux de l’Alimentation nous offrent une fenêtre de tir. Elles vont nous permettre de rétablir des lignes de négociations avec les distributeurs. Nous devons saisir cette chance et aller chercher la valorisation pour notre lait.
Comment la coopérative va-t-elle s’y prendre ?
Elle travaille sur deux projets d’envergures. Le premier, «Value», donne à Sodiaal l’ambition de résultats d’ici 2025. Le constat est qu’aujourd’hui, nous ne sommes pas à la hauteur de nos grands concurrents en termes de rentabilité. Nous devons donc progresser et aller chercher de la valeur sur des marchés bien établis (fromage, lait infantile en poudre). L’objectif de ce projet complexe est de ratisser plusieurs maillons de la chaîne et de trouver des pistes d’amélioration.
Le second projet « Label Blanc » est en cours d’application chez les producteurs pour mieux rémunérer nos producteurs. Les volontaires s’investissent dans un nouveau cahier des charges qui repose sur quatre piliers : pâturage obligatoire, une alimentation sans OGM, un juste retour aux producteurs (prime 15€/ 1 000 litres) et le bien-être animal. Ce lait de consommation a vocation à intégrer le marché des laits de marques. Nous répondons ainsi à la fois à une demande des producteurs et de la société.
La récente actualité laitière (Lactalis, Cash Investigation) met encore à mal la filière. En tant que président, que pouvez-vous nous en dire ?
La crise chez Lactalis est très grave. Notre coopérative doit s’en inspirer pour être encore plus vigilante sur la qualité et la traçabilité de ses produits.
Quant au reportage de Cash Investigation sur la répartition de la valeur aux producteurs, il y a eu clairement une scénarisation de l’information. Notre coopérative a toujours été transparente sur ses comptes. Un souci de vérité que nous avons appliqué pour ce reportage et qui a été utilisé à nos dépends. Il faut faire la part des choses. Nous devons être fiers de notre travail ! Il y a des crises, difficiles, à passer mais nous relevons toujours la tête. Aujourd’hui, Sodiaal est un acteur économique important sur la région Nord-Massif central. Avec ses 11 sites, la coopérative crée environ 2 000 emplois et de la valeur sur son territoire. Nous devons en être fiers et poursuivre nos efforts. Les projets d’aujourd’hui assurent l’avenir et la continuité pour, à terme, donner un retour à la hauteur du travail de nos sociétaires.
Sodiaal répond à “Cash Investigation”
La participation de Sodiaal à l’émission Cash Investigation du 16 janvier consacrée aux produits laitiers, a joué en la défaveur de la coopérative. Cette dernière répond aux journalistes de l’émission et rassure ses producteurs coopérateurs dans un communiqué où elle rappelle notamment sa détermination « à défendre la coopérative et donc chacun de ses producteurs ». Ainsi, précisant qu’elle n’a rien à cacher, ladite publication revient notamment sur les montants distribués aux producteurs laitiers : « au vu du niveau exceptionnel de la crise laitière, Sodiaal a redistribué en 2017 un montant équivalent à 106 % du résultat 2016 à ses producteurs/adhérents, soit 25 millions d’euros, et non 3,5 millions comme prétendu dans l’émission. »
Quant à sa filiale Liberté Marque basée au Luxembourg, Sodiaal explique : « Liberté est une marque de yaourts vendus principalement au Canada par Yoplait. Sodiaal en détient
50 %. L’entreprise Liberté Marque perçoit les redevances sur les ventes de yaourts Liberté et les redistribue ensuite à parts égales aux deux propriétaires de la marque. […] Elle est domiciliée au Luxembourg en toute légalité. L’intégralité de la quote-part due à Sodiaal au titre des ventes de yaourts Liberté est reversée en France, montant qui contribue positivement au résultat de la coopérative, et donc au revenu des producteurs. »
Enfin, au sujet de la mécanique des prix A et B, la coopérative reprécise les chiffres : « Depuis sa création, le prix B a ainsi oscillé entre 195 et 405 €/1 000 litres. Toutefois, afin de limiter la prise de risque pour le producteur, une exploitation laitière Sodiaal ne peut avoir plus de 30 % de sa production en volume B. En 2016, plus de 91% du lait collecté par Sodiaal a été rémunéré au prix A. »