DISTINCTION. Michèle Chezalviel, une vie au service de l'agriculture
Femme engagée au service des autres et de son métier, ancienne présidente de la Chambre d'agriculture de Corrèze et ancienne vice-présidente de la FNSEA, Michèle Chezalviel est faite Commandeur de la Légion d'honneur.
C'est le Général de Division, Gérard Leroy, Commandeur de la Légion d'honneur, qui remit à Michèle Chezalviel la Croix de Commandeur de la Légion d'Honneur, le mercredi 17 août dernier, dans le salon de l'immeuble consulaire au Puy Pinçon à Tulle.
Les grades de chevalier et d'officier de la Légion d'honneur ont été remis en 1986 et en 1989 à Michel Chezalviel, par Jacques Chirac lui-même à l'Elysée, et c'est donc avec émotion que le Général Leroy officie à son tour en Corrèze : « J'ai été particulièrement honoré de remettre cette distinction à cette femme d'exception. C'est vraiment une combattante que nous honorons » livre t-il comme impression. Gérard Leroy ajoutera lors de son discours, que Michèle Chezalviel est la première femme agricultrice à obtenir cette distinction, et première femme corrézienne également ce qui honore par la même occasion et l'agriculture et la Corrèze.
Un début de carrière très prometteur, au service des agriculteurs
C'est à Corrèze, petit village au centre du département de la Corrèze que Michèle Chezalviel, fille et petite-fille d'agriculteur, s'installe comme agricultrice après avoir obtenu un brevet d'apprentissage agricole, en reprenant en 1956 avec son mari Jean, la ferme de ses parents. Elle exploitera un élevage de limousines et un atelier porcin. Elle rejoint les jeunesses agricoles catholiques, puis l'équipe du canton des Jeunes Agriculteurs dont elle prend la tête après son mari Jean, qui l'avait lancé et qui se met en retrait. Elle sera présente au niveau du département : « à mon grand étonnement j'ai été élue vice-présidente départementale » nous confie-t-elle, mais elle refuse de monter au niveau national, désirant s'occuper de ses enfants.
Des responsabilités de plus en plus importantes
Le président de la FNSEA lui demande alors de mettre en place la Commission des agricultrices qui eut beaucoup de succès dès 1967, alors que le besoin existait, une centaine de femmes étaient présentes à la première réunion. Michel Debatisse, président de la FNSEA depuis 1971 vient directement chez elle pour lui proposer de monter à Paris pour oeuvrer au sein de la Fédération Nationale. En 1975, elle est élue au conseil d'administration. « En 1976 j'ai obtenu un rendez-vous avez Jacques Chirac, alors président du Conseil Général, pour parler de la place des femmes dans l'agriculture, qui n'étaient pas considérées : il était d'accord avec moi. Nous avons obtenu beaucoup de choses, notamment la reconnaissance au sein de la MSA, au niveau des retraites aussi. Puis, non seulement notre nom apparaissait sur les chèques à côté de celui du mari, mais nous pouvions récupérer le bail de l'exploitation après un éventuel décès du mari, ce qui n'était pas le cas auparavant » nous indique Michèle Chezalviel. Ensuite, c'est le congé maternité qui est mis en place pour les agricultrices, et les crédits à la formation entre autres choses, ce qui a déclenché de belles avancées pour les femmes : c'était historique.
« Puis en 1977, le président de la FDSEA19 est parti en Haute-Vienne, et mes amis m'ont demandé de prendre la présidence, ce que j'ai fait : il y avait beaucoup de travail à faire » ajoute-elle. C'est ainsi qu'elle rebâtit en parcourant les routes de la Corrèze, les « centres cantonaux » pour relancer le développement de la fédération. C'est tout naturellement qu'elle est élue vice-présidente de la FNSEA en 1979 - jusqu'en mars 1993. « Il faut un syndicalisme fort pour tenir les hommes et les femmes » déclare-t-elle, et c'est ce que confirme Pascal Coste, président du département de la Corrèze, qui insiste sur son amitié et son admiration : « Sans patron c'est le bordel, et là, avec Michèle Chezalviel, nous avions une patronne. C'est juste, que la Corrèze puisse te rendre hommage avec force, on est fiers nous corréziens, d'avoir une femme de ta trempe qui a marqué l'histoire de notre pays ».
Une force pour la Corrèze
Sa lutte syndicale n'est pas le seul fait de la carrière de Michèle Chezalviel, puisqu'en 1983, elle est élue, après avoir encore (!) sillonné les routes du département, animé de nombreuses réunions, présidente de la Chambre d'agriculture.
Et elle marquera sa présidence, avec la création des Marchés de Producteurs de Pays, et le réseau « Bienvenue à la ferme », qui existent toujours 30 ans après leur mise en place et qui font le bonheur du public et des agriculteurs engagés dans les dispositifs. Elle fera bâtir l'immeuble consulaire du Puy Pinçon à Tulle, ainsi que ceux de Brive et d'Ussel. Une belle réussite qui porte encore aujourd'hui sa marque, « tu es chez toi ici » plaisante Tony Cornelissen, président de la Chambre d'agriculture de la Corrèze, qui ajoute à l'intention de Michèle Chezalviel : « Cette médaille qui t'est remise aujourd'hui, c'est un symbole, très très fort, par l'impulsion syndicale que tu as su générer pour l'agriculture. Tu as tenu à avoir la proximité avec les agriculteurs, tu as fait presque tous les comices, toutes les réunions cantonales, tous les festivals, et ça, ça a marqué les esprits ». Le général Leroy précise : « Michèle, vous avez les 3 qualités morales du responsable : le courage d'accepter des responsabilités, le souci du bien commun, la simplicité, qualités déjà décrites par la presse dès 1978 », ce qui souligne les propos de Tony Cornelissen qui précise : « Il s'agit d'une femme très sensible, avec un coeur en or, mais une main d'acier ».
Pionnière, Michèle Chezalviel l'a été, pionnière elle l'est toujours en devenant première femme agricultrice à obtenir cette honorable distinction qu'est la croix de Commandeur de la Légion d'honneur. C'est avec volonté, simplicité et goût du service qu'elle a consacré sa carrière au combat pour les autres, pour sa grande famille qu'est l'agriculture française. Elle s'est battue pour les femmes, pour l'agriculture, et ce fut l'oeuvre de sa vie.
Véronique Legras