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CORVIDES. La corneille noire, de la nuisance au prélèvement

Les nuisances liées au sanglier sont bien connues. Cependant, les corvidés, et la corneille noire en particulier sont de véritables désastres lorsque ces oiseaux s'attaquent aux semis à peine levés, et aux oeufs, des canards par exemple.

Communément appelée « Corbeau », en réalité, c'est la corneille noire qui est généralement responsable des dégâts causés sur les cultures. Il existe d'autres espèces, peu visibles, comme le grand corbeau, dont le prélèvement est interdit, puisque c'est une espèce protégée depuis 2009, même s'il va jusqu'à s'attaquer aux agneaux par exemple. Bien connu aussi, surtout dans l'Allier, le Puy de Dôme et la Creuse, le corbeau freux qui cause les mêmes dégâts que les corneilles noires. Le choucas des tours quant à lui, vit principalement dans les falaises, les ruines, les clochers d'églises, et même s'il ravage lui aussi les cultures, et pose des problèmes aux constructions des villages, il est également protégé, et aucun système de prélèvement ne peut être mis en oeuvre les concernant.

La corneille noire, principale accusée
La corneille noire, entièrement noire, au bec noir et droit dans le prolongement de l'oeil, vit dans les arbres qui n'ont pas de houppier trop touffu, dans les bosquets et les petits bois, elle est sédentaire et territoriale. Elle vit environ 70 ans (oui, c'est énorme !), et son couple dure toute sa vie.

La corneille noire, s'attaque aux cultures, attend que les semis germent, et lorsque la plante sort de terre, c'est à ce moment là qu'elle se nourrit des graines germées. De plus, ce corvidé s'attaque aux oeufs des autres espèces, y compris des canards ou encore les oeufs de bassecour, et peut se retourner aussi contre les lapins, les poussins, également sur les cadavres trouvés sur les bords de routes, comme les hérissons écrasés. Elles peuvent aller jusqu'à percer les silos...

Les chasseurs sont particulièrement sollicités au moment des semis, surtout du maïs, et il n'est pas rare que l'exploitant soit obligé de re-semer 2 ou 3 fois avec les coûts que cela implique. Aucune indemnisation n'est prévue dans ces cas, puisqu'elles sont réservées aux dégâts du grand gibier.

Corneille noire : gibier ou nuisible ?
La corneille noire fait partie du gibier, en ce sens, elle peut être chassée tout à fait normalement pendant la période de chasse. Mais elle est aussi classée nuisible... Heu non. Ne dites plus nuisible, le mot étant remplacé par un terme beaucoup plus simple : « Espèce Susceptible d'Occasionner des Dommages - ESOD » ce qui permet de la chasser en dehors de la période de chasse. Pour ce dernier classement, valable jusqu'au 30 juin 2023, une commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, se réunira dans quelques jours en Corrèze pour décider de ce classement pour la période 2023-2026, et sera composée de la DDT, de la Chambre d'agriculture, du lieutenant de louveterie, de l'OF B, et des associations de protection de la nature comme Corrèze Environnement par exemple.

Cette commission se base sur les retours faits à la fédération de chasse concernant les dégâts constatés par les agriculteurs. Cette remontée d'information est cruciale pour les agriculteurs, car si ces derniers ne voient pas le résultat immédiat, c'est avec les commissions que les choses deviennent tangibles pour que les chasseurs puissent prendre place sur les parcelles pour piéger ou tirer selon les circonstances en dehors de la saison de chasse.

Des fiches de déclaration de dommages sont disponibles auprès des sociétés de chasse pour être transmises par la suite à la fédération pour traitement. Certes, beaucoup trop d'exploitants ne font pas remonter l'information, qui ne déclenche pas d'indemnisation de toute façon, mais celle-ci est importante pour peser dans le processus de décision, et ainsi déclencher le classement ESOD.

Les moyens de prélèvement
Pendant la période de chasse, la corneille noire étant classée gibier, elle peut être chassée sans autre autorisation nécessaire sauf le permis de chasse bien sûr. Un simple fusil avec des cartouches à plombs de premier prix (style ball-trap) sont suffisants. Les oiseaux morts sont par la suite enterrés, et les oiseaux seulement blessés doivent être détruits, sinon, ils préviennent leurs congénères par leur cri, du danger présent, et l'affut ne sert plus à rien.

Mais les chasseurs sont assez peu sollicités sur cette problématique pendant la saison de chasse, puisque les semis se font en général en dehors de cette période. Toute l'année, on peut la piéger, en étant piégeur agréé par suite d'une formation obligatoire de 16 heures, dispensée par les fédérations, qui donne un numéro d'agrément. Ces pièges nécessitent des appelants, c'est-à-dire des corneilles noires vivantes, qui ne sont pas toujours simples à obtenir. En effet ces oiseaux sont en général fournis par les chasseurs eux-mêmes, en fonction de leur prélèvement, au sein d'un réseau de piégeurs. Ces pièges sont de grandes cages, jusqu'à 2,5 m de haut en forme d'entonnoirs, disposées près des parcelles endommagées, dans lesquelles l'oiseau appelant est installé. Les corneilles attirées par l'appelant rentrent dans la cage mais ne peuvent plus en sortir. Assez étonnamment, si les oiseaux blessés préviennent les autres du danger, les oiseaux piégés, eux, ne préviennent pas leurs congénères. Ce piège nécessite d'être relevés tous les jours à midi, c'est une obligation légale, ce qui demande un minimum de disponibilité.

Comme cette espèce est classée nuisible, enfin... ESOD, il est possible de continuer à la détruire à tir au dehors de la période de chasse. « Ce n'est plus de la chasse, c'est de la destruction à tir, c'est exactement la même chose, il faut aussi un permis de chasse, puisqu'une arme à feu est nécessaire, mais c'est le terme qui change » précise David Murat, directeur de la fédération de chasse de la Corrèze. Du 1er au 31 mars, il est possible de tirer tous les jours de la semaine pour protéger les semis, sans avoir besoin d'autorisation particulière, sauf celle du propriétaire du terrain sur lequel le chasseur est en affût.

Deux autres périodes avec une autorisation individuelle de la DDT, remise après justification de dégât réels ou potentiels sont possiblement ouvertes : du 1er avril au 10 juin, puis du 11 juin au 31 juillet. Le reste du temps, seul le piégeage est possible.

Le matériel pour prélever
Un peu de matériel, peu cher est conseillé : si les cartouches ne sont pas chères, il faut notamment pour se cacher se munir d'une tenue de camouflage. La corneille étant très intelligente, elle repère facilement le chasseur car elle discerne également les visages, les mains, mais aussi les couleurs, contrairement au gibier, ce qui implique de ne pas utiliser les tenues fluorescentes habituelles. Il faut utiliser, pour attirer les corneilles, ce que l'on appelle des « formes » qui sont des oiseaux en plastique à disposer sur la parcelle, ou encore des tourniquets, interdits pour la chasse à la palombe mais autorisés pour chasser la corneille.

C'est une chasse facile, qui se pratique lorsque le temps revient au beau, il faut peu de matériel, des cartouches pas chères, c'est accessible au débutant puisque l'activité permet de s'entraîner au tir, en plus d'aider les agriculteurs. Les relations entre chasseurs et agriculteurs sont, sur ce point des corvidés, pacifiés, même si les fédérations peuvent regretter le manque de volontaires parmi les exploitants pour passer un permis de chasse.

Véronique Legras

Interview : David Murat, directeur de la fédération de chasse de la Corrèze :

Comment un agriculteur peut-il obtenir un permis de chasser ?
D.M : « Dans le département, un permis de chasse nécessite une formation, prise en charge par la fédération. L'examen est divisé en deux parties, une pratique (préparée par la fédération) et théorique que le postulant doit préparer par lui-même avec un livre et/ou un DVD. Sur simple demande, un dossier est envoyé par la fédération que le requérant doit retourner complété. Avec la chambre d'agriculture, des stages sont payés aux agriculteurs pour obtenir le permis de chasse en association avec la fédération de chasse de la Corrèze. Il faudrait que ce partenariat attire plus de monde.»

Est-ce cher ? Quelles sont les modalités ?
D.M : « L'inscription pour le permis de chasser est de 46EUR pour un majeur, 31EUR pour un mineur. La formation est d'une journée obligatoire, à Champagnac la Noaille en Corrèze avec un technicien qui met en exergue la sécurité, et les manipulations de l'arme. Un technicien de l'OFB vient faire passer l'épreuve pratique. Ensuite, s'il n'y a pas de faute éliminatoire, le candidat passe à la partie théorique

Est-ce un fusil ou une carabine qui est nécessaire pour le corvidé ?
D.M : « La carabine est faite pour chasser le grand gibier. Pour les corvidés, c'est le fusil qui est utilisé comme pour tout le petit gibier, comme le lièvre par exemple. »

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