Classe flexible : pourquoi cette méthode séduit au lycée Pompidou d'Aurillac ?
Apprendre à son rythme en bénéficiant de la collaboration de ses camarades sous la forme d’ateliers et dans la position de son choix : la méthode flexible est déclinée au lycée agricole Pompidou d'Aurillac.
Apprendre à son rythme en bénéficiant de la collaboration de ses camarades sous la forme d’ateliers et dans la position de son choix : la méthode flexible est déclinée au lycée agricole Pompidou d'Aurillac.
La liberté dans le cadre, c’est le principe fondateur de la pédagogie flexible qu’applique depuis trois ans déjà Magali Rambert-Bugeia, professeur de français et anglais au lycée Pompidou d’Aurillac https://www.gpompidouenilv.fr/ auprès de ses élèves de Bac pro et BTS, soit une centaine de lycéens et étudiants. Ce matin-là, sa classe de Bac pro CGEA renoue avec la méthode qu’ils ont expérimentée en seconde. Au programme de la première heure de la journée, pas de cours magistral devant le tableau. La séance commence par un rappel des objectifs, outils et instructions : au terme de plusieurs séquences, les lycéens devront réaliser une visite guidée orale en anglais d’une exploitation agricole avec pour support un plan de masse. Pour se faire, ils vont d’abord réviser leur vocabulaire à l’aide d’ateliers de dix minutes, dotés de “flash cards” et de planches de drapeaux(1). Des outils très interactifs et autocorrectifs mis au point par l’enseignante et que les élèves vont exploiter au choix en duo, par groupe de quatre, ou en solo. Entre les ateliers, ils vont aussi s’atteler à l’esquisse du plan de leur exploitation de référence sur une feuille de papier ou sur l’une des tables-tableaux équipant la classe flexible. Autonomie et collaboration Chaque atelier sera vérifié et validé par Magali Rambert-Bugeia, en apposant son tampon sur la fiche de suivi de chaque élève. Si nécessaire, les acquis du jour seront à renforcer lors du prochain cours en revenant sur le même atelier. “Sur les tâches plus complexes, on vérifie avec eux s’il y a des erreurs, si oui lesquelles et on leur explique si besoin la correction.”
“L’idée de la pédagogie flexible, c’est d’amener chaque élève le plus loin possible en respectant le rythme et les besoins de chacun et en ayant recours à une donnée fondamentale : la coopération”, explique la professeur. Il s’agit ainsi de développer l’autonomie de l’élève en lui “apprenant à apprendre”, et en individualisant au maximum ces apprentissages. Un point essentiel notamment pour les jeunes à besoins éducatifs particuliers. “Ça sert aussi à leur redonner confiance en eux”, relève Magali Rambert-Bugeia, dont la posture et la relation aux élèves sont désormais toutes autres. “J’ai un rôle de tuteur, l’enseignant n’est plus le seul à détenir le savoir et le contenu du cours est dans le matériel”, expose-t-elle. Cette approche suppose certes un travail préparatoire conséquent mais allège l’énergie déployée en classe. Pour autant, en anglais comme en français, les cours magistraux classiques ne sont pas exclus, mais ne durent jamais plus de 20 minutes. Et les interrogations écrites comme orales ne sont pas non plus bannies ni les recadrages d’ailleurs.
Flexibilité et mobilité
Mais ce qui surprend le plus en suivant ce cours encore atypique, c’est de voir les élèves s’installer, selon l’envie et l’humeur du moment, sur un médecine-ball, un pouf, un tabouret mobile, ou encore sur un transat de sol. Hérésie laxiste ? Aucunement : le concept de salle flexible, équipée d’assises basses, hautes, mobiles, de tables-tableaux et tableaux en libre service, a fait ses preuves. “Cela permet de libérer l’énergie des adolescents, qui ont du mal à cet âge-là à rester coincés sur une chaise. Ça améliore la concentration et entre toujours dans cette idée de choix”, appuie leur professeur. Assis par terre pour revoir le vocabulaire lié aux bovins, Rémi et Robinson le confirment : “Le fait de bouger entre deux ateliers ça nous permet de mieux nous concentrer, on le voit par rapport à d’autres matières en salle classique où on décroche au bout de dix minutes. Et puis on a pris l’habitude de faire des activités, on progresse mieux...” Surpris et déstabilisé par cette nouvelle liberté à l’arrivée en seconde, Léo, 16 ans, n’a pas tout de suite perçu les bénéfices de la méthode. “Et puis au fil du temps, je me suis aperçu que ça me permettait d’apprendre plus facilement, notamment en écrivant sur la table-tableau.”
"Quand l’élève s’engage, ça marche.”
Apprendre en faisant mais aussi en bougeant : les neurosciences ont démontré que le fait de se déplacer active des zones du cerveau impliquées dans l’apprentissage, explique Magali Rambert-Bugeia qui apprécie de voir également le comportement des élèves évoluer : avec davantage de motivation, d’autogestion et d’autorégulation entre eux. “À l’adolescence, cette part de liberté donnée dans un cadre est très importante, ils vont moins chercher les limites, mais c’est un travail de confiance de longue haleine”, sourit la dynamique enseignante. Quid des résultats scolaires ? Ils sont aussi au rendez-vous, comme en attestent ceux, excellents, des 1re STAV en juin dernier au bac de français. Mais Magali Rambert-Bugeia prévient : la classe flexible n’a rien de magique, elle offre des moyens différents : “Quand l’élève s’engage, ça marche.”
(1) Flash cards : cartes avec côté face le mot en anglais, au verso en français. Planches de drapeaux : planche quadrillée de photos, les élèves accrochent le drapeau avec le nom anglais correspondant à chaque cliché.
Lire aussi https://www.ac-reims.fr/une-classe-flexible-pour-faire-cours-autrement-124849
Que dit la recherche ?
Une étude menée par la Clinique Mayo à Rochester (Minnesota) auprès de 300 élèves pendant toute une année scolaire, a montré que le fait de pouvoir bouger pendant la classe et d’utiliser une variété de postures augmente de 12 % la capacité d’attention des jeunes. Celle réalisée par l’université de Salford au Royaume-Uni démontre une corrélation entre l’agencement des salles de classe et le niveau d’apprentissage des élèves avec un rendement des élèves supérieur de 25 %. D’autres travaux ont attesté des bénéfices pour la santé des élèves.