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Installation
Ces installés qui vendent en circuits courts

En agriculture, la vente en circuit court intéresse de nombreux porteurs de projet, ainsi qu'une part grandissante de français, solidaires des agriculteurs à la suite de leur récente mobilisation. Comment bien l'intégrer dans sa stratégie commerciale ?

Une éleveuse présente ses fromage dans une chèvrerie
© Manon Roche

« Nous recevons de plus en plus de porteurs de projets souhaitant se lancer dans la vente directe » rapporte Fabienne Puel, responsable installation à la Chambre d'agriculture du Puy-de-Dôme. Marchés, vente à la ferme, Amap, épiceries... Les débouchés de vente en circuit-court sont nombreux, et permettent aux agriculteurs de palier le « manque de structuration dans certaines filières », et de « capter l'intégralité de la valeur ajoutée des produits, en supprimant les intermédiaires ». Mais attention, car si certains y voient le moyen d'obtenir un meilleur revenu, « ce n'est pas automatiquement le cas » alerte la conseillère. « Il faut avoir conscience de ce que cela implique, en termes de charge et d'organisation du travail, d'offre et de demande, de sécurité financière... », autant de points qui ne s'improvisent pas. 

« Notre rôle est d'aider les futurs installés et les agriculteurs qui souhaitent diversifier leurs débouchés à bien penser leur stratégie commerciale afin de pérenniser leur activité. »

Fabienne Puel, CDA 63.

Bien préparer son projet

La règle d'or, « c'est de calculer et d'anticiper : réfléchir à ce qu'on veut vendre en termes de qualité et de quantité, définir les prix de vente, les coûts de revient et identifier les circuits de commercialisation. Il ne faut pas attendre d'avoir ses produits avant de déterminer ses circuits de commercialisation, d'autant que beaucoup sont périssables et ne peuvent pas attendre pour être vendus ». Ce temps de préparation est également le moment de créer ou d'enrichir son réseau de contacts commerciaux, qui, un jour où l'autre pourrait s'avérer utile, car « les projets ne se passent pas toujours comme prévu ».

Coupler vente en direct  et en laiterie

« Il est possible de s'en sortir uniquement avec de la vente en circuit-court » affirme la conseillère, « en particulier dans les secteurs d'activité moins concurrentiels » (maraîchage, petits fruits, arboriculture ou encore viticulture). Mais la pratique peut amener certains producteurs à revoir leur fonctionnement. Cela a été le cas pour Manon Roche, éleveuse de chèvres installée à Aubiat (63) depuis 2022. « J'ai commencé avec 50 chèvres. Je transformais la totalité de mon lait en fromages que je vendais sur trois marchés hebdomadaires et dans quelques épiceries. » Pour elle, la vente en direct est l'occasion d'échanger avec les consommateurs sur les produits et réalités du métier d'agriculteur. Couplés aux activités d'élevage, de transformation et d'accueil à la ferme, les aller-retours entre l'exploitation, les marchés et les points de vente ne laissent pas beaucoup de temps à la jeune femme pour profiter de son conjoint et ses enfants.

« La charge de travail était trop grande, en particulier durant les pics de lactation où je ne parvenais pas toujours à écouler mes stocks. »

Manon Roche, éleveuse caprine et fromagère.

Pour éviter les pertes et optimiser son temps de travail, l'éleveuse ajuste sa stratégie. « Aujourd'hui je suis passée à 100 chèvres, j'ai réduit le nombre de marchés à 2 par mois, élargi mes points de ventes à quelques supermarchés et vends environ deux tiers de mon lait à une laiterie. » Par ailleurs, « j'ai défini moi-même mes jours de livraison, au lieu de m'adapter aux disponibilités des revendeurs, afin de réaliser mes tournées par secteur. » Concernant les visites de ferme, « je les réalise désormais uniquement sur réservation, pour éviter de perdre du temps les jours où la charge de travail est déjà trop grande ». Une réorganisation qui lui permet à la fois de mieux égrainer les tâches à réaliser dans la semaine, se libérer du temps les week-ends, et sécuriser une partie de ses revenus grâce au prix lissé pratiqué par la laiterie. Le tout en gardant son activité de transformation et le contact qu'elle apprécie tant entretenir avec ses clients.

À lire aussi : La nouvelle génération d'agriculteurs a-t-elle les épaules pour reprendre le flambeau ?

La force du collectif

Au Gaec Dou Chonlai, les quatre associés mettent un point d'honneur à vendre leurs produits bio exclusivement en circuits courts. Installés à Moissat (63) depuis 2019 sur l'exploitation dans le cadre d'une transmission, les agriculteurs cultivent principalement des céréales à partir desquels ils produisent pains, farines et biscuits, majoritairement vendus à la ferme, et sur trois marchés situés à moins de 15 km de l'exploitation. « Nous vendons également une petite partie de nos produits en magasins type biocoop, ainsi qu'à quelques boulangers et collectivités (Ehpad, écoles...) » précise Damien Fombelle en charge de la vente directe, arrivé en 2022 au sein de l'équipe. La vente en circuits courts fait partie intégrante du schéma vertueux dans lequel la ferme souhaite ancrer l'ensemble de ses activités, et représente selon elle la seule solution viable « économiquement et humainement ». Si le fonctionnement du Gaec est stable, c'est notamment grâce à la bonne répartition des tâches entre les associés, et leurs quatre salariés à temps partiel. « Cela nous évite de nous retrouver en surcharge de travail ». Deux mots-clefs : « polyvalence » et « flexibilité ».

« Chacun d'entre nous est spécialisé dans un domaine, mais nous sommes également capables de nous remplacer mutuellement en cas de pépin ou de départ en vacances »

Damien Fombelle, Gaec Dou Chonlai.

Par ailleurs, « le fait d'investir un minimum et de faire un maximum par nous-même nous permet d’avoir de la trésorerie disponible en cas d’incident ».

Et l'esprit collectif et d'entraide dépasse les frontières de la ferme. « Le soutien interprofessionnel est important car il permet de trouver des solutions en cas de problème, pour écouler des invendus par exemple ». Il permet également de développer des projets sur le territoire, capables de sécuriser les revenus de chacun. « Actuellement, un collectif se monte pour développer l'offre de pains santé auprès des cantines de la région de Clermont-Ferrand. »

Le Gaec Dou Chonlai mise également sur la diversité de ses productions, choisies en fonction des besoins des clients. Il propose notamment à la vente des huiles, légumes et bulbes. « Une culture comme l'ail rose de Billom permet d'alimenter notre clientèle et de nous faire connaître en participant à des évènements tels que la Foire à l'ail par exemple, qui est un temps fort pour nous en termes de vente. » À terme, la ferme compte également élargir sa gamme de farines et gagner en autonomie sur leur transformation avec la création d'un atelier meunerie, pour répondre aux attentes des boulangers souhaitant travailler avec des ingrédients spécifiques et fabriqués localement.

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