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Nuisibles
Campagnols : la recherche avance...  bien moins vite que les pullulations

Les recherches engagées en 2016 révèlent des résultats prometteurs, notamment sur l’immunocontraception, mais ces leviers ne seront pas opérationnels avant un, deux, trois ans...

Le lien entre densité de pissenlits et expansion territoriale des populations de rats taupiers est clairement établi.
Le lien entre densité de pissenlits et expansion territoriale des populations de rats taupiers est clairement établi.
© © UC

C’est tout à la fois une course de vitesse et de fond qui est engagée pour tenter de freiner et d’atténuer - à défaut d’enrayer - les vagues successives d’invasion de campagnols terrestres. Une bataille de longue haleine à laquelle la profession agricole du Massif central est parvenue à rallier la recherche voilà six ans, en obtenant des financements inédits pour des programmes de recherche. Des travaux qui avancent avec des résultats prometteurs mais... au rythme de la recherche qui n’est pas celui des paysans et encore moins des rats taupiers, surtout quand les confinements sont venus perturber les plannings. Le point de ces avancées avec Coralya Vullion, en charge de ce dossier au sein du Sidam(1).


Appâts contraceptifs
Trois programmes sont ainsi menés de front : l’un sur la contraception vaccinale du rongeur, le deuxième sur la communication entre campagnols par la voie des phéromones, le dernier sur leurs préférences alimentaires. Le premier et plus avancé - baptisé Contracamp - est conduit par l’université Clermont-Auvergne. Engagé en 2017, il vise à élaborer un vaccin capable d’engendrer une réponse immunitaire des campagnols terrestres réduisant leur reproduction.
Comment : en induisant la production d’anticorps qui vont aller se fixer sur la tête des spermatozoïdes empêchant ainsi la fécondation. Les expériences réalisées ont permis d’identifier 33 peptides (courtes chaînes d’acides aminés) susceptibles de causer l’apparition de ces anticorps antispermatozoïdes. Des peptides testés un par un avant que les plus intéressants soient sélectionnés et associés au sein d’un cocktail pour en optimiser l’effet auprès de tous les campagnols en s’assurant par ailleurs de la spécificité de ce vaccin et donc de son innocuité vis-à-vis d’autres espèces, explique la chargée de mission du Sidam. Parallèlement, l’équipe de recherche s’est penchée sur les modalités d’administration de ce vaccin potentiel avec deux hypothèses initiales : la voie nasale et la voie orale. La seconde étant aujourd’hui privilégiée via des travaux pour définir le support le plus appétant. “Il s’agit d’éviter que les campagnols ne stockent ces appâts au profit d’une flore plus appétante”, indique Coralya Vullion. Stockage qui entraînerait une dégradation du composé vaccinal (via l’humidité du sol...).
Autre problématique à résoudre : rendre le futur vaccin résistant à la barrière gastrique. Si ce programme est prometteur, ni le Sidam ni l’université de Clermont-Ferrand ne veulent s’avancer sur une échéance de mise à disposition de ce vaccin, qui devra aussi franchir les barrières... administratives.

Odeurs de sirènes...
Le second programme - Phérocamp - s’attelle lui à tester le pouvoir attracteur potentiel de certains composés volatils identifiés chez Arvicola terrestris (notre redouté rat taupier) sur le plan comportemental. Objectif : utiliser ces phéromones qui servent à communiquer entre eux afin de les orienter vers des pièges ou appâts. Dans un premier temps, l’Inrae de Tours et celui de Lille ont identifié 65 composés organiques volatils (COV) et une protéine (Arvicolin) impliqués dans la communication phéromonale du campagnol. Des molécules présentes soit dans leur urine soit dans les glandes olfactives situées sur les flancs de l’animal. L’équipe de Tours a sélectionné et testé une partie de ces COV (disponibles dans le commerce) avant d’étudier leur efficience une fois mélangés. Les chercheurs de Lille viennent pour leur part d’entamer des travaux similaires sur la protéine impliquée, travaux plus longs et complexes car cette protéine doit être produite, filtrée... en laboratoire. Dans une troisième phase, il s’agira d’étudier l’effet combiné des composés volatils et de la protéine.

Fadas de pissenlits
Troisième angle de recherche, les préférences alimentaires de ce glouton des prairies.
Ce programme fait suite à celui qui s’est penché sur les causes du déclin des populations. Déclin qu’aucune maladie n’est venue expliquer. En revanche, il a été établi un lien direct entre densité de pissenlits et développement des pullulations, soit la phase d’expansion territoriale liée à la colonisation par les jeunes. Cette corrélation a été encore récemment confirmée par des images de drone. Dans ce nouveau programme conduit depuis juin 2020, VetAgroSup teste l’attractivité comparée d’autres espèces (trèfle, dactyle...) sur le campagnol. Objectif à terme : pouvoir jouer sur la composition florale prairiale. “Par exemple en semant en bordure de champ du pissenlit pour contenir les campagnols dans ces zones-là lors des phases de croissance. Cela permettrait de concentrer géographiquement la lutte et d’en diminuer le coût”, fait valoir Coralya Vullion. Ou encore identifier des appâts plus appétants consommés préférentiellement par les rongeurs. Les équipes de chercheurs profitent en outre de leurs tests en plein champ et de leurs captures pour mieux appréhender le comportement du campagnol terrestre, définir par exemple à quel moment telle méthode de lutte est la plus efficace... On sait déjà que le rongeur a une reproduction saisonnée liée à la photopériode (alternance jour/nuit) qui s’étend majoritairement de mai à octobre. De plus, à partir d’une densité d’environ 200 campagnols/hectare, 50 % de la population meurt naturellement pendant la mauvaise saison. Enfin, le projet de recherche sur la robotisation de la lutte est toujours en quête de financements afin de réaliser un premier prototype tout terrain capable de se déplacer de manière autonome pour déposer pièges et appâts.

(1) Organisme inter-établissements du réseau des chambres d’agriculture du Massif central engagés sur des programmes comme AP3C (adaptation au changement climatique), coordination des recherches sur les campagnols,...

 

 

Ratron GW : le ministère valide l'augmentation du dosage

La COPAMAC-SIDAM vient d'obtenir une autorisation du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation pour augmenter la dose maximale de Ratron GW applicable dans le cadre de la lutte contre le campagnol terrestre. Jusqu'au 31 août, il est possible d'utiliser 2 fois 2kg d'appâts par hectare et par an. L'application doit être faite en un minimum de deux passages à un intervalle d’au moins trois mois. L’AMM dérogatoire devrait être publié dans les jours à venir.  Une discussion est d'ores et déjà entamée pour demander une prolongation de cette autorisation jusqu'à la fin de l'année 2022 afin que l'ensemble des agriculteurs puisse lutter, indépendamment des conditions météorologiques. 

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