Boeuf aux hormones : signature d'un accord entre l'Union Européenne et les Etats-Unis
Selon les termes de l'accord, les Etats-Unis s'engagent à ne pas imposer de sanctions nouvelles sur des produits agroalimentaires européens (tels que le Roquefort ou le foie gras), en retour l'Union Européenne accorde un droit d'accès préférentiel aux producteurs américains de viande de boeuf de haute qualité (viande sans hormones)pour un volume qui atteindra 45 000 T au début de la quatrième année suivant l'accord.

L’Amérique impose « sa paix », mais une « paix » cependant déséquilibrée. Si les États Unis s’engagent à ne pas frapper de sanctions les produits européens dont le roquefort, ils obtiennent une considérable augmentation des quotas d’exportation de bœuf de qualité vers l’Europe.
Le bœuf aux hormones n’empoisonnera plus les relations entre l’Europe et les États Unis. Selon les termes de l’accord signé entre les deux parties, les Etats-Unis s’engagent à ne pas imposer de sanctions nouvelles sur des produits agroalimentaires européens en représailles au refus de l’Union européenne d’ouvrir ses frontières au bœuf américain élevé aux hormones de croissance.
Ces sanctions décidées dans les derniers instants de l’administration Bush prenaient notamment la forme de droits à l’importation dissuasifs ciblés sur des produits tels que le roquefort français ou les eaux gazeuses italiennes. Après plusieurs reports, elles devaient entrer en vigueur le 8 mai. Finalement, les Etats-Unis vont renoncer à tout renforcement des sanctions. Ils maintiendront celles en vigueur depuis 1998 à un niveau réduit (68 % ou 79 millions de dollars). De surcroît, Washington s’engage à supprimer l’ensemble des sanctions quatre ans après l’accord.
En retour l’Union européenne s’engage à accorder un droit d’accès préférentiel aux éleveurs américains de viande de bœuf de haute qualité à un niveau de 20 000 tonnes pendant trois ans. Puis ce quota atteindra 45 000 t au début de la quatrième année suivant l’accord.
Accès préférentiel
De nouvelles négociations sont prévues dans quatre ans pour le règlement des modalités au-delà de cette période. « C’est un signe clair de notre volonté de surmonter - et lorsque c’est possible de résoudre - nos différends bilatéraux dans nos relations commerciales », ont indiqué le représentant américain au commerce, Ron Kirk, et la commissaire européenne au commerce, Catherine Asthon.
C’est, surtout, un accord plutôt favorable aux Américains. Certes, le triplement prévu des taxes sur le roquefort aurait été pénible à supporter. Mais la quantité concernée représente environ 400 tonnes exportées, soit 2 % de la production de roquefort. Face à cela, la concession faite par les Européens représente un triplement du quota américain de viande bovine (11 500 tonnes actuellement). Les Américains ne se sont même pas engagés à réduire les sanctions actuelles avant un délai de quatre ans.
Pour la FNB, les Américains ont gagné
Très logiquement, la fédération des éleveurs de bovins (FNB) a contesté le 7 mai l’accord intervenu entre l’Europe et les États Unis concernant le différend sur le bœuf aux hormones US. Elle regrette « fermement la logique de cet accord, qui s’inscrit dans la vision OMC de libre-échange sans règles ni régulations ». « Les Américains ont gagné » affirme la FNB. L’accord préserve certes le minimum, selon la fédération : maintien d’un principe de viande bovine sans hormones. « Mais le contingent d’importation qu’il est envisagé de concéder, 45 000 tonnes, multiplierait par cinq le volume actuel ouvert pour le bœuf américain, ce qui déstabiliserait d’autant l’équilibre de marché et la capacité à bien valoriser la production nationale ». Or, l’élevage bovin-viande français est déjà dans une « situation économique dramatique, au plus bas de l’échelle des revenus agricoles en 2008 ». Selon la FNB « la Commission brade une nouvelle fois le secteur bovin-viande et cède aux demandes des USA ». Par ailleurs, le Canada a annoncé le 7 mai qu’il engageait une action devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) contre une loi américaine d’étiquetage imposant la mention du pays d’origine sur la viande vendue aux Etats-Unis, estimant qu’elle pénalise les producteurs canadiens.
Dans le futur
Il apparaît clairement aujourd’hui qu ‘il existe, aux Etats-Unis, une nette tendance, comme en Europe, pour une demande des consommateurs en faveur d’une viande plus « naturelle ». Le besoin de produire « plus sain » gagne donc du terrain outre Atlantique et la pression pour exporter de la viande produite avec des modèles des années 90 a tendance à se relâcher. Mais d’autres facteurs seront à surveiller dans les mois et années à venir. D’une part, le principal volume de viande de bœuf importé des Etats-Unis arrive aux Pays-Bas, plateforme des marchés de consommation du Nord de l’Europe. D’autre part, avec un dollar américain qui a tendance depuis quelques jours à baisser à nouveau, l’accès sera plus facile pour les viandes de boeuf étatsuniennes. Mais parallèlement, les Américains, s’ils possèdent une réelle volonté de pénétrer le marché de l’UE en matière de viande de bœuf, n’ont pas intérêt à faire trop chuter les cours puisqu’ils bénéficieraient par ailleurs d’un accès privilégié au marché intérieur de l’UE.
L’influence des nouvelles exportations américaines sur les prix intérieurs de l’UE sera donc capitale à surveiller. Autre grande inconnue : que se passera-t-il en cas de reprise des négociations commerciales à l’OMC, au point mort actuellement.