Basket, "Demoiselle" éternelle
Il y a 50 ans, l’Europe vibrait aux exploits des basketteuses françaises, les Demoiselles de Clermont. Maire de Marcenat, Colette Ponchet-Passemard est l’une d’entre-elles.
Il y a 50 ans, l’Europe vibrait aux exploits des basketteuses françaises, les Demoiselles de Clermont. Maire de Marcenat, Colette Ponchet-Passemard est l’une d’entre-elles.
![Colette Ponchet Passemard tenant son livre dans la main](https://medias.reussir.fr/pamac/styles/normal_size/azblob/2025-02/colette_passemard_cuc_logo.jpg.webp?itok=mp5nydF6)
Cinquante ans après avoir foulé les terrains de basket du monde entier, l’équipe féminine du Clermont universitaire club (Cuc) reste à jamais la première pour parodier la devise d’un mythique club de football. Les Clermontoises, qui resteront pour l’éternité Les Demoiselles de Clermont avec leur maillot noir, sont les premières pour leur palmarès de onze titres de championnes de France et cinq finales européennes ; les premières à porter haut le sport collectif français depuis les footballeurs du Stade de Reims des années 1950, la première équipe féminine au statut international après les exploits individuels de Christine Caron en natation, des sœurs Gœtschel en ski ou encore de Colette Bresson en athlétisme. Sportives, élégantes, indépendantes, elles incarneront aussi l’émancipation de la femme dans la société des années 1960-1970. Leur jeu fait l’admiration de leurs rivales de l’Est(1). En 1968, après une finale perdue, le Cuc remporte son premier titre de champion de France grâce à l’arrivée de joueuses yougoslaves. Le club clermontois veut désormais jouer la gagne avec la meilleure équipe qu’il soit. S’ouvre alors une décennie de victoires sans partage avec un niveau technique qui la surclasse au point de devoir se confronter aux hommes pour gagner le niveau européen. Les meilleures formations européennes vont en faire les frais : les Italiennes, les Anglaises, les professionnelles des pays de l’Est, Sofia, Prague, Cracovie. Les télévisions suivent les exploits, le public aussi avec 6 000 spectateurs dans la toute nouvelle maison des sports de Clermont-Ferrand. Seule résistera Riga, alors située en Union soviétique avec l’impressionnante Uliana Séménova. Devant ce rideau de fer infranchissable de plus de 2,10 mètres (sa taille exacte reste un mystère), les Clermontoises perdront quatre finales européennes.
Cantalienne d’adoption
Parmi ces championnes, une Cantalienne d’adoption, Colette Ponchet-Passemard, maire de Marcenat depuis 2014. “Ma taille, 1,75 m, me prédestinait à ce sport, précise l’intéressée. J’étais trop grande pour la gym. J’ai fait de l’escrime ce qui m’a servi ensuite pour la vélocité sur les terrains.”Basketteuse à Clichy où elle réside chez ses parents, puis au Paris université club, Colette Ponchet-Passemard est en 1965, à 19 ans, internationale junior. “La conseillère technique nationale habitait ma rue et ne comprenait pas que je ne réponde pas à ses convocations envoyées au club qui ne voulait pas me lâcher. Les choses se sont ensuite arrangées. Au Puc, il m’était interdit de marquer plus de 20 points, une frustration, et dans le même temps, le président de Clermont téléphonait toutes les semaines pour me recruter. Ma mère était réticente à me voir partir. Il ne faut pas oublier qu’à cette époque, la majorité était à 21 ans.” En 1968, Colette Ponchet-Passemard a 23 ans quand elle débarque dans la capitale auvergnate, avec la Marseillaise Irène Guidotti. “Le club et le président de la section basket, le docteur Canque, avaient pour ambition le haut niveau. Nous nous entraînions deux à trois fois par jour malgré nos emplois. Mes revenus étaient assurés par mon travail de comptable par correspondance pour l’entreprise de mon père et dans un cabinet comptable. Cela me sert encore aujourd’hui à la mairie de Marcenat. Les primes de matches couvraient le loyer.”
Les Primes couvraient les loyers"
Dur au mal (nez cassé, entorses multiples), défenseure implacable, sa mission est de “coller” les meilleures adversaires, de les empêcher de marquer. Caractère trempé, l’entraîneur de Montceau-les-Mines en fera les frais. “À l’époque, avec des paniers à seulement deux points, on mesure mieux notre exploit face à Riga et notre défaite de 13 petits points. Les ballons étaient plus gros et les maillots suivaient la taille des filles. Normalement numéro 9, j’héritais régulièrement du 4, le plus petit parce qu’à l’annonce devant le public, l’entraîneuse trouvait que “4, Passemard”, cela sonnait très français.” Joueuse, entraîneuse au Cuc et en équipe de France, conseillère technique, Colette Passemard a consacré une grande part de sa vie au basket. Cela l’a conduite à parcourir le monde entier. Comme pour ses coéquipières de l’époque, cette décennie 1966-1976 au Clermont université club occupe une place à part dans ses souvenirs. “C’est inoubliable : l’ambiance, notre motivation, les voyages parfois épiques comme en avion pour Tel Aviv où nous avons failli tous mourir, et aussi ce que nous représentions à l’époque. Lorsque nous nous rencontrons, tout revient comme si c’était hier.” Sans nostalgie, sans regret ! Benoît parret(1) Nicolas de Virieu a réalisé un très beau documentaire “Les Demoiselles de Clermont", diffusé sur l'Équipe TV.
Avec la complicité de l’écrivaine Dominique Uhlen, Colette Ponchet-Passemard conte le récit de ses vies, de sa vie et de sa passion du basket dans un livre paru en 2024 : “Mes vies et le basket”. “C’est pour des raisons personnelles et poussée par certains membres de ma famille que j’ai rédigé mes souvenirs”, confie l’ancienne ailière du Cuc. Sa grand-mère paternelle est un personnage de roman ; ses parents se rencontrent fortuitement. Il y a Michel, l’amour de sa vie, et Apolline, sa fille... et tous les autres. Il y a des lieux, Clichy, Clermont, Limoges, Besse et enfin Marcenat où l’ancienne internationale accepte de devenir le capitaine d’une équipe pour diriger cette commune du Cézallier. Des vies, une vie et... le basket, avec une place à part pour les Demoiselles de Clermont. Durant dix ans, elles ont cassé la baraque du sport français. Cela ne peut s’oublier. Mais derrière les victoires et surtout cinq défaites sur le toit de l’Europe, en coupe des champions et au pied d’Uliana Séménova, les images de la télé et sur le papier glacé des magazines, les réceptions dans les ministères, il reste l’indéfectible amitié entre les douze joueuses du Cuc. Un fil conducteur pour Colette Ponchet-Passemard que beaucoup de gens croisent sans savoir qu’elle compte 209 sélections en équipe de France, neuf titres de championne de France, vice-championne d’Europe, cinq finales de coupe d’Europe, meilleure joueuse française en 1973, titulaire de nombreuses médailles dont les palmes académiques et l’ordre du mérite.