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Pondeuses bio : valoriser ses céréales dans son aliment de ferme

Éleveurs de bovins et de poules pondeuses bio en Ille-et-Vilaine, Sonia et Jean-Michel Prieur visent l’autonomie ce qui, pour les œufs, passe par leur propre aliment fabriqué sur place.

Sonia Le Prieur. " Nous avons fait le pas vers notre aliment valoriser nos céréales, avoir une meilleure traçabilité, réduire  le coût alimentaire, avoir des résultats plus réguliers avec une ration stable toute l’année et aussi améliorer nos performances. »
Sonia Le Prieur. " Nous avons fait le pas vers notre aliment valoriser nos céréales, avoir une meilleure traçabilité, réduire le coût alimentaire, avoir des résultats plus réguliers avec une ration stable toute l’année et aussi améliorer nos performances. »
© P. Le Douarin

Avec son cheptel de 2 500 poules bio, le Gaec du vent d’ouest consomme en moyenne 300 kg d’aliment par jour et produit 2 000 œufs, vendus par ses soins à une clientèle locale. Proche de Fougères, leur ferme de Vendel (35) vendait aussi de la viande bovine en direct. « Début mars, nous avons échangé nos vaches allaitantes contre des laitières, explique Jean-Michel Prieur, parce que tout compte fait on ne s’y retrouvait pas trop. »

Sur cette structure de taille modeste (72 ha de SAU avec 42 ha de cultures) leur préoccupation est en effet de trouver les meilleures solutions de valorisation économique. « Sur notre secteur, les terres ont la réputation de produire des céréales de qualité, poursuit Jean-Michel. Nous avons donc cherché des débouchés en blé et maïs pour la floconnerie. Et nous sommes progressivement allés vers l’aliment de ferme pour les vaches et les poules. »

Démarche progressive vers l’autonomie

Pour les volailles, ce fut d’abord l’achat d’aliment vrac pour le petit atelier de 350 poules initialement créé. « Mais nous avons vite compris que le « tout manuel » ne nous satisferait pas longtemps », complète Sonia, l’épouse de Jean-Michel.

Ils ont investi dans un poulailler automatisé de 1 000 poules en 2016, agrandi à 2 500 places en 2019. « Lorsque nous avons pu nous équiper de quatre silos de stockage (mais, blé, triticale, seigle) en 2020, nous avons distribué nos céréales sur le lot précédent avec un complémentaire du commerce. »

 

 
Des céréales de la ferme (mais, blé, triticale), du soja bio non OGM et du prémix mélangés à façon tous les 15 jours.
Des céréales de la ferme (mais, blé, triticale), du soja bio non OGM et du prémix mélangés à façon tous les 15 jours. © P. Le Douarin

 

Ils ont fait un pas supplémentaire sur ce lot qui se termine (âge de 65 semaines début mars) en faisant formuler l’aliment par la firme services Agro 01 et l’assembler par un camion de fabrication. « Stéphane Le Floch, le technico-commercial, établit la formule, fournit le prémix en sac et le carbonate de calcium particulaire en big bag. Nous achetons les matières protéiques auprès de courtiers. Quant à la prestation de fabrication réalisée tous les quinze jours (environ 4 t), elle nous coûte de l’ordre de 35 euros la tonne », précise Jean-Michel.

Les avantages d’avoir son propre aliment

Leurs motivations sont de plusieurs ordres : « valoriser nos céréales dans nos œufs, avoir une meilleure traçabilité des composants, réduire le coût de l’aliment, permettre aux poules d’avoir une ration quasi identique toute l’année pour avoir des résultats plus réguliers, et aussi améliorer nos performances. » Pour le moment, Sonia qui gère l’activité œuf reconnaît ne pas avoir assez communiqué auprès de ses clients sur l’origine des céréales.

Concernant les performances des poules Bovans, elles se situent au-dessus du standard à 65 semaines, avec un taux de ponte de 83 % et la quasi-totalité commercialisable. « Nous n’avons pas perdu en production et nos poules mangent moins, de l’ordre de 120 grammes par jour en milieu de ponte, soit une dizaine de grammes en dessous d’un aliment du commerce. »

Pour Jean-Michel Prieur, la bonne qualité nutritionnelle des céréales — bien triées et bien séchées — y est pour beaucoup. Elles entrent à 57 % dans la formule en milieu de ponte. S’ajoutent aussi les qualités du prémix, des matières protéiques achetées et de la fabrication.

Réduire la dépendance aux protéines achetées

En termes d’économie, les éleveurs estiment « gagner de l’ordre de 50 euros par tonne » , en comparant le prix de l’aliment acheté au leur, en incluant l’achat des protéines, le premix, le carbonate, la prestation et leurs céréales comptabilisées au prix du marché.

La préoccupation forte du moment, c’est la hausse du prix des protéines qui se poursuit. « Entre décembre et mars, le soja bio non OGM est passé de 1 050 à 1 470 euros la tonne », rappelle Sonia Prieur. Pour atténuer cette hausse, Jean-Michel envisage de changer l’assolement dès cette année. « Je vais remplacer une partie des céréales par un mélange triticale-pois-féverole. »

Stéphane Le Floch apporte un bémol. « Oui, mais l’appétence compte. Une poule n’est pas un porc. Elle est plus sensible aux niveaux d’incorporation et on sait vite si on a fait le bon choix. Par exemple, il ne faudrait pas dépasser 4/5 % de pois et autant de féveroles. » Pour enrichir la ration en protéines, il resterait aussi à investiguer sur les plantes alimentaires du parcours, à condition que les poules puissent sortir pour en consommer.

 

S’adapter au nouveau règlement bio

La nouvelle obligation des 100 % de matières premières bio pousse vers le soja non OGM.

Depuis le 1er janvier, il est obligatoire d’incorporer 100 % d’ingrédients bio, ce qui exclut l’utilisation du gluten de maïs non bio. Selon Stéphane Le Floch, ce retrait du gluten des formules aura plus d’impact sur la phase de début de ponte. Cette matière première permettait d’apporter de la méthionine favorable à la fin de croissance des poules et à leur montée en ponte. Pour remédier à cette nouvelle contrainte, il est envisageable d’allonger de quelques semaines l’aliment pic de ponte pour potentialiser cette phase et aussi la persistance de ponte.

Il n’y a peu de solutions alternatives au retrait du gluten. « Ici, il faut compenser par l’incorporation de plus de tourteaux de soja et de tournesol bio. Si on en trouve, on peut aussi mettre du tourteau de chanvre, riche en méthionine et moins cher, et encore du son pour économiser de l’ordre de 1 % de soja.

Ces nouvelles contraintes imposent de raisonner différemment et d’apporter des solutions nouvelles. Par exemple, des enzymes agrées bio qui valorisent mieux les éléments nutritifs acides aminés. »

Deux mois après la fin de la dérogation des 5 % non bio, le technicien n’observe pas pour l’instant d’impacts négatifs. « On nous parle de baisses du calibre et du nombre d’œufs, de soucis digestifs… Et j’attends de voir comment cela va se passer avec les nouvelles règles d’élevage des poulettes bio. »

Une structure en évolution permanente

Installés depuis 2013, Sonia et Jean-Michel Prieur ont fait évoluer leur exploitatiion presque tous les ans

2 013 réinstallation de Jean-Michel sur 28 ha (après dissolution d’un Gaec) avec un élevage de génisses (construction de la stabulation) et un gîte, Sonia poursuivant son activité professorale

2015 création d’un poulailler de 350 poules et démarrage des vaches allaitantes

2016 création d’un bâtiment automatisé de 1000 poules

2017 création du Gaec du vent d’ouest avec l’arrivée de Sonia, reprise d’une ferme voisine (bâtiments et 21 ha) et déplacement de l’atelier bovin sur ce site pour l’éloigner des poules

2019 extension du poulailler à 2500 places et construction de leur habitation ; embauche d’un salarié à temps plein

2020 transformation de la stabulation en hangar de stockage des céréales (180 t)

2021 installation d’une unité de pressage de graines de colza avec la coopérative des producteurs, arrêt temporaire du premier poulailler

2021/2022 construction d’une salle de traite et échange du cheptel

Un conseil au cas par cas

 

 
Stéphane Le Floch. "Il y a assez peu de solutions alternatives au retrait du gluten : tourteaux de soja et de tournesol, tourteau de chanvre, et  du son pour économiser de l’ordre de 1 % de soja."
Stéphane Le Floch. "Il y a assez peu de solutions alternatives au retrait du gluten : tourteaux de soja et de tournesol, tourteau de chanvre, et du son pour économiser de l’ordre de 1 % de soja." © P. Le Douarin

 

Le conseil du technico-commercial formulateur d’Agro 01, Stéphane Le Floch, est celui du bon sens : « faire du cas par cas en partant de ce qui est disponible sur la ferme », rappelle-t-il. Le client dispose des céréales, avec ou pas des mélanges céréales-protéagineux, qu’il faut compléter par des matières protéiques, le prémix et le carbonate de calcium. « Je tiens aussi compte de l’équipement (nombre et capacité des cellules) et des attentes du client. Des éleveurs veulent une formule évoluant toutes les trois semaines, d’autres deux-trois fois par an ou pas du tout. » Agro01 est une firme-services spécialisée dans la fabrication d’aliment à la ferme, dont le siège est à Vannes (Morbihan) et l’usine de minéraux à Loudéac (Côtes-d’Armor).

 

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