Aller au contenu principal

Sus aux troubles musculo-squelettiques lors de la taille des vignes

Une récente étude de la MSA montre l’impact négatif de la taille pour notre corps. Il existe toutefois des moyens pour se prémunir des troubles, comme la formation ou les exosquelettes.

Le constat est alarmant. Certaines de nos articulations sont sollicitées dans des postures dangereuses pendant près de 80 % du temps lorsque l’on taille. C’est ce qui ressort d’une étude menée par la MSA des Charentes entre novembre 2015 et juillet 2016. Lors de cette étude, les spécialistes ont cherché à connaître l’impact du mode de conduite de la vigne sur la santé des travailleurs, lors de la taille et du tirage des bois. Il en ressort que tous les modes d’établissement étudiés sont traumatisants, avec des sollicitations dangereuses sur différentes parties du corps. Et risquent de provoquer des TMS, ou troubles musculo-squelettiques. Sur une conduite en guyot double, les conseillers en prévention ont noté un risque plus important au niveau du dos, à cause des sollicitations des rachis lombaire et cervical. Sur les vignes en arcure en revanche, ce sont les épaules qui sont les plus exposées. Et l’ensemble des membres supérieurs dans le cas d’un cordon haut.

Se former pour réduire la douleur et les risques

En moyenne, 42 % de nos articulations sont sollicitées sur des postures dangereuses pendant un temps important. Pour prévenir l’apparition de douleurs et de pathologies, Romain Balaguier, doctorant à l’université de Grenoble, c’est penché sur la problématique des TMS. Son travail, en collaboration avec plusieurs châteaux bordelais, a abouti à une formation à destination des entreprises viticoles. 85 heures réparties sur six mois, de novembre à avril, au cours desquelles les stagiaires alternent les temps d’apprentissage, de renforcement musculaire et de mise en situation. « Le but de cette formation est avant tout de faire prendre conscience aux vignerons qu’il convient de respecter son corps, afin de limiter la perte de ses capacités physiques », explique Romain Balaguier. Cela passe par des explications sur l’anatomie humaine, mais aussi par des activités physiques. Deux heures par semaine sont consacrées à ce dernier point. Il s’agit aussi d’apprendre à se détendre, et à mettre ses muscles au repos. « Nous abordons également les gestes et postures adéquats, ajoute le thésard. Mais il est difficile de modifier une habitude prise depuis des années. De plus, il faut que cela vienne de la personne, car les contraindre est contre-productif. » Cynthia Lambert, travaillant au château Labegorce à Margaux, a participé à la formation. « On est plus à l’aise pour travailler après quelques étirements le matin, constate-t-elle. Et le soir, on a moins mal quand on rentre chez soi. » La jeune femme, satisfaite de la formation, estime que les contraintes sont faibles, pour un bénéfice réel. « Même au cours de la journée, le travail est moins pénible, assure-t-elle. Et si une douleur apparaît, on s’arrête un instant pour faire quelques petits exercices et continuer plus sereinement. » Pour les dirigeants, les effets sont également visibles assez rapidement. « Nous sommes heureux de voir que l’équipe ne part plus travailler à reculons, admet Marjolaine de Coninck, directrice du domaine. Mais c’est aussi un pari sur l’avenir. » Car un salarié en meilleure santé, c’est moins d’arrêts de travail et plus de longévité. Cela reste toutefois un investissement conséquent, puisque la formation coûte 15 euros de l’heure et qu’elle est dispensée pendant le temps de travail. Suite aux effets positifs de cette démarche, Romain Balaguier planche désormais sur d’autres formations qui seraient plus adaptées au personnel de chai ou aux administratifs. « Il y a encore beaucoup à faire sur ces postes de travail », estime-t-il.

Des équipements pour transférer le travail sur les cuisses

D’autres ont fait le choix de s’équiper. C’est le cas de Béatrice Taillée, vigneronne à Saint-Macaire-du-Bois dans le Maine-et-Loire. Elle a acquis un exosquelette de la société Gobio en décembre dernier, et en tire entière satisfaction. « C’est un outil articulé 100 % mécanique, qui oblige à avoir une bonne posture, explique-t-elle. Il y a des appuis sur les cuisses, qui transfèrent le travail du dos dans les jambes. » Pour la vigneronne, qui estime forcer moins, finis le mal de dos et la fatigue à la fin de la journée. « Par contre, ça tire sur les cuisses et les abdos, surtout les premiers jours ! », relève-t-elle. Aussi, elle ne l’utilise que deux heures par jour. L’outil, qui coûte environ 2 000 euros, est facile à transporter et à enfiler, et ne gêne quasiment pas lors du travail. Seul inconvénient pratique, il doit être fait sur mesure, et ne peut servir qu’à une seule personne. « Je pense l’utiliser également pour attacher les baguettes, poursuit Béatrice Taillée, mais pour l’ébourgeonnage ce sera difficile, il y a trop d’angles. » De son côté, Yann Alexandre, vigneron à Courmas dans la Marne, a opté il y a deux ans pour un « Repozdos », appareil mis au point et commercialisé par Jean-Luc Brochet, viticulteur sur la commune voisine d’Écueil. Composé d’un cadre avec des tendeurs pour soutenir le dos, il renvoie lui aussi le travail sur les jambes. Si l’outil est plus lourd et plus encombrant que l’exosquelette de Gobio (mais presque deux fois moins cher), Yann Alexandre constate les mêmes bénéfices que sa consœur ligérienne. « Étant donné que je me relève sans effort, je n’ai pas plus mal le soir que quand j’embauche le matin, se réjouit-il. Avant il m’arrivait de prendre des cachets pour la douleur au dos, et aujourd’hui je vais mieux. » Le vigneron estime ne pas travailler plus vite, mais être plus efficace en fin de journée. « Il ne faut pas se leurrer, la taille reste un travail difficile, mais je préserve mon capital et espère pouvoir tailler encore dix ans de plus », ajoute-t-il. Deux solutions qui sont intéressantes selon Romain Balaguier, mais complémentaires de la sensibilisation et du renforcement musculaire. « Car il faut faire attention à ce que cela ne fasse pas que déplacer le problème sur d’autres parties du corps », prévient-il.

 

L’étude sur les sollicitations articulaires par mode d’établissement de vigne :

http://bit.ly/2kLpGQR

les bons réflexes

Pour prévenir l’apparition de troubles musculo-squelettiques, de petites actions simples peuvent être mises en place lors de la taille et du tirage des bois, à savoir :

Alterner les tâches ou les modes de conduites

Descendre les fils de relevage avant la taille

Faire des exercices de renforcement musculaire

S’échauffer pendant 15 minutes avant le travail

Adopter de bonnes postures, à savoir travailler avec le dos droit

Se détendre au niveau des épaules et des cervicales

S’étirer en fin de journée

Les plus lus

<em class="placeholder">Tracteur spécialisé fruitier Massey Ferguson MF3 MF3FR.105 dans les vignes avec Jules Marie et Christopher Massé</em>
Essai Massey Ferguson MF 3FR.105 - « Un tracteur complet et maniable »
Jules Marie et Christopher Massé de l’entreprise de travaux viticoles Marie ont pris en main pendant une semaine le tracteur…
A l’occasion des 30 ans de RéChristophe Riou, directeur de l’IFV et Anthony Clenet, responsable services viticoles à l’ICV
Quel sera la quotidien d'un viticulteur sur son exploitation dans dix ans ?

Quel sera le quotidien d’un viticulteur sur son exploitation dans dix ans ? Quels techniques et matériels emploiera-t-il…

<em class="placeholder">Vigne formée en cordon de Royat avec bras croisés</em>
Croiser les bras des vignes en cordon de Royat : avantages et inconvénients
Le cordon de Royat double avec les bras croisés est parfois mis en avant pour le respect des flux de sève. Il s’agit néanmoins d’…
La production mondiale de vin en chute libre en 2024 : quels sont les pays qui perdent le plus ?

Le monde n'a jamais produit aussi peu de vin depuis 60 ans. Le point sur la production mondiale par pays, les variations et…

Vinitech 2024 : 5 nouveautés en avant-première à découvrir en vidéo

Lors de sa visite du salon en avant-première, l'équipe de Réussir Vigne a déniché pour vous cinq nouveautés à découvrir…

<em class="placeholder">Mini-pelle Kubota dans les vignes équipée d&#039;une complanteuse.</em>
La minipelle, un vrai couteau suisse pour la viticulture
De plus en plus de viticulteurs s’équipent en propre ou à plusieurs de minipelles pour réaliser de multiples travaux sur leur…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole