Pliage de la vigne : des audits pour davantage de professionnalisme
Le groupe Bordeaux Vineam, situé en Nouvelle-Aquitaine, réalise des audits de liage auprès de ses salariés. Focus sur ce dispositif qui bénéficie aux employés et à l’entreprise.
Ce matin, et comme tous les matins depuis plusieurs semaines, sur les parcelles du Château Bourdicotte de Bordeaux Vineam, un groupe de cinq salariées s’affaire au pliage de la vigne. Lorsque Vincent Guérin, responsable viticulture du château, s’approche pour auditer l’une d’entre elles sur cette tâche, personne n’est surpris, ces audits ayant cours depuis maintenant trois ans. « En 2019 nous avons fait le choix de développer progressivement les audits sur tous les métiers du vignoble, de la taille, à l’entretien des tracteurs, en passant par le liage », pose Gilles Bayle, directeur des domaines de Bordeaux Vineam.
À l’origine de cette décision, une volonté d’améliorer la qualité du travail au sein du domaine. « Aujourd’hui, il n’y a plus uniquement le rendement qui compte », pointe Maud Demangeon, responsable qualité et RH au sein du groupe. L’objectif est clair : rechercher l’amélioration continue du personnel, afin de professionnaliser tous les métiers du vignoble, dont celui du liage.
Des critères précis et un retour en direct au salarié
Tout commence par de la pédagogie. « Chaque année, avant de commencer à plier, nous transmettons à tous les salariés une fiche métier récapitulant la méthode, ainsi que les critères de l’audit », détaille Vincent Guérin. S’ensuit une phase de prise en main de quelques jours, pendant laquelle aucune évaluation n’est réalisée. « L’objectif n’est pas de piéger les employés », insiste le responsable. Puis, sur toute la période de l’opération, les salariés sont audités chaque semaine, de manière aléatoire.
Dans la pratique, l’audit est simple. Vincent Guérin se saisit de son téléphone, et ouvre une application qui regroupe tous les audits mis en place par le groupe. Après avoir sélectionné le pliage, il entre le nom de la salariée auditée et la parcelle sur laquelle elle travaille. S’ensuit une liste de critères, pour lesquels il est possible de cocher les cases « conforme », « non conforme » ou « non applicable ». On évalue d’abord l’équipement de l’employée : port des EPI (masque et gants), sécateur et fil de fer. « Ensuite, sur environ dix pieds, on observe si le pliage a bien été réalisé », complète Vincent Guérin.
Il vérifie donc que les astes ne soient pas cassées par le pliage, que le pied soit toujours bien accroché, que les liens soient solides, qu’il n’y ait pas de bourgeon endommagé par le liage et qu’il ne reste plus aucun grappillon sur les pieds. Chaque indicateur est pondéré par une cotation, de 5 à 20 pour les éléments les plus importants. En cas de non-conformité, un commentaire et une photo doivent être ajoutés. Résultat, on obtient une note finale en pourcentage, directement envoyée au service RH.
Et aujourd’hui, c’est un sans-faute. « En règle générale, tous audits confondus, personne n’obtient moins de 95 %, explique Vincent Guérin. Et en fin de campagne, comme aujourd’hui, tout le monde est à 100 %. » En effet, au cours de l’audit, un retour direct a lieu auprès des salariés, qui peuvent ainsi s’améliorer d’une fois sur l’autre.
Une prime pour la qualité du travail
Pour Vincent Guérin, c’est le principal atout. « On a noté de réelles améliorations », s’exclame-t-il. D’autant plus que, selon lui, le dispositif a permis de créer un espace de discussion pour les employés, qui osent davantage poser des questions, à partir des critères de l’audit. « Cela donne lieu à un réel suivi des employés au cours du temps, et par-dessus tout cela met en valeur leur travail », affirme Maud Demangeon.
Et cette valorisation est également financière : chaque mois, une moyenne est calculée à partir de toutes les notes d’audits pour chaque salarié. Ajoutée notamment à une note de présence et de rendement, elle permet le calcul d’un taux de prime, en pourcentage du temps de travail. « Par exemple, pour un salarié qui a travaillé 180 heures dans le mois, on peut facilement imaginer une prime de 300 euros bruts si les audits ont été réalisés avec succès », détaille Gilles Bayle. La prime est accompagnée d’un commentaire sur le travail effectué, tel que « bravo, super travail » ou encore « continuez ainsi » ou « attention au rendement ». De quoi s’éloigner de l’ancienne prime uniquement au rendement, qui « usait, abîmait » les employés, d’après le directeur des domaines.
Au-delà du personnel, le groupe Vineam bénéficie lui aussi de la mise en place de ces audits. Soumis à près de dix certifications sur l’ensemble de ses domaines, il est sujet à de nombreux audits externes, qui impliquent de contrôler tous les processus de production en permanence. « Depuis que nous réalisons ces audits, il est devenu très simple de prouver aux organismes de contrôle que nous vérifions tout », résume Gilles Bayle. Et il en est de même auprès des actionnaires du groupe, qui ont, par le biais de l’application, accès à tous les retours des audits.
« Au début, ça faisait drôle »
Pour Jaja Chabot, salariée permanente depuis 32 ans, tout a été question d’habitude. « Au début, ça faisait drôle, on avait l’impression d’être à l’école », avoue-t-elle. Un sentiment encore plus fort chez les nouvelles arrivantes. « Les premières fois j’appréhendais, souffle Faure Sonia, qui entame sa première saison chez Vineam, et puis j’avais du mal à travailler avec le masque de protection. » Mais finalement, les cinq femmes sont unanimes : on s’habitue plutôt bien à ces audits surprise toutes les semaines, surtout pour les manipulations plutôt simples comme le liage. « Finalement, c’est une formalité », résume Jaja Chabot. Une formalité qui, à la fin du mois, porte ses fruits. « Comme on travaille bien, on est récompensées par les primes ! » se réjouit Sylvie Goicoechea, salariée depuis vingt ans sur le domaine.
repères
Bordeaux Vineam, à Saint-Magne-de-Castillon, en Gironde
Six propriétés Château Moulin à Vent, Château Grillon, Château Rocher Bellevue, Château Bourdicotte, Château Grand Ferrand et Château la Salagre
Surface 270 hectares
Certifications bio, national organic program (NOP), China national organic product standard, biodynamie, HVE, ISO 14 001, IFS/BRC au Château Bourdicotte, démarche RSE labellisée « Bordeaux cultivons demain », Smeta
Nombre de salariés 34