La pesée embarquée se démocratise sur les MAV
Ces dernières années, constructeurs de machines à vendanger et spécialistes de la pesée ont équipé de plus en plus d’automotrices de récolte.
Ces dernières années, constructeurs de machines à vendanger et spécialistes de la pesée ont équipé de plus en plus d’automotrices de récolte.
Connaître la quantité de raisin récoltée au cours d’une journée de vendange devient une préoccupation grandissante. Plusieurs raisons expliquent cette évolution. « Sur l’ensemble de nos ventes de machines à vendanger, la première cause d’achat de la pesée embarquée est liée aux caves coopératives, notamment en Côtes-du-Rhône et dans le Languedoc-Roussillon, qui ont un cahier des charges serré quant à la quantité de raisin pouvant être livrée quotidiennement par chaque producteur, explique Pierre Cayrouse, responsable produit machine à vendanger New Holland. Un second motif d’équipement concerne les Cuma et ETA, qui ont des contrats liés à des volumes et/ou qui facturent au tonnage. La pesée embarquée permet alors d’avoir un fin suivi de l’évolution du tonnage. » L’entrepreneur passe tout de suite au client suivant une fois le tonnage atteint et gagne du temps. Certaines caves particulières s’équipent également, afin de s’assurer de terminer une journée par une cuve pleine, de maîtriser les volumes et proportions de chaque cépage dans un objectif futur d’assemblage, ou encore d’avoir un suivi précis des parcelles et des rendements de chacune.
Pesée en statique ou en dynamique
Pour répondre à ces besoins, deux constructeurs de machines à vendanger, Grégoire et New Holland, et un spécialiste de la pesée, Servited, proposent des solutions montées d’usine ou à installer sur les machines existantes.
Basée à Bruguières, en Haute-Garonne, Servited dispose d’un savoir-faire dans le domaine des systèmes de pesée sur les engins de transport ou encore de travaux publics et distribue la marque italienne VEI pour toute la France. Présente au Sitevi 2017, l’entreprise a équipé depuis plusieurs machines à vendanger, notamment par l’intermédiaire de concessionnaires partenaires. Le système s’appuie sur des jauges de contraintes positionnées à l’endroit où viennent se poser les deux bacs après vidange. Un boîtier en cabine compile les données et informe de la pesée en statique et en dynamique. « Bien sûr, la pesée sera toujours plus précise en statique, puisqu’on s’affranchit des biais liés aux dévers ou à d’autres forces parasites, explique Franck Gil, de Servited, mais nous garantissons une précision de 0,5 % même en dynamique. » Compter autour de 5 000 euros pour l’équipement d’une machine à vendanger, toute marque confondue.
10 à 80 % des machines équipées selon les régions
Sur ses machines à vendanger Braud 9050, 9070 et 9090, New Holland propose depuis trois saisons un système de pesée statique. Proposé à la commande ou en accessoire après-vente, ce kit équipe en moyenne 10 à 15 % de ces vendangeuses dites « hautes performances », et même 70 à 80 % chez certains concessionnaires. Il se compose de capteurs de pression qui pèsent avant et après vidange de la benne. « Un cycle de pesée dure 50 secondes de plus dans le cycle de vidange, explique Pierre Cayrouse. Cela se fait de manière automatique : l’opérateur a juste à appuyer sur un bouton sur l’écran. Toutes les pesées peuvent s’incrémenter. Les quantités pesées s’additionnent au fur et à mesure, ou se soustraient si on a rentré au préalable un tonnage maximal pour la journée. » Partant de la distance parcourue et de la pesée réalisée, le système évalue la surface restant à parcourir pour atteindre un poids maximal à récolter dans une journée. Il est également possible d’y ajouter une imprimante pour éditer des tickets. Pour la prochaine campagne, il sera possible d’affilier une ou plusieurs pesée(s) à une benne. Le personnel en cave aura alors une bonne notion de la quantité de raisin qui rentre au fur et à mesure. New Holland annonce une précision de pesée de 5 %, même si « dans les faits, on tourne plutôt autour de 2-3 %, rajoute Pierre Cayrouse. Et nos clients les plus pointus qui réétalonnent régulièrement leurs pesées arrivent à descendre en dessous de 1 %. » Pour le responsable produit, c’est une précision suffisante à mettre en relief avec son coût de 1 500 euros avec l’imprimante. « Si on veut plus de précision, si on veut de la pesée dynamique, le coût en sera forcément plus élevé, ce qui ne sera pas acceptable par bon nombre de viticulteurs et entrepreneurs », conclut-il.
De son côté, Grégoire propose depuis l’année dernière sur les GL et GM une solution de pesée statique, baptisée Neomass, s’appuyant sur des capteurs sur les vérins de levage. Facturée 5 100 euros, elle est sollicitée par 20 % des acheteurs. « Et cette année, nous devrions nous approcher des 25 %", confie Mathieu Tabardel, chef produit vigne large chez Grégoire. Côté précision, le Charentais annonce une valeur de 5 à 8 %. « Mais au bout d’une journée de vendange, l’erreur ne dépasse pas une centaine de kilos", rassure Mathieu Tabardel.
Autre modèle au catalogue de Grégoire pouvant être équipée de la pesée, la machine à vendanger GX 8 dispose de quatre pesons sur les quatre coins du bac central, ce qui confère la possibilité de peser en temps réel. Son coût est légèrement supérieur : 5 720 euros.
Vers la cartographie de rendement
Dans la recherche de connaissance précise des rendements d’une parcelle, l’étape suivante consiste à mesurer la variabilité intraparcellaire. Si les GL et GM ne possèdent pas de pesée en continu, Grégoire a néanmoins trouvé le moyen d’estimer cette variabilité, grâce au système Neomap. Combiné à l’antenne GPS Agrosky SR-10, ce système mesure en temps réel et à chaque position l’effort sur la dalle de convoyage. Les variations de pression sur cette dernière sont ensuite corrélées à la mesure de poids de vendange lors de la vidange de la benne pour établir une estimation du poids de vendange en chaque point et donc une cartographie. Une dizaine de machines ont validé la solution en pré-série la saison passée : Néomap sera commercialisée à grande échelle à partir de cette saison, même si Mathieu Tabardel estime « ce marché encore confidentiel, limité à des férus de technologies et des exploitations pointues dans leurs itinéraires culturaux".
"Une meilleure connaissance des volumes de récolte"
Christian Gastou est l’un des associés du domaine du Clos des Roques, situé à Cesseras, dans l’Hérault. En cave particulière depuis 2001, l’exploitation s’étale sur 75 hectares, dont une partie croissante en viticulture biologique. Pour la saison 2018, le domaine a choisi de remplacer la machine à vendanger de l’exploitation et a porté son choix sur une Braud 8030 L. "Cette machine convenait parfaitement à nos besoins, mais ne pouvait prétendre à la pesée embarquée, alors disponible uniquement sur les Braud 9000 L, se souvient Christian Gastou. Or, c’était une information qui nous intéressait beaucoup." Leur concessionnaire les oriente alors vers une solution de pesée en continu Servited.
Après une récolte, les impressions du vigneron sont bonnes. "On sait avec précision ce que l’on rentre dans nos cuves, apprécie-t-il. Une partie de notre production est vendue au kilo aux caves coopératives. Cela permet de contrôler les chiffres qui nous sont communiqués, qui sont assez justes dans l’ensemble." Le vigneron apprécie également de pouvoir mesurer plus finement la production dans ses parcelles avec leurs variabilités. "Nous avons une parcelle d’alicante dont seuls deux rangs ne sont pas arrosés par micro-irrigation, donne pour exemple Christian Gastou. En comparant ces deux rangs aux deux suivants, ces derniers étant irrigués, nous avons pu constater un gain de production de 40 %."
Côté précision, après avoir pesé quelques bennes de vendange à la distillerie locale, le domaine a mesuré une erreur oscillant autour de 150 kg pour 8 tonnes de récolte. "Il faut prendre soin de se positionner sur une zone plane avant la pesée, conseille Christian Gastou. En dévers, la précision de pesée diminue et peut monter à 400 kg pour 8 tonnes."