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« Il est primordial de rentabiliser le semis des couverts dans ses vignes »

Semer un couvert végétal peut être bénéfique, à condition de le réussir. Les conseils de Thibaut Déplanche, directeur de Celesta-lab, pour en faire un investissement et non un goufre financier.

Thibaut Déplanche, directeur général du laboratoire Celesta-lab, dans l’Hérault, explique qu'il faut un sol en bon état pour réussir et rentabiliser un couvert ...
Thibaut Déplanche, directeur général du laboratoire Celesta-lab, dans l’Hérault, explique qu'il faut un sol en bon état pour réussir et rentabiliser un couvert végétal dans les vignes.
© Montage Réussir

« Quand un viticulteur investit dans une tonne d’engrais organique ou de compost, il est sûr que cette matière profite à la parcelle, plante Thibaut Déplanche, directeur général du laboratoire Celesta-lab, dans l’Hérault. Et s’il double la mise, il double l’apport : de la facture dépend le bénéfice. Ça n’est pas le cas pour l’implantation d’un couvert végétal. L’argent mis dans le semis peut se transformer en 10 tonnes par hectare de biomasse, ou en… rien du tout. » D’où l’intérêt de réfléchir à deux fois avant de se lancer. Est-ce vraiment la solution à ma problématique ? La flore spontanée de mes parcelles de vigne ne peut-elle pas me donner satisfaction ? Et si les couverts végétaux représentent véritablement le levier dont j’ai besoin, vais-je pouvoir m’en occuper ? « Car il faut créer les conditions de la réussite et soigner à tout prix l’implantation », poursuit l’agronome. Cela passe, selon lui, par l’analyse de trois points cruciaux sur les sols.

1 Le statut physique

Thibaut Déplanche constate que l’état physique des sols en viticulture est généralement plus dégradé qu’en grandes cultures. Il est même dans certains cas très altéré. Les parcelles en vignes étroites, notamment, sont fortement sujettes aux tassements. « Les plantes ne sont pas des perceuses, ironise le directeur. L’action des racines est un post-requis au travail mécanique, elle ne le remplace pas mais l’améliore. »

Il préconise donc de réaliser des tests bêche ou des fosses pédologiques. Si le sol est tassé ou s’il existe une couche hermétique dans un horizon, il convient de décompacter ou de sous-soler au préalable. L’expert cite des exemples où les racines forment de véritables coudes à 10 centimètres de profondeur. « Généralement, c’est qu’il y a derrière cela une couche tassée que les plantes n’arrivent tout bonnement pas à franchir », commente-t-il.

2 Le statut organique et biologique

« Lorsqu’on est à des teneurs de 0,8 % de matière organique totale, il est difficile de faire pousser quoi que ce soit, alerte Thibaut Déplanche. Mieux vaut alors réaliser des apports exogènes pour lancer la machine. » Car, les couverts permettent de redresser les taux de matière organique, mais c’est un processus long. Et les graines que l’on met en terre ont besoin des bonnes conditions apportées par la matière organique (rétention de l’eau, résilience…). Sans compter que c’est elle qui abrite la biologie du sol, et donc la fertilité naturelle.

Ainsi, mieux vaut réaliser un état des lieux pour savoir d’où l’on part. Une analyse de la teneur et une caractérisation de la matière organique (stable/labile) permettent de piloter au mieux la stratégie à mener. « L’état organique et biologique de la parcelle n’est pas un facteur d’échec aussi abrupt que le statut physique du sol, mais il participe au fait d’avoir une belle biomasse à la fin de l’hiver, et donc de maximiser les bénéfices et de rentabiliser au mieux le coût de départ », note l’agronome.

3 Le statut minéral

Les espèces implantées en couverture végétale, comme la féverole ou l’avoine, sont généralement bien plus exigeantes que la vigne en termes de nutrition. Elles ont d’ailleurs des besoins qui diffèrent, notamment en phosphore, un élément souvent oublié par les viticulteurs. « Il convient donc de revoir sa stratégie, pointe Thibaut Déplanche. Une analyse physico-chimique, en plus de la caractérisation physique du sol, est indispensable pour compléter le diagnostic. » Si besoin, le sol devra donc être fertilisé avant ou après le semis. « On se rend compte qu’il y a souvent de belles réussites dans les essais de couverts végétaux chez les viticulteurs qui apportent de l’engrais organique depuis plusieurs années », témoigne le directeur.

Quand le semis précoce a tout bon

Dans certaines situations, le couvert végétal doit être détruit tôt en saison. C’est le cas dans les régions où la concurrence hydrique commence dès le printemps, dans les parcelles où le gel menace davantage, ou encore dans celles où les traitements phyto débutent de bonne heure. « Or c’est en avril qu’il se développe le mieux », constate Thibaut Déplanche. Dans ce cas, un semis en octobre perd de son intérêt. Aussi l’agronome suggère dans de tels contextes de semer précocement, dès la mi-août. « La graine peut attendre en terre », assure-t-il. Cela demande toutefois quelques aménagements, comme celui de semer plus profond. À cinq centimètres au lieu d’un seul, par exemple, pour éviter que les graines ne germent à la première petite pluie. Ou d’éviter les espèces qui peuvent geler en hiver, comme la féverole de printemps. « En procédant ainsi, l’objectif est de produire un maximum de biomasse à l’automne, décrypte l’expert. C’est une période idéale car il fait encore chaud, il y a de la lumière et de l’humidité, donc beaucoup de minéralisation à une époque où la vigne ne consomme quasiment plus d’azote. Ce sont des unités fertilisantes qui seraient lessivées et perdues sans cela. » Une stratégie payante à deux niveaux, puisqu’elle profite aux sols viticoles et à la qualité de l’eau !

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