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Climat
Adapter le travail en vert de la vigne au changement climatique

Le changement climatique en cours modifie la pousse de la vigne et les équilibres végétatifs. Entre adaptation des pratiques et nouvelle organisation du travail, voici ce qui vous attend.

David Perrier, conseiller de la chambre et Jean-Baptiste Soula, directeur de Bordeaux Vineam, prennent en compte le calendrier lunaire pour réaliser le rognage dans les vignes du château Grand Ferrand.
© C. Gerbod

Avec une maturation qui a avancé d’une vingtaine de jours en trente ans, le changement climatique est une réalité déjà très palpable dans le Bordelais. Dans ses différents vignobles, Bordeaux Vineam a modifié son approche des travaux en vert et les inclut dans une réflexion d’ensemble sur l’équilibre de la vigne, à court, moyen et long terme. La limitation de la surface foliaire est le premier réflexe qui s’est imposé sur les différents domaines. Il passe par un écimage plus bas qu’avant, surtout pour le sauvignon et le merlot. Le but est d’allonger la période de maturité en ralentissant l’activité de photosynthèse. Un point particulièrement crucial pour l’équilibre des rouges.

« La hauteur de palissage est réduite pour limiter l’évapotranspiration et la formation de sucre », rappelle David Perrier, conseiller de la chambre d’agriculture de la Gironde qui intervient sur les châteaux Grand Ferrand et Bourdicotte en entre-deux-mers. Le rognage pratiqué est descendu à 15 cm environ au-dessus du dernier fil alors qu’auparavant il était de 30 à 40 cm. David Perrier précise toutefois que cette distance s’adapte en cas d’année froide.

« Évidemment cela favorise l’apparition d’entre-cœurs mais impossible de s’en passer », explique Jean-Baptiste Soula, directeur des domaines. Pour limiter l’effet sur la vigueur, le calendrier lunaire est désormais pris en compte. L’écimage est réalisé à lune descendante et non montante. « La phase ascendante favorise les rejets », constate David Perrier.

L’idée reste toutefois de devoir rogner le moins possible. L’objectif est déjà intégré dans les choix de taille. La décision de rogner est retardée au maximum. David Perrier constate que qu’il est plus facile de le limiter sur les cabernet-franc et cabernet sauvignon, bien palissés grâce à leur port dressé, que sur le merlot qui a tendance à retomber assez vite.

L’effeuillage est réduit au maximum voire totalement évité pour davantage protéger les grappes. « En dehors des vignes en gobelet, la marge d’ajustement c’est la largeur du rognage. Notamment pour les sauvignons il est envisageable de rogner plus large pour créer un effet casquette sur les raisins », explique David Perrier. Les décisions sur l’effeuillage se prennent « à partir du 15 juin dès la fin de la floraison », précise Gilles Bayle, directeur technique de Bordeaux Vineam. « L’intensité de l’effeuillage dépend de la vigueur de la vigne, du sens d’exposition, de l’orientation de la parcelle, de la sensibilité du cépage et de la parcelle. Elle est aussi fonction de l’année. A priori, il est prévu que l’année 2019 soit très sèche donc il se peut que sur certaines parcelles il n’y ait tout simplement pas d’effeuillage », prévient-il. L’effeuillage mécanique est ajusté selon le pourcentage de suppression de feuilles souhaité et selon la vitesse d’avancement.

Préserver la fraîcheur du sol et des vins

Pour Jean-Baptiste Soula, les travaux en vert sont indissociables d’autres approches indispensables pour prévenir le risque de manque d’eau. Il a décidé de lutter contre l’évapotranspiration en arrêtant le travail du sol qui « assèche la terre » à partir de 2017. Seul le dessous du rang est travaillé avec des lames, disques Kress, l’Herbanet ou un rotofil horizontal selon la saison. Le couvert n’est pas coupé mais roulé. Un rouleau double à biseaux (modèle Grégoire) qui pincent les herbes permet un travail précis. Les herbes couchées isolent le sol.

Ces choix culturaux nécessitent une planification solide. « Il nous arrive parfois de travailler en deux fois 8 heures quand la pousse de la vigne et celle de l’herbe sont conjointes. Nous combinons à chaque fois que nous le pouvons des outils à entraînement hydraulique et des outils à prise de force. Ainsi nous couplons lame interceps avec rouleau Faca/épampreuse + rouleau Faca/rogneuse + tondeuse ou rouleau/lame + disque émotteur », détaille le directeur technique.

Toutes ces actions sont pour Jean-Baptiste Soula indissociable de la densité de plantation. Pour lui, 5 000 pieds par hectares est la densité la plus adaptée à son système car elle permet d’atteindre un rendement satisfaisant sans entassement de végétation ni concurrence excessive de la vigne. Il a donc décidé de redensifier certaines vignes plantées à 4 m. L’intérêt est aussi sanitaire. Une vigne trop vigoureuse résiste moins aux parasites.

Pour s’adapter à plus long terme, la plantation de cépages plus tardifs que le merlot est engagée au château Grand Ferrand. Pour Jean-Baptiste Soula, le merlot présente notamment le double inconvénient de mûrir précocement et aussi d’avoir un port tombant, nécessitant un plus grand travail de rognage.

repères

Bordeaux Vineam

Bordeaux Vineam rassemble six domaines en Nouvelle-Aquitaine, dont château Grillon (sauternes), château Rocher Bellevue (castillon-côtes-de-bordeaux), château Grand Ferrand et château Bourdicotte (entre-deux-mers), sur un total de plus de 270 ha.

L’ensemble des vignes est cultivé en agriculture biologique avec recours à la technique culturale simplifiée et aux semis directs sous couvert. Un projet d’agroforesterie débute au château Grand Ferrand.

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