« Un tiers de nos vaches sont taries sans antibiotiques »
Le Gaec du Claret, en Isère, a revu sa stratégie de tarissement en ciblant mieux l’administration d’antibiotiques et en recourant aux obturateurs. Les résultats sont au rendez-vous, et ce, même avec des exigences de qualité comparables à celles du lait cru.
Le Gaec du Claret, en Isère, a revu sa stratégie de tarissement en ciblant mieux l’administration d’antibiotiques et en recourant aux obturateurs. Les résultats sont au rendez-vous, et ce, même avec des exigences de qualité comparables à celles du lait cru.
Il y a encore deux ans, Lilian et Patrick Gaillard traitaient systématiquement toutes leurs vaches avec un antibiotique au tarissement. Comme une grande majorité d’éleveurs. « Nous le faisions par habitude, racontent les deux frères, à la tête d’un troupeau de 55 laitières à 6 400 litres en AOP bleu du Vercors. Comme nous avions 100 % des vaches guéries en utilisant un antibiotique à large spectre, nous ne nous étions jamais vraiment posé la question de pratiquer différemment. »
Apprendre à se passer d’antibiotiques sur les vaches saines
« Nous n’avions pas du tout conscience de cela, avouent les éleveurs. Nous savions qu’il était possible de recourir aux obturateurs pour les vaches qui n’avaient pas beaucoup de cellules, mais nous n’avions jamais franchi le pas. Nous préférions jouer la sécurité plutôt que risquer de prendre un carton qui nous coûterait cher. » Il aura fallu que les associés intègrent une étude proposée par leur conseiller pour réfléchir au traitement sélectif au tarissement, en faire l’expérience, et se rendre compte qu’ils pouvaient se passer d’antibiotiques sur les vaches saines.
« La réduction d’antibiotiques, c’est dans l’air du temps, poursuivent-ils. Et puis, si les obturateurs permettent de limiter les nouvelles infections, nous aurons plus de chance d’empocher la prime de 10 euros pour 1 000 litres versée quand le lait ne dépasse pas 100 000 cellules par millilitre en moyenne mensuelle. »
Aucune nouvelle infection au vêlage
Le bilan de cette première année est encourageant. Sur les 37 tarissements effectués, 13 se sont faits sans antibiotiques, seulement avec l’obturateur. Pour autant, 100 % des vaches ont affiché moins de 300 000 cellules au premier contrôle et 89 % moins de 100 000. Malgré un taux cellulaire moyen moins bon et un nombre de mammites un peu plus élevé en 2021, il n’y a eu aucune nouvelle infection (contre 13 % en 2020, avec trois vaches « millionnaires »). Quant au taux de guérison(1), il est resté stable avec 100 % des vaches guéries au vêlage.
Les traitements coûtent plus cher, mais…
Avec ce protocole, potentiellement, les éleveurs ont gagné trois réformes et la prime des 10 €/1 000 l versée les mois où le taux cellulaire moyen est inférieur à 100 000 cellules/ml.
Chiffres clés
Une étude sur cinquante élevages en cours
Une étude terrain, pilotée par l’Institut de l’élevage, a été réalisée sur une cinquantaine d’élevages en 2021. Le protocole a été le même pour tous les élevages. Tous les animaux reçoivent un obturateur et ceux à moins de 100 000 cellules au dernier contrôle ne sont pas traités par antibiotiques.
« Au vu des résultats chez les vingt élevages que j’ai suivis, le bilan se montre satisfaisant », précise Samuel Bouchier, d’Adice Conseil élevage. La majorité des élevages a obtenu des résultats encourageants avec une baisse du nombre de nouvelles infections et une stabilisation des résultats de guérison. Il ressort aussi de l’étude que cette pratique n’est pas forcément à la portée de tous les éleveurs. Certains ont abandonné par manque de motivation ou d’hygiène, ou en raison de situations épidémiologiques spécifiques. Certains tarissent aussi leurs vaches deux mois après le dernier contrôle, ce qui pose problème quant à la pertinence du comptage cellulaire pris en compte.
Les résultats complets sont attendus cet automne.
Mise en garde
En lait cru ou dans les filières telles que l’AOP du Vercors utilisant du lait thermisé avec des contraintes proches de celles du lait cru en termes de qualité du lait, les exigences en matières de concentrations cellulaires sont fortes. D’où une importance accrue d’avoir le plus possible d’animaux sains au vêlage. « L’objectif ici est d’avoir 95 % de vaches qui revêlent avec moins de 300 000 cellules », relève Samuel Bouchier, d’Adice.