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Mac Lesggy – « Il faut changer radicalement le regard sur les animaux, sinon bientôt on ne mangera plus de viande »

© @maclesggyofficiel

Le présentateur aux lunettes baroques ne se contente pas de faire des plans sur la comète.
Il est plus que concerné par le terroir, l’élevage et aussi le revenu de nos agriculteurs.

À part les bonnes choses qu’il y a sur la table, l’agriculture ça évoque quoi pour vous?

Plein de choses ! J’ai fait des études d’ingénieur agronome. Mais c’est en faisant un stage en Indre-et-Loire que j’ai vraiment découvert l’agriculture. Déjà, à l’époque, il y avait une recherche d’efficacité technique qui désorganisait tout. Puis est venu le productivisme. Le productivisme, on s’en rend compte, n’est pas franchement porteur de bonheur, ni pour les agriculteurs ni pour les consommateurs. Il ne faut pas toujours aller vers la dernière nouveauté, et c’est moi qui le dit !

Les vidéos de L214, c’est assez flippant, non?

Il y a une montée en puissance de L214. Les citadins culpabilisent sévèrement. Mais personne n’a apporté un élément de réponse. Il faut changer radicalement le regard sur les animaux, sinon bientôt on ne mangera plus de viande. Je connais des éleveurs qui sont très attachés à leurs animaux, qui les appellent par leur prénom, bien qu’ils les élèvent pour l’abattoir. Pour l’instant, les éleveurs subissent et la filière viande semble à réinventer. Au Japon, la viande est presque devenue un condiment, on en mange très peu.

Faut-il tout dire, tout montrer des abattoirs comme ça a l’air d’être la tendance?

On devrait faire un tutoriel sur internet pour apprendre à tuer une poule. Ça ferait réfléchir les gens. Car aujourd’hui les gens ne veulent pas savoir. Par exemple, la plupart des gens qui mangent aujourd’hui du mouton mangent en réalité halal, sans même le savoir, car c’est le mouton le plus répandu. Ils n’ont pas spécialement de conviction religieuse halal et ces moutons sont par ailleurs abattus sans étourdissement préalable. C’est inacceptable. Ne pas savoir, c’est le contraire de ce que je fais. De toute façon, un industriel dans l’alimentaire qui ne veut pas montrer sa chaîne de fabrication dort sur un volcan. Le jour où l’info va sortir, il comprendra sa douleur.

Est-ce que les journalistes, les médias, ne sont pas un peu, eux, loin de l’agriculture?

On ne peut pas en parler généralement. Quels médias ? Il y a autant de journalistes que de points de vue sur l’agriculture. Ce qui est certain, c’est qu’il est difficile de se mettre à la place de l’agriculteur, son rythme de travail, son rapport à la terre. Et l’agriculteur sait de moins en moins ce qu’il est lui-même. Et l’opinion hésite aussi. Est-il le maillon d’un système industriel ? Un porteur de la tradition ? Un jardinier conservateur du paysage ? Ou encore un pollueur sans lequel la campagne se porterait mieux ? Il y a cinq ans, j’ai fait partie d’une commission qui réfléchissait aux « valeurs » des Jeunes Agriculteurs. Il n’y a pas eu de suite, compte tenu de l’étendue du chantier sans doute.

L’agriculture pour bobo est-elle l’avenir?

Les centres urbains friands d’authenticité donnent la tendance. Ce resto en témoigne, où l’on nous sert une délicieuse palombe tuée à la 22 long rifle*. On dirait que les citadins ont plus envie d’authenticité que les provinciaux. Dans les supermarchés en province, il y moins de produits de terroir, comparativement, à ce qu’on trouve à Paris. En France, il y a une fiction de l’agriculture performante qui va nourrir la planète mais on est bien loin de ces exploitations de 1 000 hectares comme on peut en voir au Brésil ou en Russie, qui visent le marché mondial et pèsent vraiment sur les cours de matière première. C’est donc probablement les bobos qui ont raison.

Que penser de la petite visite sympatoche et rituelle des politiques au Salon de l’agriculture?

C’est la pêche aux voix. Une semaine par an, ils viennent s’afficher pour le folklore, selon une vieille tradition héritée de la IIIe République. Mais l’attente des paysans vis-à-vis des politiques est trop forte. Ils s’illusionnent. Ils devraient travailler à se passer des politiques. Ce n’est pas dans des textes de lois qu’on va légitimer ce métier, mais auprès des consommateurs et avec des bons produits.

Un gros problème demeure, c’est le fric, le revenu des agriculteurs...

Si j’étais agriculteur, mon obsession serait de ne pas être sous-traitant d’industriel. La vente directe peut sauver une partie de l’agriculture. L’agriculture « s’ubérise » comme pour les taxis. Et on peut maintenant mettre en rapport de manière conviviale et pratique tout le monde, le producteur et le consommateur. 

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