Des éleveurs piégés par des journalistes de France 5 lors d'un documentaire sur l'agriculture ?
Quatre jours de tournage pour une image sacrifiée. C’est le constat amer dressé par Dominique et Philippe Gautier, éleveurs porcins dans les Cotes-d’Armor. Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, ils réagissent au documentaire sur l’agriculture bretonne diffusé le 17 novembre sur France 5, pour lequel ils avaient accepté de témoigner. Ils ont l'impression d'avoir été manipulés et trahis.
Quatre jours de tournage pour une image sacrifiée. C’est le constat amer dressé par Dominique et Philippe Gautier, éleveurs porcins dans les Cotes-d’Armor. Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, ils réagissent au documentaire sur l’agriculture bretonne diffusé le 17 novembre sur France 5, pour lequel ils avaient accepté de témoigner. Ils ont l'impression d'avoir été manipulés et trahis.
A la Ferme de Kermerrien, à Trévérec dans les Côtes-d’Armor, la déception était grande ce 17 novembre. Le reportage diffusé en soirée sur France 5 leur a laissé un goût amer. Avec beaucoup de réticence au départ, ils avaient finalement accepté de témoigner dans un documentaire sur l’agriculture bretonne. Cela remonte à un an, le tournage avait duré 4 jours et 70 minutes de film avaient été enregistrées sur l’exploitation porcine de Dominique et Philippe Gautier. « Nous étions plutôt contents des séquences tournées, il y avait un vrai bon échange », dit le couple sur Facebook et Twitter.
Après avoir visionné l’émission, leur regard sur ses longues heures passées face caméra est aujourd’hui différent. La technique de ceux qui réalisent ces émissions, c’est de « mettre en confiance leurs interlocuteurs pour mieux les trahir », estiment-ils désormais.
70 minutes de film pour 5 minutes dans un reportage à charge
Car à l’arrivée, leur témoignage n’occupe qu’une petite place dans le documentaire. Cinq petites minutes dans un reportage de plus d’une heure, à charge pour l’agriculture bretonne.
Les deux sujets retenus par Marie Garreau de Labarre ne sont pas le reflet de du reportage réalisé sur l'exploitation du couple. Eux voulaient expliquer leur métier d’éleveur naisseur engraisseur de 600 truies, la journaliste a volontairement choisi de mettre l’accent sur deux sujets : le départ des animaux à l’abattoir et la pollution générée par les élevages.
Le documentaire montre la station de traitement mais ne dit pas que cet investissement permet de traiter les effluents d’élevage pour éviter la pollution. Les agriculteurs voulaient mettre en avant les progrès qu’ils avaient accompli depuis 20 ans sur leur exploitation et la réglementation très stricte instaurée en matière d’environnement. Ils ne voulaient pas « parler des problèmes d’environnement à l’échelle de la Bretagne », avaient-ils prévenu estimant qu’ils n’avaient pas « les éléments suffisants pour parler d’un sujet si sensible ». Dans le reportage de France 5, Philippe Gautier, adresse un message à ceux qui l’accusent de polluer : « Regardez-ce qui a été fait. Regardez d’où on vient. Regardez où on va ».
20 ans de progrès accomplis passés sous silence
Un message positif qui a du mal à s’imposer dans l’ensemble du reportage. Le titre du documentaire « Bretagne, une terre sacrifiée » montre bien l’angle choisi par la chaîne de télévision. Marina Carrère d’Encausse, qui présente l’émission, évoque la Bretagne « pauvre et enclavée au sortir de la seconde guerre mondiale » devenue aujourd’hui « la première région agroalimentaire d’Europe ». Mais c’est bien du « revers de la médaille » qu’il sera question pendant plus d’une heure : des « dégâts environnementaux et humains ». L’animatrice se demande si ce n’est pas « l’ensemble d’un modèle agricole qu’il faut remettre en question » mais ne semble pas avoir pris la mesure de tout ce qui a déjà été remis en question par les professionnels.
« Arrêtez de nous victimiser », lance Dominique Gautier dans une vidéo mise en ligne sur les réseaux sociaux en réaction au documentaire de France 5. Car pour le couple d’agriculteurs, malgré cette expérience décevante, pas question de cesser de communiquer. « Nous continuerons à dialoguer avec les consommateurs qui, eux, nous accordent leur confiance ».
Non, la Bretagne n'est pas une terre sacrifiée, estime le président de la Région
Le président de la Région Bretagne, Loïg Chesnais Girard, présent lui aussi dans l’enquête, a lui aussi réagi au documentaire diffusé par France 5. Interrogé dans l’enquête télévisée, il réagit à la diffusion de l’émission sur les réseaux sociaux. « La Bretagne, une terre sacrifiée ? Non », répond-il. Il évoque les « enjeux environnementaux à assumer » et les « excès du passé à corriger ». Mais la Bretagne avance « sans rien cacher », estime-t-il, avec pour mission de « nourrir les hommes et les femmes ».