Aller au contenu principal

Le moha, pour produire en peu de temps

Plus utilisé que le millet perlé, le moha est réputé monocoupe. Il est pourtant capable de repousser et d'offrir une deuxième exploitation.

Le moha fourrager - Setaria italica - est une graminée annuelle qui, une fois implantée, a de faibles besoins en eau et résiste à la sécheresse. En bonnes conditions (un peu de pluie et chaleur), son développement est très rapide et il ne faut pas louper le bon stade d'exploitation. Pour deux raisons : elle perd en qualité alimentaire, et en capacité de repousse. Car même si le moha est réputé monocoupe, il est capable d'offrir une deuxième exploitation, comme ce fut le cas en 2020 à la ferme expérimentale Arvalis des Bordes (Indre). Son cycle court et son caractère monocoupe font qu'il est choisi en cas de semis tardif derrière une orge, voire un blé.

Rendement de 2 à 7 tMS/ha

En Nouvelle-Aquitaine, sur plusieurs plateformes, le rendement du moha associé à un trèfle d'Alexandrie est allé de 3,4 à 7,4 tMS/ha. À la ferme expérimentale des Bordes, en 2020, il a atteint 5 tMS/ha en pur en deux coupes. Les associations avec des légumineuses n'ont pas apporté de rendement en plus (lire ci-après). En 2019, il n'a fait que 2 tMS, associé à un cowpea ou un lablab.

Un tardif pour la valeur alimentaire ?

La valeur alimentaire du moha est assez moyenne : 0,77 UFL, 12 à 13 % MAT, riche en fibres. Le foin ou l'enrubannage de moha est surtout donné aux génisses. La valeur alimentaire chute fortement à partir de l'épiaison. Si on recherche davantage la qualité, mieux vaut prendre une variété plus tardive, même si elles sont plus chères. En France, on trouve majoritairement du moha bigarré, à épiaison précoce. « En France, nous développons principalement des variétés à épiaison tardive », souligne Cédric Pasquier, de Cérience(1). Afin d'améliorer les valeurs alimentaires du moha, il est associé avec des légumineuses estivales (lire ci-après).

D'après l'essai 2020 aux Bordes, le moha ne semblait pas valoriser l'apport d'azote effectué deux semaines après le semis. Aux Bordes, le moha a très légèrement moins performé - en rendement et en valeur alimentaire - que le millet perlé. Adice conseil en Isère observe plutôt l'inverse. « Il faut encore des données. Il reste des questions sur la valorisation de la fertilisation, de l'eau... », insiste Carole Gigot, de la ferme expérimentale des Bordes. 

(1) Fusion Jouffray Drillaud et Terrena semences.

Les plus et les moins

Les plus

Adapté à tous types de sol

Produit en un temps très court

Peut lever en dessous de 10 °C au sol

Peut repousser si la première exploitation a été faite avant épiaison

Appétent, bien pâturé.

Les moins

Rendement et valeur alimentaire un peu en deçà d'un millet perlé, aux Bordes

« Notre moha produit près de 8 tMB/ha »

Patrick Chavat, du Gaec de la marguina, dans l'Isère, a laissé tomber l'association avec du trèfle, qui a vraiment du mal à pousser.

Le Gaec de la marguina, dans l'Isère, cultive du moha depuis douze ans. Aujourd'hui, il en fait 8 à 10 hectares(1), pour faire de l'enrubannage donné aux génisses. « Je le sème derrière une orge, donc tout début juillet. J'ai essayé après un blé ; ça a marché, mais c'est risqué. Avant, nous semions le moha au Delimbe, mais ce n'était pas précis, les levées étaient irrégulières. Aujourd'hui, le moha est semé au combiné, à 40 kg/ha. On roule après. Le peuplement est plus régulier, le rendement meilleur. » Du lisier (35 m3) est apporté avant le déchaumage. Quand les conditions météo sont bonnes, de l'azote minéral est mis au semis (35 UN). « Chez nous, l'association avec un trèfle n'est pas concluante. Il y a très peu de trèfle. Donc maintenant on fait le moha en pur, même si du coup on ne peut pas le déclarer en SIE. »

Du bigarré pour de l'enrubannage

En douze ans, le Gaec a constaté une évolution des variétés. « Avant, elles étaient plus productives, à 10 t de matière brute (MB) par hectare, mais elles montaient très haut, épiaient très vite, étaient grossières. Depuis, il y a eu des progrès. Nous choisissons une variété typée fourrage (moha bigarré). Le rendement est moins élevé (6 à 8 tMB), mais la plante monte moins vite et est moins grossière. » Le Gaec ne fait qu'une fauche, et le moha repousse très peu.

Le Gaec apprécie le fait que le moha couvre bien le sol : « la parcelle est propre. » Patrick Chavat trouve aussi que le moha est plus adapté que le sorgho pour faire de l'enrubannage (sèche bien, tige plus fine). « Il est bien consommé par les animaux. »

(1) Sur environ 130 ha, avec maïs, luzerne, céréales, méteils, trèfle bisannuel, prairies. 75 vaches montbéliardes.

Le millet perlé, à redécouvrir ?

Vraie plante du sud, le millet est plus coûteux que le moha, mais présente des atouts en termes de rendement et de qualité.

Pennisetum glaucum est une graminée annuelle estivale, originaire du Sahel. Elle valorise très bien la chaleur et, une fois bien implantée, elle serait peu exigeante en eau, comme le sorgho. Son système racinaire est puissant et restructure bien les sols. Il ne pousse qu’à partir de 14 °C.

Contrairement au moha, il est déconseillé de le semer dans les départements au nord de la Loire ou en altitude. « Son besoin en températures étant élevées et son cycle étant plus long, s'il est semé trop tard en saison, le potentiel de rendement est vraiment moindre. Le semis doit être réalisé avant début juin à début juillet », souligne Cédric Pasquier, de Cérience.

Il est moins cultivé que le moha aussi parce que son coût d'implantation est plus élevé ; même quand il parvient à produire davantage que le moha, comme ce fut le cas dans les essais menés à la ferme expérimentale des Bordes (Indre) en 2019 et 2020.

Des rendements de 3 tMS à plus de 5 tMS

Sur une plateforme 2018 dans le Gers, le millet perlé a fait 4,5 à 5 tMS/ha (semé le 25 juin). Aux Bordes en 2019, il a fait près de 3  tMS/ha dans la partie la moins séchante de la parcelle expérimentale, équivalent au sorgho Piper. En 2020, dans une zone un peu plus séchante de la parcelle expérimentale, il ressort à plus de 5 tMS/ha, soit moins que le blé égyptien et le sorgho, à peu près équivalent au moha et à la modalité teff grass qui a été cultivée dans une zone moins séchante de la parcelle. 

Une plante adaptée au pâturage

Le millet perlé péfèrerait les sols sableux, limoneux sableux, « où il sort des rendements équivalents au sorgho. Il vient moins bien sur les sols lourds, où les rendements sont inférieurs au sorgho », résume la chambre d'agriculture du Gers.

Il est conseillé de le faire pâturer avant 60 cm de hauteur pour favoriser le tallage. « Il faut pâturer à partir de 30 cm. Et ne pas pâturer ou faucher en dessous de 15 cm, pour ne pas pénaliser la repousse », conseille la chambre d'agriculture du Gers. Aux Bordes, il a été moins bien pâturé que le moha. Peut-être à cause d'un effet stade, car des observations dans d'autres départements montrent qu'il se pâture bien.

Aux Bordes, le millet perlé a valorisé la fertilisation (50 UN, deux semaines après le semis). Il a atteint 0,77 UFL (+0,11 points par rapport à 0 UN) et 17,7 points de MAT (+4,5 points). Mais Patrick Pellegrin, d'Adice conseil en Isère, le trouve décevant : « Dans nos parcelles d'essai, il ne fait pas mieux qu'un moha en rendement et il donne de moins bonnes valeurs alimentaires. »

Du côté de la sélection, Semental propose un nouveau millet perlé, de type BMR, donc avec potentiellement une meilleure valeur alimentaire, mais plus cher.

Les plus et les moins

les +

Repousse

Possède une très forte capacité de tallage

Épiaison tardive

Plus souple d’utilisation que le sorgho fourrager : pas d'acide cyanhydrique

S'enrubanne bien

Les -

Semence plus chère que le moha

Pas adapté aux régions où il fait trop froid en mai et juin

Seul ou accompagné ?

Les associations sont plus coûteuses. Or, les légumineuses ne parviennent pas toujours à s'exprimer.

Pour améliorer l'appétence et la valeur protéique, le moha et le millet perlé peuvent être associés à des trèfles annuels : trèfle d'Alexandrie, trèfle de Perse ou trèfle vésiculé. Cela peut permettre un pâturage derrière une première exploitation. Mais quand il fait trop chaud et sec, le trèfle n'y arrive plus. « Autant le faire en pur », estime Patrick Pellegrin, d'Adice conseil en Isère.

À la ferme expérimentale des Bordes (Indre), des associations moha avec lablab, ou avec cowpea, ou avec un ou deux trèfles annuels, ont été comparées. « En 2019, seul le cowpea a vraiment produit. En 2020, dans ces associations, aucune légumineuse n'a vraiment donné », résume Carole Gigot, de la ferme des Bordes. L'Inrae de Nouzilly (Indre-et-Loire) en 2020 a testé une association moha, cowpea et lablab, mais les levées ont été insuffisantes et aléatoires, et le rendement de 1,3 tMS/ha pour deux cycles d'exploitation.

Le moha et le millet perlé peuvent aussi être associés à de la vesce velue très précoce ou du pois fourrager de printemps (pour la fauche). L'association millet et vesce velue a été décevante sur les plateformes d'observation en Nouvelle-Aquitaine en 2019 et 2020. Il faudra encore suivre ces associations avant de conclure.

Les plus lus

<em class="placeholder">Nathalie et Michel Daguer, éleveurs en Mayenne avec leurs vaches</em>
Pâturage hivernal : « Nous ne voyons que des bénéfices dans notre élevage en bio et en monotraite en Mayenne »

Le Gaec du Ballon en Mayenne, en bio et en monotraite, profite de conditions pédoclimatiques privilégiées pour pâturer en…

<em class="placeholder">guillaume rivet, éleveur dans les deux-sèvres</em>
Organisation du travail : « Nous avons robotisé la traite pour anticiper le départ à la retraite de mon père dans les Deux-Sèvres »

Le Gaec Privalait, dans les Deux-Sèvres, tourne entre mère et fils depuis bientôt deux ans. La robotisation de la traite, en…

<em class="placeholder">« L’herbe pâturée est la plus économique car, plus il y a de stock, plus les charges de mécanisation augmentent », soulignent Sébastien Le Goff et Julie Sylvestre.</em>
Diagnostic de système fourrager : « Nous avons prouvé la résilience de notre élevage face aux aléas climatiques dans le sud du Morbihan »

Au Gaec de Coët Cado, dans le Morbihan, pour s’assurer de la résilience de leur système fourrager aux aléas, les associés ont…

Carte de la zone régulée FCO3, en date du 19 décembre 2024.
FCO 3 : fin décembre, la maladie continue de progresser

À date de jeudi 19 décembre 2024, le ministère de l'Agriculture annonce 8 846 cas de fièvre catarrhale ovine sérotype 3.…

<em class="placeholder">Brice Minot, Vincent Colas et Cyrille Minot, trois des quatre associés du Gaec des forges, en Côte-d&#039;Or</em>
Élevage laitier : « Nous cherchons de la productivité et de l’autonomie pour rentabiliser nos installations en Côte-d’Or »

Au Gaec des forges, en Côte-d’Or, les associés ont robotisé pour mieux organiser le travail. La recherche d’un bon prix du…

Selfie de Yohann Allain dans son champ avec ses vaches laitières.
« J’espère que mon salarié deviendra mon associé sur mon exploitation laitière en Loire-Atlantique »

À la SCEA du Chêne Vert, en Loire-Atlantique, après le départ à la retraite de son père, Yohann Allain a modernisé sa salle de…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière