Hors frontières
Produire du lait de vache sans vache !
Une première laiterie cellulaire a vu le jour en Californie.
Une première laiterie cellulaire a vu le jour en Californie.
Il est désormais possible de produire du lait de vache sans vache. Ceci grâce à la découverte de la technologie CRISPR-Cas 9 par deux chercheuses française et américaine qui ont fabriqué un « ciseau » à couper l’ADN. « La technique CRISPR-Cas 9 permet d’éditer des séquences d’ADN avec des ordinateurs à la manière d’un logiciel de traitement de texte, schématise Richard C. Delerins, anthropologue et codirecteur du Food 2.0 LAB Paris, intervenu lors de l’AG d’Isigny en mai dernier. Ces portions d’ADN de vaches sont insérées dans des levures dont on a ôté le noyau. Voilà le principe d’une laiterie cellulaire. Le lait n’a bien sûr pas la même diversité microbienne que votre lait, mais il est bien fabriqué à partir du matériel génétique de vache. » Une première laiterie cellulaire, Perfect Day, a déjà vu le jour en Californie. Si, pour le lait, il s’agit encore de travaux expérimentaux en laboratoire à des coûts exorbitants, la technique est très bien éprouvée aujourd’hui. « On sait produire de cette façon un médicament antipaludéen à très bas coût. Toute une série de produits sont fabriqués dans des fermes cellulaires, comme de la vanille ou de la bière. » Pour l’USDA, il ne s’agit pas d’OGM : " l’administration américaine considère ces produits comme naturels et ils ne seront pas régulés ».
Des milliards de dollars investis dans l'agriculture cellulaire
Une énorme machine économique s’est mise en place, et avec elle tout un discours éthique sur du lait sans souffrance animale, une production préservant la planète. Les fonds d’investissement de la Silicon Valley, qui avaient investi il y a dix ans dans Facebook, Uber, etc., ont désormais pour objectif le secteur du Food. Leur ambition est de créer des géants mondiaux de l’alimentation. « Dans l'informatique, les grandes vagues d’innovation sont passées… Les fonds d’investissements sont assis aujourd’hui sur des montagnes d’argent. » Les montants investis dans l’agriculture cellulaire atteindraient déjà plusieurs milliards de dollars.
« Votre façon de façon de produire du lait ne va pas disparaître pour autant, a expliqué Richard C. Delerins aux coopérateurs d’Isigny. Dans l’histoire de l’alimentation, les choses s’empilent les unes au-dessus des autres, comme un millefeuille. Aujourd’hui, on mange de la moutarde qui a été inventée au moyen âge, les nouvelles sauces ne l’ont pas fait disparaître. Les produits de l’agriculture cellulaire se feront une place dans les pratiques de consommation. Un peu comme ce qui s’est passé avec Danone et le yaourt : au début du XXe siècle, personne ne connaissait les yaourts et Danone était une petite entreprise. »