Un chiffrage des effets positifs liés au passage en bio
Les écarts entre bio
et conventionnels sont significatifs sur
le bilan des minéraux, les consommations d’énergie et l’efficience économique. Telles sont les conclusions de l'étude Cedabio
L’objectif de l’étude Cedabio(1) était d’évaluer si les systèmes d’élevage biologiques sont plus durables – sur le plan environnemental, social et économique – que les systèmes conventionnels comparables. « Nous sommes convaincus que oui, mais il fallait l’évaluer avec des indicateurs, sur les émissions de gaz à effet de serre, les résultats économiques, la biodiversité… », indique Olivier Ranke, président de l’Itab.
Cette étude nationale a été menée pendant trois ans (2009 à 2011) sur deux stations expérimentales et 144 élevages bovins, dont 96 en lait, la moitié en conventionnel et la moitié en agriculture biologique. « Nous avons constitué des binômes « conventionnel/bio », proches dans leur dimension, contexte pédoclimatique et main-d’œuvre, souligne Jérôme Pavie, de l’Institut de l’élevage. L’idée est de comparer des bio avec des conventionnels comparables, c’est-à-dire susceptibles de passer en bio, et donc de voir les effets d’un passage en bio. »
1 - Un bilan des minéraux plus favorable en bio
L’étude a confirmé les écarts pressentis en faveur de l’agriculture biologique, en raison de la plus faible part d’intrants (fertilisation minérale, alimentation). « Et cela même vis-à-vis d’exploitations en conventionnel peu intensives », souligne Hélène Chambaut, de l’Institut de l’élevage. En intégrant la fixation de l’azote par les légumineuses, les écarts restent significativement plus faibles en bio. Les systèmes bio comportent davantage de prairies dans leur SAU et de moindres chargements sur la SFP, ce qui limite les risques de pertes.
2 - Les bio font jeu égal avec les conventionnels sur les GES
« L’étude contredit l’idée selon laquelle le passage en bio dégrade le bilan GES (gaz à effet de serre), du fait qu’il faut plus de vaches (donc plus de méthane issu du rumen) pour produire le même volume de lait, souligne Hélène Chambaut. Globalement, si les systèmes biologiques apparaissent plus émetteurs (en GES bruts), leur capacité de stockage (prairie principalement) et leurs pratiques (pâturage maximum) permettent de compenser les différences pour les situer au final au même plan que leurs homologues conventionnels. »
« À dimension d’exploitation similaire, la moindre intensification du système fourrager permettant d’allouer davantage de place aux prairies et d’augmenter l’autonomie, réduit les impacts de l’élevage sur le milieu, notamment l’eutrophisation par hectare de SAU », souligne Hèlène Chambaut.
3 - Une consommation d’énergie moindre en bio
La dépendance énergétique est plus faible en bio, y compris à l’unité de produit, « alors qu’on pensait que ramenées au litre de lait, les consommations seraient équivalentes ». L’écart entre bio et conventionnel s’explique, au niveau de l’atelier lait, par une absence de fertilisation minérale achetée, moins de fourrages et de concentrés achetés, une part de cultures autoconsommées dans la surface en cultures doublée. On note aussi une moindre consommation de carburants et lubrifiants (moins de maïs). En revanche, ramené au litre de lait, les consommations d’énergie liée aux concentrés peinent à se diluer dans le volume produit en bio.
Les écarts entre les « économes » et les « dépensiers » sont de 50 % en lait, en bio comme en conventionnel. Il existe donc encore des marges de progrès pour réduire les consommations d’énergie dans tous les systèmes.
« Les bonnes performances des fermes bio de cette étude sur les flux d’azote, de phosphore et carbone ne dégradent pas d’autres volets environnementaux. Les traitements phytosanitaires et pharmaceutiques sont moindres en bio », précise Hélène Chambaut. Les résultats concernant les traitements sanitaires feront l’objet d’un article dans le prochain numéro.
Par contre, l’étude n’a pas relevé de différences significatives sur la biodiversité et le bien-être animal. Mais les méthodes et indicateurs demandent encore à être travaillés.
(1) Institut de l’élevage, Itab, Fnab, chambres d’agriculture, Inter Bio Normandie, GAB, station expérimentale Inra de Mirecourt…
De meilleurs résultats économiques… mais attention !
La viabilité économique est significativement meilleure en bio qu’en conventionnel, grâce à une meilleure efficacité technique et économique. « Seules trois années ont été étudiées (2008 à 2010), mais sur dix ans, on observe les mêmes tendances. La rentabilité est égale sinon meilleure en bio », souligne Jérôme Pavie, de l’Institut de l’élevage.
Les systèmes bio s’en sortent bien, malgré une productivité moindre et des coûts de production supérieurs, grâce notamment à un prix du lait élevé en bio. Un constat qui amène les participants à l’étude à mettre en garde les éleveurs. « On observe une tendance à la hausse des coûts de production en bio. Si le prix du lait ne se maintient pas en bio, cela risque de faire mal ! »