« Nous misons désormais autant sur l’herbe que sur le maïs »
Le Gaec de Minuet, en Haute-Marne, a introduit des prairies temporaires intensives dans son système, ainsi que des couverts d’été et d’hiver. Les associés améliorent la conduite de l’herbe et du pâturage pour mieux valoriser cette ressource fourragère.
Le Gaec de Minuet, en Haute-Marne, a introduit des prairies temporaires intensives dans son système, ainsi que des couverts d’été et d’hiver. Les associés améliorent la conduite de l’herbe et du pâturage pour mieux valoriser cette ressource fourragère.
Installé il y a cinq ans sans reprise de foncier, Benoît Lechêne a remplacé son père dans le Gaec familial situé à Vaudrecourt en Haute-Marne. À l’époque, l’exploitation comptait 90 laitières. Aujourd’hui, avec son frère Marc, ils sont à la tête d’une structure de 188 hectares, 130 vaches montbéliardes à 9 000 kg de moyenne laitière, 13 vaches allaitantes, plus des taurillons et des femelles croisées. « Auparavant, nous élevions tous les animaux qui naissaient sur la ferme mais ce n’est plus possible, explique Benoît. Avec l’augmentation du cheptel laitier, nous ne sommes plus autonomes, ce qui nous contraint à recourir aux coproduits (corn gluten et pulpes surpressées). Nous savions qu’il nous faudrait modifier notre système de production pour retrouver davantage d’autonomie, mais l’évolution du climat et les sécheresses à répétition ont vraiment accéléré les choses. »
D’où la décision d’arrêter cette année les vaches allaitantes et de bloquer l’élevage à 40 taurillons et 20 génisses par an. « En réduisant les effectifs de l’atelier viande, cela nous donnera déjà plus de souplesse pour nourrir nos génisses laitières, notamment avec du foin », espèrent les éleveurs.
Le système fourrager a connu diverses évolutions ces dernières années. La part d’ensilage de maïs dans la ration des laitières est passée de deux tiers à la moitié au profit de l’herbe. « Avec sa richesse en amidon, le maïs reste un fourrage qui assure la sécurité énergétique et on n’imagine pas faire sans. Mais avec des rendements plus irréguliers, ce n’est plus la garantie que c’était, même dans nos terres à bon potentiel. » Les rendements se limitent à 11 tMS de moyenne, au lieu des 13-14 tMS/ha habituels. C’est pourquoi, le Gaec n’a pas augmenté la sole de maïs malgré ses 40 vaches supplémentaires à nourrir, et préfère miser davantage sur l’herbe même si la dynamique de pousse a également changé. « Désormais, on arrive à faire du regain seulement dans nos meilleures prairies et l’herbe manque cruellement l’été. Par contre, la pousse démarre de plus en plus tôt dans la saison, on fait de très bonnes coupes de printemps et il y a aussi plus de repousses d’automne. »
Les prairies à base de mélanges suisses produisent 11 tMS/ha
Pour améliorer la productivité des prairies naturelles dégradées, les éleveurs les sursèment avec une herse à prairie. En parallèle, 9 hectares de prairies temporaires (de 2,5 ans) à base de mélanges suisses ont été semés après blé à raison de 30 kg/ha et intègrent désormais la rotation. Le mélange qui fonctionne le mieux comporte 39 % de trèfle violet (diploïde et tétraploïde), 24 % de ray-grass hybride et 37 % de RGI. Ces prairies produisent autant de tonnage que le maïs, soit 11 tMS/ha de moyenne - voire même 13 tMS/ha une année - en cinq coupes, principalement sous forme d’enrubannage (15,8 % MAT, 0,89 UFL).
« Le mélange coûte 7,15 €/kg mais la qualité est au rendez-vous. On voit nettement la différence en lait quand ce fourrage est distribué aux laitières », relève Benoît. À l’avenir, les éleveurs aimeraient tester une composition plus pérenne intégrant le même mélange mais en ajoutant 45 % de luzerne et 5 % de dactyle.
L’exploitation des prairies est plus précoce
« Sur les prairies intensives, au lieu de faire une coupe d’ensilage mi-mai, je privilégie deux coupes (mi-avril et fin mai) avant qu’il ne fasse trop sec. Le choix de l’enrubannage nous permet d’optimiser le stade selon les parcelles, en multipliant des chantiers de petite surface. » Les éleveurs récoltent aussi une partie des prairies permanentes en ensilage à l’autochargeuse autour du 1er mai. Là encore, ils interviennent quinze jours plus tôt qu’avant « pour pouvoir remettre les animaux sur les parcelles avant le 1er juillet ».
Côté fertilisation également, les pratiques ont changé. Les prairies reçoivent du compost issu du séparateur de phase à l’automne. Du lisier est épandu (20 m3/ha) est apporté en fin d’hiver sur les prairies naturelles. « Cela donne un bon coup de fouet ! Les prairies de fauche (sauf celle destinées au foin) reçoivent aussi du lisier après la première coupe ainsi qu’un engrais soufré au printemps (250 kg/ha). »
Une gestion plus technique du pâturage limite le gaspillage
La gestion du pâturage, elle aussi, a été complètement revue grâce aux échanges au sein du GIEE Pâturage-Lait d’avenir auquel participe Benoît depuis quatre ans. Davantage de prairies naturelles sont allouées au pâturage (26 ha au lieu de 19), et les vaches tournent désormais sur dix paddocks de 2,5 ha au lieu de quatre grandes parcelles. « Nous arrivons à sortir les vaches autour du 20 mars, soit presque un mois plus tôt. Certes, la pousse est plus précoce, mais le fait d’avoir créé des chemins facilitant l’accès et d’avoir multiplié les parcelles, y contribuent aussi. Avec un temps de séjour de deux jours, on a moins peur d’abimer. »
Même si le pâturage se limite à 23 ares/VL, la conduite plus technique réduit le gaspillage d’herbe. Benoît a investi dans un herbomètre et suit de près les jours d’avance. « J’arrive à débrayer un à deux paddocks par an. Même si je ne récolte que vingt bottes d’enrubanné, c’est toujours ça de pris. » Avec le changement de conduite, la flore prairiale s’améliore. « On voit plus de trèfle, les prairies sont plus homogènes, et il y a moins de houlque laineuse. »
Des couverts fourragers incontournables
Les couverts d’été sont irréguliers en rendement. « Cela va du simple au triple. L’an dernier, on n’a rien récolté. Mais certaines années, ça nous a bien aidés de pouvoir sortir 3 tMS/ha. » À base de vesce d’été, d’avoine brésilienne et pois de printemps, ils sont riches en protéines (14 à 20 % MAT).