Malgré la loi Egalim 2, les négociations entre les organisations de producteurs et les industriels laitiers restent compliquées
Si les lois Egalim 1 et 2 visent à renforcer le pouvoir de négociation des producteurs, force est de constater que sur le terrain, la réalité est tout autre.
Si les lois Egalim 1 et 2 visent à renforcer le pouvoir de négociation des producteurs, force est de constater que sur le terrain, la réalité est tout autre.
« Mutisme » des industriels, dénoncent des organisations de producteurs laitiers. « Radicalisation » de certaines OP, répondent des transformateurs. Les points d’achoppement continuent donc entre laiteries et OP. Même celles qui ont signé des contrats qui leur paraissaient satisfaisants jusque-là éprouvent des difficultés à faire prendre en compte les coûts de production, la hausse des charges ou encore à supprimer les clauses d’alignement concurrentiel.
Ces dernières sont pourtant interdites par la loi Egalim 2. « Les grands groupes sont en train de voir pour enlever la clause d’alignement, témoigne Yohann Barbe, trésorier de la FNPL. Mais si c’est pour intégrer le prix du lait France publié par FranceAgriMer, cela n’aura aucun intérêt. » « On sait que les industriels privés sauront trouver la bonne formule qui leur permettra d’avoir des effets similaires », renchérit Thierry Roquefeuil.
Des lignes rouges
« La DGCCRF nous surveille de près », assure pourtant Fabien Choiseau, directeur approvisionnement France chez Lactalis. Le groupe est en cours de négociation avec l’Unell. Mais les négociations avec l’entreprise restent compliquées et nécessitent des échanges au mois le mois. L’AOP est parvenue à convenir, au dernier moment, d’un prix de base pour mars de 404 euros pour 1 000 litres et doit encore travailler sur une adaptation de sa formule de prix.
D’autres OP se retrouvent dans une impasse, à l’image des adhérents de l’OP Sill Malo, fournisseurs du groupe breton Sill, qui « se sont vu notifier par leur client une décision unilatérale de baisse de 10 euros pour 1 000 litres du prix d’achat du lait ». « Le groupe abuse de sa position dominante pour imposer un prix du lait qui s’aligne sur le moins-disant et qui reste la variable d’ajustement des charges industrielles », regrette l’OP.
Dans l’Est, l’Oplase, dont les producteurs livrent à la coopérative Eurial, se retrouve contrainte de saisir le médiateur des relations commerciales. « Après le non-renouvellement de l’accord-cadre avec une échéance au 31 décembre 2021, c’est maintenant sur la formule de prix devant respectant la loi Egalim 2 que persistent des points de discordes », explique l’OP.
Une nouvelle instance
La médiation est un prérequis nécessaire avant toute saisie d’un juge. Sa durée est désormais limitée à deux mois. En cas d’échec, la loi Egalim a créé le comité de règlement des différends commerciaux agricoles qui agit comme une instance d’arbitrage. Marie-Thérèse Bonneau, ancienne vice-présidente de la FNPL, en est un membre titulaire.
« Il faut aller chercher rapidement le comité de règlement des différends commerciaux agricoles pour vérifier que les accords sont dans les clous », prône le syndicaliste Yohann Barbe, prévenant que ce comité peut « aussi sanctionner les OP » mais « souvent, ce sont les entreprises qui ont tort ».
Le conflit entre Sunlait et Savencia s’enlise
Juste après le Salon de l’agriculture, la laiterie Savencia a dénoncé, deux ans avant sa fin, le contrat qu’elle avait avec l’association d’organisation de producteurs Sunlait(1). Cette dernière avait assigné le transformateur en justice en septembre 2021, pour non-application de la formule de prix de son contrat depuis début 2020. « Cela ne change rien pour l’audience (le 24 mars). Ce n’est pas une surprise, indique Denis Berranger, vice-président de Sunlait. Nous entrons à présent dans deux ans de négociation pour trouver un accord sur une formule de prix. Dans le courrier qu’ils nous ont envoyé, ils précisent qu’ils ont besoin de notre lait. »