Les ventes de produits laitiers équitables augmentent dans un rayon en recul
Malgré l’inflation, les ventes de produits laitiers équitables continuent de progresser en magasin. Les consommateurs répondent présent pour soutenir les éleveurs français.
Malgré l’inflation, les ventes de produits laitiers équitables continuent de progresser en magasin. Les consommateurs répondent présent pour soutenir les éleveurs français.
Alors que l’inflation sur les produits laitiers a atteint 8,5 % en 2022, entraînant dans son sillage une baisse des achats des ménages en France, les produits labellisés Commerce équitable poursuivent leur développement.
« Les produits laitiers sont une des catégories de produits alimentaires qui progressent le plus en Commerce équitable : + 25 % de ventes en 2022 par rapport à 2021 », se félicite l’association Commerce équitable France.
25 % de croissance pour les produits laitiers labellisés
Parmi la multitude de références se vantant de « rémunérer mieux » les éleveurs laitiers, ces produits labellisés commerce équitable pèsent finalement peu : 127 millions d’euros en 2022, pour un équivalent d’environ 98 millions de litres de lait de consommation. Car seuls les produits répondant au référentiel du Commerce équitable dont la définition légale est strictement réglementée, peuvent être labellisés (lire encadré ci-après).
Ils sont reconnaissables grâce aux labels privés qui y sont apposés : Fair for life, Agri éthique France, Bio équitable en France, Bio partenaire ou Max Havelaar.
C’est le cas, par exemple, des yaourts Les2Vaches sous label Fair for life, ou encore, du lait UHT de la marque de producteurs En Direct des éleveurs, sous label Agri éthique France.
En supermarché, les rayons de produits laitiers pullulent pourtant d’autres références présentant la mention équitable ou ayant trait à la rémunération des éleveurs, comme C’est qui le patron (CQLP) ou FaireFrance. Ces marques communiquent fortement autour du terme équitable et de la juste rémunération des producteurs, sans être labellisées.
Hausse pour CQLP à 85 Ml équivalent lait
La marque CQLP assure qu’aujourd’hui ses produits laitiers cochent les cases du cadre légal du commerce équitable. « Notre système garantit la juste rémunération des éleveurs et le respect d’un cahier des charges répondant à des attentes sociétales en matière d’environnement et de bien-être animal (quatre mois minimum de pâturage, alimentation garantie sans OGM…). Il est contrôlé par un organisme extérieur. Nous travaillons avec des éleveurs organisés en organisation de producteurs. Il y a des retours financiers supplémentaires aux producteurs pour des actions en faveur de la durabilité… », explique l’équipe de CQLP.
Cette seule marque talonne les ventes de produits laitiers labellisés commerce équitable. Les produits laitiers C’est qui le patron (laits, crème, fromage blanc, yaourt, beurres) représentent pas loin de 85 millions de litres équivalent lait vendus sur un an (chiffres arrêtés à septembre 2023).
Les laits de consommation pèsent pour 70 % des volumes. Les ventes de brique de lait conventionnel n’ont progressé que de 1 % en 2023, mais sur un rayon qui recule de 2,6 %. Les projections pour les mois à venir sont plutôt à +2 %.
« Le bio est en recul, à cause de l’inflation, mais aussi parce que les enseignes le mettent moins en avant. D’une façon générale, l’implication des magasins est essentielle dans la dynamique des ventes. »
Le prix du lait garanti aux éleveurs engagés dans le cahier des charges est de 540 €/1 000 l pour le lait conventionnel, de 565 €/1 000 l pour le lait bio destiné au beurre et de 590 € pour le bio du lait UHT (cahier des charges renforcé).
Hausse pour FaireFrance, avec un prix du lait à 540 €
De son côté, FaireFrance estime qu’elle aura vendu 18 millions d’unités en 2023 (laits, beurres, crème liquide). Les laits liquides (conventionnel, bio, entier, écrémé et demi-écrémé) représentent également le gros des volumes (80 %).
Les ventes sont globalement en progression, tirées par les laits UHT en conventionnel, malgré une baisse pour le lait bio (-20 %). « Nous avons répercuté nos hausses de coûts sur le prix de vente. Nous nous attendions à une baisse des volumes vendus, mais ils ont continué à progresser : environ +10 % cette année, pointe Jean-Luc Pruvot, président de la SAS FaireFrance. Les consommateurs restent fidèles. Ils continuent de nous soutenir car ils ont confiance en notre marque qui appartient aux éleveurs et pas à un grand groupe. » Les prix payés aux éleveurs partent des coûts de production des exploitations, calculés par un organisme indépendant. « Sur les ventes 2022, nous avons redistribué 7 €/1 000 l aux adhérents en moyenne, pour atteindre le prix objectif de 540 €/1 000 l. Dans le rayon, notre lait n’est pas beaucoup plus cher que les autres ; la différence c’est que la création de richesse revient davantage aux éleveurs adhérents. »
Le saviez-vous ?
Parmi les produits labellisés équitables « origine France », 51 % sont aussi des produits bio.
Les laits « justes et bons » européens intègrent le consommateur
La 8e conférence du lait équitable européen, organisée par FaireFrance et EMB (European milk board), avait lieu en France. « Nos produits laitiers ''justes et bons'' montrent que rémunérer correctement les éleveurs laitiers, c’est possible », ont scandé les représentants de différentes structures de « lait équitable » en Europe, structurées autour de l’EMB, un syndicat européen qui défend la régulation des volumes en fonction de l’état des marchés laitiers, et avec une même identité visuelle : la vache Justine.
Dans les pays avec de l’expérience et une forte présence sur le marché, leurs produits intègrent également des engagements de durabilité (pâturage, taille familiale…) et les consommateurs sont associés à la démarche. Ce qui n’est pas encore le cas en France.
• En Allemagne, Die Faire Milch est porté par une coopérative qui a pour membres des éleveurs et des consommateurs. Ensemble, ils ont défini un cahier des charges : alimentation non OGM, pas de déforestation importée, alimentation européenne, un chargement de 2,5 UGB/ha maximum pour une garantie de lien au sol.
• En Belgique, Fairebel est porté par une coopérative qui compte 500 agriculteurs et plus de 1 500 consommateurs détenant des parts et ayant un droit de vote. « Cette année, 11,5 millions de litres de lait vendus sous la marque, soit plus de 1 litre par habitant. Le beurre est fabriqué par un petit transformateur qui demande du lait de pâturage belge. Alors que la consommation de lait baisse, nos ventes progressent encore : nos clients restent fidèles, avec une philosophie d’achat », détaille Erwin Schöpges, président de Fairebel.
• Au Luxembourg, D’fair Mëllech est très présent sur le marché. « En 2017, nous avons vendu l’équivalent de deux produits équitables par habitant. Notre objectif est de monter à quatre », chiffre Danielle Warmerdam, présidente de Fairmellech. Là aussi, la prise en compte des attentes sociétales mobilise les éleveurs : « Nous faisons notre bilan carbone et le résultat des ventes participe à accompagner les éleveurs dans la réduction de leur empreinte carbone. »
• En France, « avec plus de 1 000 animations par an en magasin réalisées par les éleveurs adhérents, nous nous rendons compte que les consommateurs sont avec nous, rappelle Jean-Luc Pruvot, président de FaireFrance (350 éleveurs laitiers). Bientôt, nous intégrerons des consommateurs dans la SAS. »
Le commerce équitable, un concept global
Les labels Commerce équitable répondent à la définition légale du commerce équitable encadrée par la législation française. Elle englobe bien plus que la simple notion de rémunération des producteurs, bien que celle-ci reste centrale.
Pour qu’un produit soit équitable, il faut :
• un prix juste et rémunérateur pour les agriculteurs, défini à partir des coûts de production ;
• un partenariat commercial dans la durée ;
• le renforcement des organisations de producteurs (OP, coopérative, SAS d’agriculteurs) avec une gouvernance démocratique ;
• le versement d’un montant supplémentaire aux producteurs pour financer des projets et des dynamiques collectives ;
• la transparence et la traçabilité des filières ;
• la sensibilisation des consommateurs à des modes de production socialement et écologiquement durables ;
• la valorisation des modes de production respectueux de l’environnement.
Les partenaires de ces filières sont contrôlés par des organismes indépendants.