Qu’apporte le fait d’être un groupe polyvalent ?
Philippe Leseure, responsable des filières agricoles LSDH : "Le groupe, c’est six usines, pour fabriquer du lait UHT et de la crème liquide UHT, des jus de fruit, des eaux aromatisées, des boissons énergisantes, des soupes, et depuis peu des crudités ensachées. L’intérêt de la polyvalence est que certaines années, certains secteurs compensent d’autres moins performants. LSDH n’est pas une société cotée en Bourse, contraintes à la distribution de dividendes aux actionnaires. C’est une société familiale. Et cela a toute son importance. L’objectif d’Emmanuel Vasseneix, PDG du groupe, est de faire vivre les producteurs et les salariés, et de continuer d’investir."
À quelle problématique la laiterie est-elle confrontée ?
P. L. - "Il n’y a pas de réelle problématique dans l’immédiat. Nous sommes en phase de développement sur les laits différenciés déjà lancés, et nous projetons d’en lancer un nouveau. La dynamique de désengagement des laits premiers prix se poursuit donc. Ils représentaient deux tiers de notre collecte en 2005. Ils ne pèsent plus qu’un quart de la collecte.
Nous avons longtemps été déficitaires et nous devions acheter du lait sur le marché spot. Aujourd’hui, nous sommes arrivés à un équilibre entre notre collecte et nos besoins de transformation, sur l’année. Nous sommes passés de 80 millions de litres collectés en 2005 à 250 millions de litres. Cette stratégie d’autosuffisance vise deux objectifs : maîtriser l’origine du lait ce qui est essentiel pour valoriser des laits différenciés, et ne plus être dépendant de la volatilité du marché spot. Vu les perspectives de consommation mondiale, d’ici dix-quinze ans, on manquera de lait et le prix flambera sur le spot.
Notre collecte s’est étoffée, mais sur 14 départements (9 départements en 2012) ! Notre problématique première reste d’optimiser les tournées de collecte pour éviter l’explosion des coûts, et de couvrir les coûts grâce à la valorisation du lait. Nous continuons aussi d’inciter les éleveurs à produire de façon plus linéaire sur l’année. Nous avons encore un écart de 20 % entre le mois le plus creux où nous sommes déficitaires et le pic de collecte où nous sommes excédentaires.
Notre situation géographique, dans une région en déprise, n’est pas qu’un handicap. Nous ne sommes pas loin de l’Ile-de-France, un fantastique bassin de consommation en demande de laits différenciés."
Quelle est votre stratégie de différenciation ?
P. L. - "La LSDH développe des laits différenciés avec des partenariats, soit avec nos producteurs adhérents à l’APLBC, l’organisation de producteurs transversale de la région Centre, soit avec des producteurs extérieurs (Biolait, CantAveyLot, Lait équitable), soit avec des distributeurs (Monoprix, Auchan, Lidl, Système U). Certains sont en contrat tripartite, comme notre première expérience avec Biolait et Système U en 2011 pour le lait bio à marque U. L’intérêt du tripartite est une meilleure lisibilité sur les prix. Avec le tripartite, je vais dans le box de négociation avec un représentant de producteurs : la relation commerciale avec la distribution est complètement différente !
Nous réussissons à faire de la valeur ajoutée grâce aux contrats tripartites et surtout grâce aux laits différenciés et sous cahiers de charges. Car la grande distribution en demande, et depuis la crise laitière elle veut montrer qu’elle participe à la solidarité envers les producteurs.
Les laits différenciés répondent à une promesse ou plusieurs à la fois : lait régional, solidaire, santé (Bleu Blanc Cœur), bien-être animal, sont pour l’instant les quatre promesses traitées. Certains laits s’appuient sur un cahier des charges : pour le bien-être animal, et/ou Bleu Blanc Cœur (BBC)."
Que fait la laiterie pour être encore là demain ?
P. L. - "Nous poursuivons cette stratégie de répondre de façon pointue à nos partenaires et clients. Le 7 juin sera signé un nouvel accord tripartite avec Mc Donald. Il s’agit d’un contrat de trois ans, sans cahier des charges particulier, avec un prix garanti à 350 euros/1 000 l.
Nous devons reprendre la communication sur le lait régional Ile-de-France, issu de trois grandes fermes collectées par LSDH, pour développer les ventes et donc la valorisation du lait.
Nous sortirons un lait de la Bresse, qui répondra à quatre promesses : solidaire, santé (BBC), bien-être animal et régional. Là aussi, les 390 euros/1 000 l seront payés sur les volumes vendus. Il sortira quand nous aurons assez de lait pour fournir à la fois C’est qui le patron et ce nouveau lait.
Les enseignes veulent du lait de vaches nourries sans OGM. Notre objectif est d’être prêt pour lancer en janvier 2018, avec une enseigne, un lait issu d’une alimentation non OGM. Nous cherchons des éleveurs intéressés. La prime sera de 10 euros/1 000 l, ce qui correspond au surcoût lié à la substitution du soja classique par du non OGM.
La thématique environnementale monte également. La distribution demande si on peut travailler sur les critères consommation d’énergie, énergie renouvelable, empreinte carbone.
Aujourd’hui, les laits sous contrat représentent environ 50 % de la collecte. L’objectif est d’augmenter encore cette proportion."
Augmenter encore la proportion de laits sous contrats