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Le Gaec Beauchêne a pu redresser sa situation

En situation délicate suite à différents aléas, le Gaec Beauchêne(1) a construit un plan d’actions technique et financier permettant de passer ce cap difficile.

Créé en 1998 par l’association d’un couple et d’un tiers, le Gaec Beauchêne, en Loire-Atlantique, a fortement évolué depuis, suite notamment à l’installation de Yannick(2), le fils du couple, en 2001. Les bâtiments existants étant vétustes, un site complet a été créé en plusieurs étapes, avec logement des vaches laitières (112 logettes), salle de traite 2x10 postes, bâtiment génisses et vaches allaitantes, bâtiment taurillons, nurserie, fosse et fumière. En 2007, le Gaec comptait quatre associés, un salarié à mi-temps, 660 000 litres de lait, 40 vaches allaitantes, un atelier de 70 taurillons laitiers et 280 hectares de cultures de vente et d’herbe. « Le projet était cohérent, l’objectif étant de produire 900 000 litres de lait », assure Serge Dupé, directeur du Bureau commun d’accueil et d’orientation (BCAO). Le premier à-coup financier est survenu en 2007, avec le départ du tiers emportant 120 000 litres de lait, l’atelier de pré-gavage de canards et 50 hectares. « L’outil s’est alors trouvé surdimensionné, analyse Yannick. Les charges de structures étaient toujours là, mais avec 1/6e du lait en moins. Nous étions de plus en phase d’augmentation du troupeau allaitant. Il a fallu aussi nous réorganiser au niveau du travail en déléguant les labours et les semis. Et nous avons cherché à réduire les charges et à être plus performants techniquement, en regardant de plus près le prix des concentrés, en remplaçant un peu de soja par du colza, en développant le pâturage. » S’y est ajoutée la crise de 2008-2009, que le Gaec a malgré tout passée, mais qui n’a pas amélioré la situation. La deuxième phase difficile est intervenue en 2015. « Pour saturer l’outil, nous avons repris 400 000 litres de lait dans le cadre du plan de développement proposé par la laiterie. Mais les prix étaient bas. Puis, il y a eu la BVD sur les deux troupeaux, qui a entraîné des pertes importantes. Un jour, la banque nous a refusé un prêt de 15-20 000 euros, ce qui n’était jamais arrivé. Puis notre fournisseur principal nous a dit qu’il fallait revoir la situation.»

1 Se mettre autour de la table

En 2016, sur les conseils du comptable, le Gaec fait donc appel au BCAO. Une première réunion est organisée avec le comptable, les banques et le fournisseur pour poser un diagnostic et examiner les capacités de remboursement du Gaec. « Au plan technique, il n’y avait rien à redire, rapporte Serge Dupé. La situation était également saine en termes de capitaux et de fonds de roulement. Mais la trésorerie était mauvaise car le Gaec avait beaucoup autofinancé les deux cheptels. » « C’était d’autant plus rageant qu’aux plans technique et structurel, les diagnostics étaient bons », se rappelle Yannick.

2 Établir un diagnostic précis de chaque atelier

Le Gaec décide alors d’examiner la situation activité par activité. Le diagnostic lait, établi par Élevage conseil Loire Anjou, montre que la qualité du lait est bonne et les coûts maîtrisés. Le seul point noir est le manque de volume. « Pour compenser les pertes liées à la BVD, nous avions gardé de vieilles vaches, qui produisaient moins », explique Yannick. Le diagnostic en vaches allaitantes est également bon, avec là aussi un manque de produit lié à la BVD. L’examen de l’atelier taurillon révèle par contre que l’activité implique du temps et de l’argent mais dégage peu de marge, et des préconisations sont faites pour l’arrêter. Le diagnostic mécanisation établi par la FDCuma ne décèle rien de particulier. « L’analyse était donc que la situation était due à une insuffisance de produit et à l’accumulation d’aléas, résume Serge Dupé. Le principal facteur de redressement était d’atteindre les volumes, notamment en lait, en rachetant des vaches et en finissant d’épurer les problèmes liés à la BVD. »

3 Définir un plan de redressement et de remboursement des dettes

Un plan de redressement est défini, qui prévoit notamment d’acheter onze vaches pour un montant de 15 000 euros, pour optimiser le troupeau et augmenter la production de lait. La décision est prise aussi d’arrêter les taurillons. « Une difficulté supplémentaire dans ce cas était que les parents prennent leur retraite en 2019, souligne Serge Dupé. Le plan de redressement devait donc intégrer les charges liées à la transmission. » Un premier plan de remboursement des dettes sur dix ans est refusé, les banques ne finançant pas les dettes fournisseurs et le fournisseur jugeant l’étalement sur dix ans trop long. Un deuxième plan est alors élaboré, que les banques et le fournisseur acceptent pour éviter le redressement judiciaire. Les deux banques autorisent une pause des remboursements de un an pour tous les prêts moyen terme. Elles consentent aussi à financer l’achat des onze vaches et le fonds de roulement qui sert, avec la vente des taurillons et des céréales, à régler une partie de la dette fournisseur, avec deux ans de différé pour ces nouveaux emprunts. Enfin, le fournisseur accepte un étalement sur dix ans du restant de la dette, soit 110 000 euros.

4 Adapter les choix techniques

Pour produire plus de lait, le Gaec décide aussi d’abaisser à 24 mois l’âge au premier vêlage de toutes les génisses et de ne plus utiliser que des taureaux confirmés au lieu de taureaux génomiques, pour être sûr que les vaches produiront plus que leurs mères. Pour sécuriser le troupeau au plan sanitaire, ils choisissent de vacciner désormais tous les animaux contre la BVD et de ne plus acheter d’animaux, sauf éventuellement dans des élevages indemnes de BVD.

5 Revoir la gestion de la trésorerie

Le plan prévoit aussi une gestion rigoureuse de la trésorerie. « Nous établissons désormais sur un tableur un budget trésorerie sur douze mois au lieu de trois à quatre mois auparavant, précise Yannick. Les charges comme les changements de tracteur sont prévues à l’avance. Nous suivons aussi d’encore plus près les prix des engrais, aliments et céréales, pour acheter et vendre aux meilleurs moments. » Enfin, le choix est fait désormais de faire appel aux emprunts court terme pour les cultures. « Nous n’utilisions pas assez les outils disponibles », admet Yannick. Le protocole d’accord prévoit un engagement des exploitants à mettre en place les mesures définies et à informer les banques et le fournisseur de la situation.

À la fin de l’exercice 2017-2018, la situation s’est améliorée, avec une optimisation de la production par vache grâce aux vêlages précoces. Des ajustements ont toutefois dû être apportés au bilan comptable pour que le crédit-bail lié au renouvellement d’un tracteur ne dégrade pas ce bilan. Et pour 2018-2019, le prévisionnel montre également une amélioration des résultats, le seul point négatif étant lié aux mauvais rendements et à la qualité médiocre des cultures en 2018. « Mais, globalement, les résultats s’améliorent et les relations sont bonnes avec le fournisseur et les banques », assure Yannick.

(1) Nom d’emprunt.(2) Prénom d’emprunt.

 

Un accompagnement pour un coût limité

Le Bureau commun d'accueil et d'orientation (BCAO) est une structure associative d’accompagnement d’exploitations de Loire-Atlantique en situation de fragilité, présidée par la chambre d’agriculture. En 2017, elle est intervenue auprès de 90 exploitations, dont 74 % ont continué leur activité. Dans la moitié des cas, les difficultés sont liées à des raisons techniques. Mais pour 25 % des exploitations, la principale cause est la structure financière de l’entreprise. Grâce à un accompagnement du conseil départemental de Loire-Atlantique, du conseil régional des Pays de la Loire et des banques, le restant à charge pour le Gaec Beauchêne pour l’intervention du BCAO s’est limité à environ 1 000 €.

 
Bilan de la situation économique

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