Des réponses souvent complexes
Le casse-tête des phénomènes électromagnétiques
La mise en conformité des installations électriques est indispensable
pour se prémunir des courants parasites. La géobiologie
semble pouvoir apporter aussi des réponses. Non sans avoir d’abord
réglé les problèmes habituels d’élevage.
Les débats sur les phénomènes électromagnétiques et leurs effets sur les êtres vivants sont parfois vifs, tant les soupçons de nocivité mais aussi les questions sans réponse sont nombreux. Si les vaches pouvaient parler, nul doute qu’elles auraient aussi leur mot à dire. Néanmoins, elles s’expriment à leur manière. Par des comportements parfois curieux. Des vaches nerveuses, qui refusent de rentrer en salle de traite, de manger dans certaines zones de la stabulation, qui boivent en lapant... Mais aussi par des pathologies. Les courants parasites peuvent être à l’origine de mammites, de taux cellulaires élevés, d’infécondité...
Mais l’unanimité est loin d’être la règle sur ce qui se cache derrière ces phénomènes électromagnétiques invisibles, pas plus que sur les solutions à y apporter. Pour faire simple et sans doute un peu caricatural, on trouve d’un côté ceux qui, à l’instar du Groupe permanent de sécurité électrique (GPSE), s’en tiennent aux courants parasites provoqués par les installations électriques ; de l’autre, tout le domaine de la géobiologie qui s’intéresse aux effets du champ magnétique terrestre sur les animaux et à l’ensemble des perturbations électromagnétiques, celles-ci pouvant être véhiculées par les réseaux telluriques (failles, rivières souterraines...). Les premiers, souvent des scientifiques de haut niveau, à l’instar de François Gallouin, professeur émérite à AgroParisTech et président du GPSE, considérant souvent les seconds comme des « charlatans ».
Pourtant, difficile d’ignorer les résultats mis au crédit de la géobiologie sur le terrain, même si certains discours (voire certaines pratiques), très éloignés de la science conventionnelle, peuvent être déroutants et confinent parfois aux sciences occultes. « Il ne faut pas parler de problèmes électromagnétiques mais de problèmes électriques, estime Arlette Laval, professeur à l’école nationale vétérinaire de Nantes et membre du GPSE. Les champs magnétiques émis par Dieu sait quoi ne sont pas mesurables et ceux qui sont émis par les lignes à haute tension sont très faibles, de l’ordre du centième de la limite considérée comme acceptable par les experts de l’Union européenne. »
LES VACHES LAITIÈRES SONT TRÈS SENSIBLES
« Dans des conditions expérimentales rigoureuses et sur des animaux en excellent état sanitaire, l’ensemble de la littérature conclut à une absence de preuves scientifiques sur l’effet pathogène des champs électromagnétiques chez les animaux de laboratoire », ajoute le GPSE, qui reconnaît cependant qu’il « reste un certain nombre d’inconnues liées aux conditions très spécifiques des pratiques d’élevage ». Si leur effet direct est discuté, en revanche les champs électriques et magnétiques, qu’ils soient produits par des réseaux externes (électriques, télécommunications...) ou par des équipements électriques des exploitations, peuvent provoquer des tensions parasites anormales sur les parties métalliques des bâtiments (abreuvoir, cornadis, tubulure de la salle de traite..). Lorsque les animaux entrent en contact avec l’un de ces éléments métalliques, ils sont traversés par un courant électrique. Les vaches laitières, dotées d’un mufle humide et de quatre points de contact avec le sol, sont très sensibles à ces courants parasites.
PATHOLOGIES LIÉES AU STRESS
Ces courants peuvent être à l’origine de pathologies liées principalement au stress qu’ils provoquent. « Ces manifestations pathologiques concernent surtout la vache laitière, le fait que les réactions au stress vont ralentir, perturber la vidange, d’où les problèmes sur les cellules du lait observés par les éleveurs et les mammites », expliquait en janvier dernier le professeur Henri Brugère, de l’école vétérinaire de Maisons-Alfort, lors d’une audition de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, à propos des lignes à très haute tension. Des animaux incommodés par des courants électriques lorsqu’ils vont boire ou manger ne s’abreuvent pas et ne s’alimentent pas correctement, avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer (baisse de la production, difficultés de reproduction...). « Je crois aux problèmes électriques. C’est un paramètre important à prendre en compte, souligne Arlette Laval. Mais il ne faut pas tout leur mettre sur le dos parce d’autres facteurs peuvent entrer en jeu. Les problèmes électriques doivent être pris en compte si tous les autres points ont été éliminés et si on observe des troubles de comportement. »
INSTALLATION ÉLECTRIQUE EN ÉQUIPOTENTIALITÉ
Comment remédier à ces courants parasites lorsqu’ils sont en cause ? « La présence de tensions parasites susceptibles de perturber les animaux est le signe d’un dysfonctionnement ou d’une détérioration des installations, voire d’une carence », indique le GPSE. Et de citer les défauts d’isolement, les défauts de mise à la terre des masses métalliques, les rajouts intempestifs sur les installation électrique... François Gallouin rappelle que « depuis 1992, les exploitations agricoles sont soumises à une norme qui prévoit la mise en place d’une prise de terre tout autour du bâtiment avec un fil de cuivre enterré à un mètre de profondeur: la boucle à fond de fouille ». Mais une bonne mise à la terre n’est pas suffisante. Un maillage équipotentiel, relié à toutes les masses conductrices de l’exploitation et à la liaison équipotentielle des équipements électriques, est également indispensable. « Une fois que l’installation électrique est en équipotentialité, il n’y a plus de problème, assure Arlette Laval. Mais c’est très compliqué parce qu’il faut bien vérifier toutes les structures métalliques de la stabulation : portes, abreuvoirs, cornadis, charpente… » D’où l’invitation à rester « modeste » sur tous ces problèmes liés aux champs électriques et magnétiques.