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En dérobée, le cowpea plus prometteur que le lablab

Les dérobées estivales avec des légumineuses réputées résistantes aux stress thermique et hydrique ont souffert d'un été 2019 particulièrement chaud et sec.

Le cowpea (Niébé ici) associé au moha a produit une biomasse totale de 2 t MS/ha. © Ferme expérimentale des ...
Le cowpea (Niébé ici) associé au moha a produit une biomasse totale de 2 t MS/ha.
© Ferme expérimentale des Bordes

Pour s'adapter au changement climatique tout en améliorant l'autonomie alimentaire protéique, la ferme expérimentale des Bordes(1), dans l'Indre, a suivi onze bandes de dérobées estivales à vocation fourragère. Pour apporter des protéines, trois légumineuses ont été choisies pour leur capacité à pousser en conditions chaudes et sèches : trèfle de Perse ou d'Alexandrie, lablab ou cowpea. En association avec des graminées à cycle végétatif court et capables de pousser en situation de stress thermique et hydrique : sorgho multicoupe, moha, millet perlé.

Malgré la réputation de ces espèces, les résultats des légumineuses ont été faibles, ce qui laisse supposer que l'été 2019 a été trop chaud et sec pour elles. « Nos observations sont assez similaires avec celles d'autres plateformes expérimentales conduites par les chambres d'agriculture (Charente, Corrèze, Creuse, Dordogne et Haute-Vienne) », élargit Elodie Roget, d'Arvalis.

Des rendements pénalisés par les fortes chaleurs

La ferme expérimentale de Jeu-les-bois, dans l'Indre, a des sols limoneux sableux à tendance hydromorphe l'hiver et séchant l'été. Cet été 2019 s'est avéré particulièrement chaud et sec. « La pluviométrie a été faible. Seulement 58 mm de pluie dans les dix jours précédant le semis (le 13 juin) et 58 mm entre le semis et la dernière exploitation de la plateforme, le 19 septembre. La plateforme a présenté des levées hétérogènes et le développement des espèces semblerait avoir été impacté négativement par les températures élevées (une dizaine de jours à plus de 35 °C entre le 25 juin et le 25 juillet). »

Des levées pénalisées par le double semis

Pour les associations avec cowpea ou lablab, le semis s'est fait en deux passages. Pour les semis de graminées pures ou en association avec des trèfles, le semis a été effectué en un passage. Les graminées ont bien levé, mais elles ont été pénalisées en association avec le lablab, surtout le moha. « Le moha est une culture connue pour être sensible au tassement des sols, ce qui explique les difficultés de levées que cette culture a pu rencontrer en association au lablab. Pour les autres bandes en association avec le cowpea ou le lablab, les différences de densité à la levée ne peuvent pas être expliquées par l’unique présence des légumineuses. »

Pour les trèfles, les plantes étaient présentes en nombre (bonnes levées et début de pousse), mais elles ont été peu productives, pénalisées surtout par les fortes chaleurs, et concurrencées par des graminées au développement plus rapide. « On ne les a pas retrouvées dans les prélèvements de biomasse du 25 juillet, ni dans la première coupe début août. »

Développement insuffisant pour le cowpea et le lablab

Le lablab présentait une hétérogénéité spatiale et le cowpea présentait une bonne répartition sur les bandes. Cependant, leurs densités n’ont pas permis de participer à l’élaboration du rendement final des bandes. « En dérobée, elles ne sembleraient pas produire de fortes biomasses face à des températures élevées régulières et un manque d’eau sur plusieurs semaines ; comme toutes cultures ! »

La première coupe (début août) a fait plus de 90 % du rendement total de la production de la plateforme. Il y a eu très peu de repousses (15 mm de pluie après la 1re  coupe). Pour le sorgho seul : 0,41 t MS/ha. Suivi des associations avec millet perlé. Puis, les associations moha-lablab et moha-cowpea ont repoussé de 0,30 t MS/ha environ.

La question de la gestion de la fertilisation

La teneur en MAT du fourrage compense-t-elle le coût de la semence et de l'implantation ? « Nos résultats de valeur alimentaire n’ont pas été exploitables cette année, nous ne pouvons donc pas répondre », indique Elodie Roget.

Des travaux sont en cours en Nouvelle-Aquitaine (portés par Inrae) pour espérer trouver un inoculum, pour doper la capacité du cowpea et du lablab à capter l'azote atmosphérique. Ceci aurait un intérêt pour aider le développement de la plante, mais aussi pour la rotation. En attendant, la question de la fertilisation, notamment azotée, se pose. À Jeu-les-bois, les dérobées estivales ont été semées après une prairie de plus de 10 ans, très abimée par la sécheresse de 2018. Elle a été fertilisée en 2018 avec 16 t/ha de fumier. En 2019, elle a été pâturée par des génisses, puis détruite au glyphosate (4 l/ha) et elle n'a pas reçu d'autre apport fertilisant. « Le protocole mis en place n’a pas permis d’apporter d’informations concernant le développement du cowpea et du lablab sur des questions de fertilisation, notamment en azote. Avant tout, la pluviométrie est primordiale pour espérer une assimilation de l’azote », souligne Elodie Roget.

Fallait-il semer plus précocément pour viser plus de production ? En 2019, les semis n’ont pas pu être effectués en mai, en raison des conditions séchantes. Comme pour toute culture, l’implantation est primordiale. Pour les dérobées estivales, et notamment le sorgho, le sol doit être suffisamment réchauffé (12 °C) et le semis effectué à 3-4 cm de profondeur.

(1) Partenariat entre l’OIER des Bordes (4 chambres d’agricultures : 36, 18, 23 et 87) et Arvalis-Institut du végétal.

Le sorgho s'en sort le mieux

Le millet perlé fait des rendements intéressants, mais il est boudé au pâturage par les génisses charolaises. Pour le pâturage, une zone spécifique a été mise en place avant toute exploitation des bandes. Vingt génisses de 1 an ont été mises au pâturage durant trois jours. Elles avaient libre choix sur l’ensemble des bandes. Les animaux se sont d’abord orientés vers le sorgho, le moha puis les légumineuses, et en dernier lieu le millet perlé. « Ce problème d'appétence a été observé par un conseiller en Indre-et-Loire », ajoute Elodie Roget, d'Arvalis. Au bout des trois jours de pâturage, toutes les bandes étaient consommées et présentaient des pieds arrachés, sauf celles avec millet où elles se couchaient.

Du ray-grass d'Italie avait été semé autour de la plateforme ; le rendement est presque nul.

Pour 2020, le cowpea seul sera testé

La ferme expérimentale des Bordes reconduira une plateforme similaire avec 14 bandes en 2020. L’objectif est de semer plus tôt qu'en 2019, la seconde quinzaine de mai. Parmi les bandes, du maïs fourrage sera semé, seul et en association avec du lablab. Un cowpea seul sera implanté pour évaluer son comportement en pur et voir s'il peut produire un fourrage riche en MAT en été. Une bande composée de teff grass sera également mise en place. Les trèfles d'Alexandrie et de Perse ne seront pas testés à nouveau. La parcelle recevra 16 tonnes de fumier un mois avant l'implantation.

À savoir

En France, il a été constaté que les nodosités étaient absentes sur le lablab, et peut-être présentes sur le cowpea avec un précédent cultural de soja.

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