En Bretagne, des éleveurs en route pour la première AOP laitière 100 % fermière bretonne
Une poignée d’éleveurs bretons, fans de la bretonne pie noir, produisent du Gwell, un lait fermenté transformé à la ferme. Ils s’organisent depuis trente ans autour de leur marque. La démarche collective aura pour aboutissement l’obtention d’une AOP.
Une poignée d’éleveurs bretons, fans de la bretonne pie noir, produisent du Gwell, un lait fermenté transformé à la ferme. Ils s’organisent depuis trente ans autour de leur marque. La démarche collective aura pour aboutissement l’obtention d’une AOP.
Les producteurs de Gwell seront-ils bientôt les premiers éleveurs bretons engagés dans une AOP laitière bio et 100 % fermière ? C’est en tout cas ce à quoi ils travaillent depuis cinq ans. Pour comprendre leur engagement, un peu d’histoire. Dans les années 1970-1980, la race bretonne pie noir, peu productrice, décline. Pour sa survie, les éleveurs misent sur la vente en circuit court : « Nous avons retrouvé des recettes de lait fermenté, élaboré à la ferme à partir d’un ferment indigène, retrace Cédric Briand, éleveur. Nous nous sommes rendu compte que nous avions un trésor sous la main : un produit emblématique du terroir, autour duquel nous nous sommes structurés. » La recette trouve son nom, le Gwell, qui signifie « meilleur » en breton. « En 1993, la marque est déposée », date Cédric Briand, aujourd’hui coprésident de l’Association des paysans producteurs de Gwell (APPG).
Le Gwell est un lait fermenté, ensemencé par un ferment indigène, que se transmettent les producteurs entre eux. « Je produis 100 000 litres de lait, dont 15 000 litres sont transformés en Gwell et 60 000 litres en pâtes pressées fabriquées avec du Gwell comme ferment. » Aujourd’hui, treize éleveurs produisent 40 tonnes de Gwell, écoulées sur les marchés, à la ferme, dans la restauration collective, à Paris ou encore au festival de musique Hellfest.
En AOP, un collectif très soudé
En 2019, l’association s’ouvre aux autres races locales : la froment du Léon, l’armoricaine et la nantaise. Elle se rapproche de l’Inao pour obtenir un label. Si les éleveurs pensent d’abord à une STG, ils se mettent finalement en ordre de marche pour demander une AOP, plus protectrice.
Cinq collèges émergent : les producteurs de Gwell (13), les porteurs de projet (éleveurs déjà installés ou futurs, au nombre de 7), le comité de dégustation, les partenaires divers et les quatre associations de races. Le cahier des charges s’affine : production herbagère, alimentation (fourrages et concentrés) produite à la ferme ou sur le territoire, cinq départements (Côtes-d’Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine, Morbihan et Loire-Atlantique) et agriculture biologique. « Nous sommes tous en bio, c’est un état de fait. Le label bio devrait être intégré au cahier des charges pour éviter un double contrôle. »
« En AOP, nous avons besoin d’un collectif très soudé. C’est le label le plus protecteur mais il demande un investissement humain », poursuit Cédric Briand. Stanislas Lubac est donc engagé en tant qu’animateur. « En France, il faut compter dix à quinze ans pour obtenir l’appellation d’origine protégée », estime-t-il. Pas de quoi décourager la bande d’irréductibles Bretons qui espèrent bien obtenir la première AOP laitière bretonne créée avec une race qui a failli disparaître.
Des valeurs communes
La production de Gwell rassemble les éleveurs autour de valeurs : être attentif à l’environnement pour le préserver et le transmettre, promouvoir une agriculture rémunératrice et dynamisante pour le territoire. « Toutes nos fermes sont en circuit court avec un atelier de transformation. Chez moi, nous sommes trois associés et un salarié », place Cédric Briand. À côté de lui, Benjamin Henry, éleveur de l’APPG, corrobore : « Nous sommes quatre associés pour un troupeau de 30 vaches et 85 hectares. »