Aller au contenu principal

Dans l’Oise.
Deux troupeaux distincts sous le même toit

Pourquoi ne pas appliquer le principe de la mitoyenneté à l’agriculture ? Telle est l’idée de deux éleveurs picards qui ont construit une stabulation commune où chacun chez soi reste maître de son troupeau.

LE BÂTIMENT a été conçu selon une ligne de symétrie. Le troupeau de Louis Baclé, à gauche, est séparé de celui de Christian Bizet, à droite.
LE BÂTIMENT a été conçu selon une ligne de symétrie. Le troupeau de Louis Baclé, à gauche, est séparé de celui de Christian Bizet, à droite.
© S. Roupnel

Ils ne sont pas associés, seulement « voisins de palier ». Fin 2008, Louis Baclé et Christian Bizet mettaient en service leur bâtiment d'élevage commun à Auteuil, près de Beauvais. « Nous travaillons sous le même toit, mais nous sommes chacun propriétaire de notre moitié de stabulation, de notre quai de traite et de notre troupeau, précisent les deux éleveurs. Il s'agit ni plus ni moins d'une construction mitoyenne, telle qu'on en voit pour les maisons. » Le principal avantage, selon les deux éleveurs, est de ne pas avoir à gérer des points de vue différents, comme c'est parfois le cas entre associés. « Nous avons conservé notre individualité dans la prise de décisions. »

Le bâtiment a été construit à cheval sur le foncier de chacun des deux éleveurs, au coeur d'une trentaine d'hectares de pâtures. Une ligne de symétrie traverse la construction, séparant, côté nord, le troupeau et les installations de Louis Baclé et, au sud, ceux de Christian Bizet.

Les deux éleveurs ont dessiné ce projet afin d'assurer la mise en conformité de leurs bâtiments d'élevage. La construction commune a été facilitée par la proximité des deux éleveurs, qui avaient en outre l'habitude de s'entraider, et par la présence de deux troupeaux de taille similaire. Les structures d'exploitation sont néanmoins très différentes. Louis Baclé est installé en individuel tandis que Christian Bizet est membre d'une société familiale à quatre associés.

Deux permis de construire ont donc été déposés, pour chaque moitié du bâtiment. Toutes les démarches juridiques ont été réalisées en double. « Notre démarche est singulière et de ce fait n'a pas toujours été facile à expliquer, regrette Louis Baclé. Certains services de l'État peinent à reconnaître notre mitoyenneté. Nous ne sommes pas copropriétaires. À ce titre, nous estimons que nous ne relevons pas de l'arrêt Balmann. Nous ne comprenons pas la position de la DDA lors des commissions de la CDOA, qui ne nous a accordé qu'une seule attribution de références laitières pour les deux élevages. »

Le bâtiment a été construit à cheval sur le foncier de chacun des deux associés

En construisant ensemble, les deux éleveurs ont cherché à maximiser leur confort et celui de leurs animaux. Ils ont opté pour un système de logettes sur caillebotis peu gourmand en paille et en main-d'oeuvre. Le nombre de places à l'auge et de couchages n'est pas limitant pour la cinquantaine d'animaux présents de chaque côté du bâtiment.

« Grâce à cette mise en commun, nous avons acquis un meilleur confort de travail pour le même prix qu'un projet individuel, soulignent les éleveurs. Tout en optimisant le côté humain ! » En effet, sous le même toit, les remplacements et l'entraide sont nettement facilités notamment pour les tâches quotidiennes. Christian et Olivier Bizet assurent la traite pendant la semaine. Un intervenant extérieur prend le relais le week-end. Louis Baclé, quant à lui, prend en charge l'alimentation commune des deux troupeaux du lundi au dimanche. « Nous n'hésitons pas à échanger nos observations sur l'état de santé des animaux, la reproduction... pour un meilleur suivi de nos deux troupeaux. »

Un meilleur confort de travail pour le même prix qu'un individuel

Le résultat de ce projet original est un bâtiment de 2400m2 (72 mètres de long sur 34 mètres de large) à structure métallique, esthétique, clair et bien ventilé. La conception s'est inspirée de stabulations existantes. Les plans ont été réalisés en collaboration avec Xavier Téterel, conseiller bâtiment à la chambre d'agriculture de l'Oise. «Nous avions des craintes sur la ventilation en raison de la grande largeur du bâtiment mais les éléments de ventilation procurent une ambiance idéale. » Deux rangées d'écailles ont été installées par rampant de toit. La toiture est également équipée d'une faitière ouverte avec des pare-vent. Sans oublier le bardage ajouré sur les quatre côtés. « Il n'y a jamais de courant d'air, ni d'humidité sur les bêtes ni même d'odeur d'ammoniac. » Avec 15 % de plaques translucides en toiture et une surface importante de bardage ajouré, la stabulation bénéficie d'une grande luminosité. Pour la construction, les éleveurs ont fait appel à deux entreprises belges. « Ces entreprises sont très spécialisées et particulièrement compétitives. Et les belges étaient les seuls à nous proposer une fosse coulée. Les 1250m3 des deux fosses ont été coulés en deux semaines. » À l'intérieur, chaque moitié de bâtiment comporte deux rangées de logettes séparées par un couloir sur caillebotis équipé d'un racleur. Le système 100 % lisier nécessite d'utiliser le minimum de paille la plus fine possible. Les logettes reçoivent par conséquent 500 grammes de paille broyée pour assécher les revêtements de sol.

Des entreprises belges très spécialisées et compétitives

La salle de traite par l'arrière 2x10 est parfaitement symétrique. Elle est dotée d'un plancher mobile. Le parc d'attente est séparé en deux et pourvu de chiens électriques. Le troupeau logé au nord passe sur le quai nord. La laiterie abrite deux tank distincts. En sortie de salle de traite, chaque couloir est équipé d'un dispositif de tri vers une case d'isolement. Le box de vêlage est installé côté sud, contigu à la nurserie. Son agencement est en réflexion avec la MSA dans le cadre de la prévention des accidents de travail. La nurserie commune aux deux élevages est isolée de l'extérieur par un filet mobile qui facilite le curage et permet l'accès au stockage de paille au-dessus de la salle de traite. Des courants d'air circulent néanmoins, qui nécessitent des aménagements afin de protéger les veaux.

Des Conditions idéales

« La proximité des sièges d’exploitation, des pâtures contiguës, des quotas similaires et l’habitude de travailler ensemble… voilà ce qui a rendu possible ce projet original de stabulation mitoyenne. Si les conditions étaient idéales, la réflexion sur ce projet n’a pas été menée à la légère. La démarche a été longuement murie et colle aux caractéristiques de chacune des exploitations, notamment en termes de main-d’oeuvre. En construisant chacun de leur côté, les éleveurs n’auraient pu atteindre un tel niveau de confort de travail, obtenu grâce aux équipements du bâtiment et à l’entraide. »

 

Les plus lus

<em class="placeholder">Jerzy Wawrzynczak, éleveur laitier polonais</em>
Éleveur laitier en Pologne : « Je vends mon lait 480 euros les 1 000 litres »

En Pologne, l’élevage laitier de Jerzy Wawrzynczak ressemble beaucoup à un système français. Il partage les mêmes…

<em class="placeholder">gaec legentil</em>
« Nous travaillons chacun 60 heures par semaine, et pourtant, nos parents nous aident encore dans le Calvados »

Les parents de Nicolas et Emmanuel Legentil sont partis à la retraite en même temps, il y a un an. Les deux frères veulent…

<em class="placeholder">Milk price and agricultural products trend concept: Small glass of milk on euro money bank notes</em>
Prix du lait 2025 : Lactalis, Sodiaal… annoncent des hausses de prix
Lactalis, Sodiaal et Bel s’avancent sur une augmentation du prix du lait payé aux producteurs sur l’année 2025. Savencia a…
Jérôme Curt, éleveur
Bâtiment : les 7 reportages qu'il ne fallait pas râter en 2024

Retrouvez les 7 reportages sur les bâtiments d'élevage qui vous ont le plus marqué en 2024.

<em class="placeholder">Christine et Pascal Garnier, éleveurs laitiers.</em>
Revenu : « Notre système laitier économe est loin d’être ringard »

Le Gaec de la Planture, en Meurthe-et-Moselle, limite la productivité de ses vaches à 6 200 l de lait avec un…

Carte de la zone régulée FCO 3 en date du 16 janvier 2025.
FCO 3 : mi-janvier 2025, la maladie continue de gagner du terrain

À date de jeudi 16 janvier 2025, le ministère de l'Agriculture annonce 9 465 cas de fièvre catarrhale ovine sérotype 3.…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière