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Des maïs mis à mal par les stress hydrique et thermique

Trop chaude, trop sèche, 2022 n’aura pas été une année à maïs. Malgré une récolte précoce, rendement et qualité sont en berne.

Aux faibles rendements, s’ajoute une qualité plus que moyenne cette année.
Aux faibles rendements, s’ajoute une qualité plus que moyenne cette année.
© G. Coisel - Réussir SA

Si les températures douces d’avril et mai ont favorisé les levées des maïs semés précocement, les conditions chaudes et sèches, qui ont rapidement suivi, ont été plus problématiques pour les semis plus tardifs, par exemple après des méteils ou une deuxième coupe de ray-grass d’Italie. Le cumul des stress hydrique et thermique a mis à mal le potentiel de production. Les floraisons se sont majoritairement déroulées avec dix à quinze jours d’avance, en plein pic caniculaire.

« Dans les zones qui ont bénéficié d’orages fin juin, la floraison et le rendement ont été en partie préservés. Dans les autres, les défauts de fécondation ont fortement pénalisé le nombre de grain », remarque Hugues Chauveau, ingénieur valorisation animale des fourrages chez Arvalis. Les feuillages se sont vite desséchés et les chantiers d’ensilage ont démarré dès le 20 juillet, pour la Vendée notamment. Dans la plupart des régions, les ensilages ont eu lieu avec au moins deux à trois semaines d’avance.

Dans ses dernières estimations, Agreste, le service statistiques du ministère de l’Agriculture, avance un rendement moyen de 11,3 tMS/ha, soit 20 % de moins que l’année dernière et 10 % de moins que la moyenne 2017-2021. Pourtant, sur le terrain, l’impression de baisse de rendement est plus marquée.

« Sur les Pays de la Loire, le rendement est inférieur de 20 à 30 % par rapport à une année moyenne », témoigne Mickaël Sergent, expert nutrition chez Seenovia. Impression partagée par son collègue d’Eilyps, en Ille-et-Vilaine. « Les rendements sont de 30 % inférieurs à une année normale, estime Anthony Baslé, consultant nutrition. Selon les zones, cette baisse va de 15 à 40 %. »

L’hétérogénéité des rendements est une autre caractéristique de cette année. « Selon la date de semis, selon qu’il y ait eu ou non des pluies d’orage, certains maïs ont souffert et d’autres restent à peu près corrects », remarque Anne Blondel, responsable de l’encadrement technique d’Acsel, le contrôle de performances pour l’Ain et la Saône-et-Loire. Cette hétérogénéité, y compris entre parcelles, demandera de faire des analyses régulières, tout au long de l’avancement des silos. Autre précaution, comme la densité plus faible que d’habitude va jouer sur la vitesse d’avancement du silo, il faut penser, en plus du cubage, à mesurer la densité pour évaluer ses stocks réels.

Un maïs peu acidogène mais pas très laitier

À ces faibles rendements, s’ajoute une qualité plus que moyenne. Les dates de récolte précoces ont permis de limiter quelque peu les taux de matière sèche. En termes de valeur alimentaire, ces ensilages sont assez proches de ceux de 2018, « avec un taux de matière sèche élevée, de la cellulose mais peu d’amidon et de sucre, donc des maïs pas très digestibles et peu énergétiques », constate Lionel Vivenot, de l’ULM.

Selon les régions, les taux de cellulose sont bien supérieurs au 20 % habituels. Quant aux taux d’amidon, ils sont généralement inférieurs à 25 %. Ce qui donne un maïs peu acidogène mais pas très laitier. « Les premières analyses donnent une moyenne de 0,89 UFL selon les normes Inra 2007 quand une année classique on est à 0,92-0,93 », chiffre Mickaël Sergent. « Pour un maïs pauvre en amidon on peut descendre à 0,83-0,85 UFL », complète Anthony Baslé.

Une bonne nouvelle pourrait venir de la teneur en sucres solubles, qui est plutôt élevée du fait d’un moindre transfert vers le grain. La digestibilité des fibres pourrait également être correcte grâce à une durée du cycle de végétation raccourcie. Les sucres solubles améliorent la digestibilité et la valeur alimentaire.

Il va falloir reconcentrer la ration

Face à ce maïs peu dense, pauvre en grain et en plus encombrant, il est nécessaire de reconcentrer la ration pour maintenir le niveau de production.

Pour un complément en énergie, des céréales, du maïs grain humide seront intéressants s’ils sont disponibles sur l’exploitation. L’achat d’aliments énergétiques va dépendre des disponibilités et des prix. Les coproduits de betteraves et de pommes de terre s’annoncent rares. « Il faut regarder du côté des coproduits de la meunerie et de la biscuiterie pour ramener de l’amidon », encourage Mickaël Sergent. Côté azote, « le soja ou l’urée sont intéressants, même s’ils coûtent cher », prévient Anne Blondel.

Pour les maïs particulièrement secs et cellulosiques, il faudra corriger la digestibilité avec des aliments liquides, comme la mélasse, qui apportent des sucres et de l’appétence, ou des levures qui font aider à la digestion de la cellulose.

Pour ceux qui ont encore des stocks de maïs, « mieux vaut attendre que les fermentations se soient bien stabilisées, conseille Mickaël Sergent. Quand on a des stocks de report, il est pertinent d’utiliser du maïs 2021 et du 2022 en même temps plutôt que l’un après l’autre pour atténuer les différences de qualité et stabiliser les performances ».

Entre le manque de fourrages et le prix élevé des céréales et des concentrés, il est plus que jamais pertinent de suivre de près sa marge sur coût alimentaire.

Faire face aux aléas climatiques

Si 2022 a été particulièrement perturbée climatiquement parlant, la tendance de fond à l’augmentation des aléas est bien là. Pour y faire face, les stocks de report ont toute leur importance. « Rares sont les années parfaites pour le maïs et l’herbe, constate Mickaël Sergent. Pour faire face à un manque de fourrages, trois à quatre mois de stocks de report sécurisent la ration. Il est aussi possible de raisonner ses assolements pour garder la possibilité de passer du maïs grain en fourrage en cas de besoin. »

Mieux vaut éviter de mettre tous ses œufs dans le même panier. « Il faut diversifier les espèces, les variétés, les précocités pour avoir plus de chance qu’une partie des cultures fourragères s’en sortent bien », conseille Anne Blondel.

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