Craintes pour les marges des éleveurs laitiers
L’indice de marge Milc progresse en juin. Mais la situation sur le terrain se tend un peu plus chaque mois qui passe. Les opérateurs sont inquiets pour cet hiver et début 2023.
L’indice de marge Milc progresse en juin. Mais la situation sur le terrain se tend un peu plus chaque mois qui passe. Les opérateurs sont inquiets pour cet hiver et début 2023.
L’indice de marge Milc, qui est un indicateur de marge partielle de l’atelier lait, était encore en progression en juin, à 120 €/1 000 l et le sera encore certainement en juillet, assure l’Institut de l’élevage. Elle atteint « son plus haut niveau depuis décembre 2017 ». Ceci est dû à une progression des produits lait et viande issus de l’atelier lait qui est supérieure à celle des charges (hors évolution des frais de personnel, travaux par tiers, fermages, impôts fonciers, frais financiers). Mais attention, l’image est trompeuse. « La Milc demeure à un niveau relativement peu stimulant », décrit l’Idele.
Les centres de gestion et les conseillers en élevage constatent également des marges brutes en augmentation au premier semestre, et « ce sera sans doute la même tendance avec les résultats de cet été ». Mais ils alertent : il y a un décalage avec ce que vivent les éleveurs confrontés à l’inflation, aux fortes chaleurs et à la sécheresse.
Une baisse des volumes et des taux
La recette laitière est affectée négativement par une production qui baisse depuis le début de l’année et des taux qui ont tendance à se dégrader. « Probablement sous l’effet de rations moins équilibrées. Ce déséquilibre peut découler d’un rationnement excessif de correcteurs azotés », pointe l’Institut. Si, au début de l’été, la baisse de la production a été contenue (- 0,2 %), c’est que beaucoup d’éleveurs ont puisé dans leurs stocks d’hiver, espérant le retour prochain des pluies... qui ne sont pas venues. La décapitalisation laitière s’est accélérée en juillet et surtout en août, profitant des prix élevés de la viande, n’offrant qu’un court répit à la trésorerie.
Un impact canicule sur le moyen terme
En septembre, tous les opérateurs interrogés — conseillers, laiteries, centre de gestion — s’attendaient à ce que la production laitière baisse nettement à partir de cet automne. Et les résultats économiques avec. Les éleveurs commencent à utiliser leurs stocks fourragers de cette année, souvent de moins bonne qualité pour l’ensilage de maïs. Les vagues de chaleur et la sécheresse n’ont pas eu trop d’impact immédiat sur la productivité des vaches, mais elles ont entraîné des problèmes de reproduction. Les derniers élevages couverts en tourteaux et engrais arrivent au bout de leurs stocks. Tout le monde achètera au prix fort cet hiver, la filière est donc inquiète.
Les écarts de résultats se creusent entre éleveurs
Les laiteries pointent un autre phénomène marquant de cette campagne : le creusement des écarts de résultats entre les exploitations laitières. « Les écarts de recettes laitières, de marges brutes et de prix de revient se sont creusés entre les élevages. Quand les écarts de prix de revient étaient de 80 €/1 000 l il y a deux ans, aujourd’hui, ils sont plutôt de 110 € ! », souligne Valérie Blandin, présidente des Maîtres laitiers du Cotentin.
« Nous voyons toutes les situations : des éleveurs où la situation fourragère est correcte et qui se sont bien couverts aux bons moments et, à l’inverse, des éleveurs qui ont subi la météo et qui ont dû acheter quand les prix étaient très élevés », illustre Olivier Legrand de l’organisation de producteurs APLBC.
Inquiétude pour les systèmes bio
« Dans les systèmes bio, surtout ceux qui dépendent des intrants, il y a de grosses inquiétudes. Le chaulage, le fioul, le correcteur énergétique, etc. ont beaucoup augmenté », pointe Mathilde Enjalbert, d’Elvup, organisme de conseil en élevage de l’Orne. En face, si le produit viande a bien progressé, ce n’est pas le cas du produit lait, qui pour l’instant est plutôt stationnaire, voire en légère baisse.