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Cinq questions à se poser pour réussir ses semis de prairie

Face aux risques d'échec des semis de prairie, Arvalis, les chambres d’agriculture et l’AFPF font le point sur les préconisations pour mettre toutes les chances de son côté.

passage d'un rouleau de type cultipacker
Il faut impérativement rouler après le semis.
© Chambre d'agriculture du Tarn

« Seulement 50 à 65 % des semences prairiales germent, voire moins si les conditions d’implantation ne sont pas bonnes. Un faible taux qui est lié à la faculté germinative de ces graines, et à une variabilité de 50 à 65 % qui est fonction du sol et du climat autour du semis, ainsi que du salissement et des ravageurs », rappelle Carole Gigot, d’Arvalis.

Pour éviter que ce taux de levée ne soit encore plus faible, Arvalis, l’AFPF (Association francophone pour les prairies et les fourrages) et les chambres d’agriculture rappellent les préconisations autour de l’implantation.

Les conditions de semis (structure, humidité et température du sol) doivent permettre à la semence de se développer rapidement pour atteindre un stade robuste (stade 4-5 feuilles pour les graminées et 2-3 feuilles trifoliées pour les légumineuses) avant l’apparition d’un stress hydrique pour les semis de printemps ou avant les premiers gels pour les semis de fin d’été.

1 - Semer au printemps, en fin d’été ou à l’automne ?

Un sol réessuyé, une humidité du sol suffisante et une température douce favorisent une dynamique de levée rapide et homogène, ainsi qu’une croissance active des jeunes plantules.

Les semis de fin d’hiver et de printemps sont peu répandus. Le rendement de la prairie est deux fois moindre durant l’année du semis. Ils présentent un intérêt en cas de semis de prairie après une culture récoltée à l’automne ou pour des parcelles humides. Ils sont plus favorables aux légumineuses et à un développement rapide de la prairie. Mais avec les aléas climatiques, cette pratique est risquée : les jeunes plantules sont exposées au risque de gel ou à une sécheresse précoce.

La période optimale pour semer une prairie reste la fin d’été en semis sur sol nu. Mais avec des épisodes de sécheresse estivale de plus en plus intenses et prolongés sur septembre, les semis d’été ont tendance à être retardés, exposant les plantes au risque de gel à un stade sensible. Le risque est élevé pour les légumineuses qui ont besoin de 600 degrés-jour après semis pour atteindre le stade 2-3 feuilles trifoliées et ne plus craindre le gel. Les espèces lentes d’implantation comme le dactyle ou la fétuque ne doivent également pas être semées trop tardivement.

Si les conditions climatiques ne sont pas réunies à la mi-septembre, alors mieux vaut envisager un semis d’automne sous couvert.

2 - Quand privilégier le semis sous couvert ?

Le couvert permet de décaler la date de semis en automne et de bénéficier d’une pluie propice à la levée, pointe Carole Gigot, d’Arvalis. « Tout en protégeant les jeunes semis et plantules en créant un microclimat, ce qui favorise la réussite de l’implantation de la prairie », ajoute Pauline Hernandez, de la chambre d’agriculture de l’Indre.

Le semis de prairie sous couvert de céréale, tournesol ou de méteil est une pratique de plus en plus courante et sécurisante comparé au semis de prairie sur sol nu. Celui-ci se heurte en effet à des échecs quand les sécheresses ou les excès de pluie, plus fréquents avec le changement climatique, pénalisent la levée et favorisent l’installation de la flore adventice, allant parfois jusqu’au ressemis de la prairie. « Le semis sous couvert permet de maintenir la parcelle propre, d’avoir une prairie déjà bien implantée et productive dès la récolte du couvert, qui apporte du fourrage supplémentaire », constate Pauline Hernandez.

Idéalement, cette technique se réalise avec un semoir double caisson pour semer en un passage le couvert et la prairie. Mais beaucoup d’éleveurs sèment en deux fois : le couvert puis la prairie.

3 - Faut-il semer en ligne ou à la volée ?

Le semis à la volée donne des résultats : de bon taux de levée des espèces prairiales, une réduction des populations d’adventices et du coup une augmentation du rendement des coupes au printemps suivant. Cette pratique s’effectue avec un semoir à céréales dont les descentes ont été relevées. La herse du semoir et le roulage final suffisent généralement à enfouir superficiellement les graines.

À noter que l’AFPF déconseille l’utilisation d’un semoir centrifuge à engrais avec lequel il est plus difficile de maîtriser la répartition des graines et la densité de semis.

Le semis en ligne est envisageable à condition de disposer d’un semoir à faible écartement (8 à 12 cm maxi) ou, dans le cas d’un mélange d’espèces, de réaliser un semis croisé en deux passages.

4 - Quelles précautions avec le semis direct ?

Le semis direct est plus adapté aux espèces d’implantation rapide (ray-grass anglais ou italien, trèfle violet). Il nécessite un semoir adapté et le recours à un désherbage chimique avant l’implantation de la prairie pour détruire les repousses de céréales et les adventices.

Un semoir à dents plutôt qu’à disques est à privilégier afin de positionner correctement la graine dans le sol et éviter qu’elle soit en contact avec les résidus. L’intérêt du semis direct est qu’il évite un dessèchement du sol.

5 - Quand faut-il fertiliser en NPK ?

Les fourragères, graminées comme légumineuses, ont de fortes exigences en phosphore et potassium (P et K). Pour adapter la fumure de fond, une analyse de sol est indispensable. La dose d’apport en PK se calcule notamment à partir de la grille PK du Comifer. Celle-ci tient compte de la teneur en éléments du sol, des besoins et des exportations de la culture, de la fréquence d’apport des effluents d’élevage, etc. D’après les travaux d’Arvalis, des apports de 60 kg/ha en P2O5 et de 160 kg/ha en K2O sont en général suffisants pour atteindre au moins 95 % de la production maximale de la prairie, et ce, quel que soit son potentiel. À titre d’exemple, des apports de 25 à 30 t/ha de fumier tous les deux ans permettent, dans certaines situations, de s’affranchir d’une fertilisation PK minérale. En revanche, si l’apport a lieu tous les trois ans, un apport de K sous forme minérale sera nécessaire la troisième année d’exploitation de la prairie.

Pour ce qui est de la fertilisation azotée, Arvalis préconise un premier apport, sous forme minérale ou de lisier, sur une végétation en démarrage de croissance, soit l’équivalent de 200 degrés jours base 0°C dès le 1er janvier, pour des prairies à base de graminées. Pour des associations et des mélanges multi-espèces avec 50 % de légumineuses, l’institut déconseille les apports d’azote la première année d’implantation pour éviter tout risque de disparition des légumineuses au profit des graminées. En revanche, lorsque les légumineuses sont bien installées, une fertilisation azotée reste possible mais limitée (deux passages de 30 ou 45 kg N/ha/passage) pour ne pas perturber l’équilibre entre les espèces.

Le pH, premier facteur limitant de la croissance d’un couvert

La majorité des espèces prairiales productives sont sensibles à l’ion aluminium, d’autant plus concentré dans la solution du sol que le pH est acide (inférieur à 6). Dans ces situations, les plantes sont nanifiées et les racines peu ramifiées ce qui a pour conséquence une moindre résistance au déficit hydrique et une moins bonne absorption des éléments minéraux. Généralement, un pHeau(1) de 6 – idéalement 6,5 – suffit à satisfaire leurs exigences. En deçà, un redressement est souvent nécessaire avec un amendement basique à action rapide lorsque le délai entre l’apport et le semis est de moins d’un mois, rappelle l’AFPF. Dans les autres situations et selon la nature du produit organique (type 0, 1 ou 2), il convient de respecter un délai plus ou moins long pour permettre sa minéralisation et sa disponibilité pour la plante.

(1) pHeau : pH du sol qui correspond au pH d’une suspension de terre dans l’eau

Les étapes clés préconisées pour réussir son semis de prairies

0 - Avoir réalisé une analyse de sol pour corriger un pH trop acide et pour effectuer des apports de phosphore et de potassium, voire certains oligoéléments, nécessaires à beaucoup d’espèces prairiales.
1 - Saisir le bon créneau météo : l’idéal est une pluie fine après le semis. À défaut, un tour d’irrigation pour sécuriser la levée est bienvenu.
2 - La préparation du sol avant le semis a pour but d’affiner le lit de semence et de le rendre plan. L’objectif est en effet de placer les graines, qui sont petites, entre 0 et 1 cm de profondeur. Les sols tassés et hydromorphes sont défavorables à l’installation d’une prairie.
2 - Rouler avant de semer pour éviter que la graine se retrouve à plus de 1 cm de profondeur.
3 - Semer avec un outil qui permet de répartir les graines de la façon la plus homogène possible, entre 0 et 1 cm de profondeur.
4 - Rouler après le semis avec un rouleau de type cultipacker, pour favoriser le contact entre la semence et le sol, sans risquer de former une croûte.
 

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