[Changement climatique] « La betterave a bien récupéré au retour de la pluie »
Au Gaec de la Morante, dans la Meuse, la betterave a beaucoup mieux supporté la longue sécheresse estivale que le maïs. Les quatre hectares de betteraves implantés pour la première fois en 2020 seront désormais semés tous les ans.
Au Gaec de la Morante, dans la Meuse, la betterave a beaucoup mieux supporté la longue sécheresse estivale que le maïs. Les quatre hectares de betteraves implantés pour la première fois en 2020 seront désormais semés tous les ans.
À Bonnet dans la Meuse en 2020, il est tombé 20 mm d’eau début juin. Il a fallu attendre le 28-30 septembre pour avoir un retour des pluies, avec entretemps trois épisodes de fortes chaleurs. « Les betteraves n’étaient pas belles à voir quand il faisait chaud ; mais dès qu’il s’est mis à pleuvoir, les feuilles sont redevenues vertes. Elles arrivent à récupérer », constate Nicolas Philippe, l’un des deux associés du Gaec de Morante.
Après cette première campagne, tous deux sont bien décidés à maintenir dans l’assolement(1) 4 hectares de betteraves. « On a récolté 45 t/ha avec une variété mi-fourragère mi-sucrière (KWS Laurena), et la qualité est au rendez-vous avec 22 % MS, 1,3 UFL/kg MS et 70,1 % de sucres solubles. Alors que le maïs grain humide a produit seulement 25 q/ha, en année normale on tourne autour de 80-90 q/ha. » En 2020, la totalité des 50 hectare semés en maïs ont donc été récoltés en grain humide, les 30 hectares habituellement vendus en grain ont été réorientés vers les vaches. Cela avait déjà été le cas en 2019, ce qui avait conduit les éleveurs à semer 4 hectares de betteraves.
Lire aussi : Essais ADFM 2020 : La qualité des betteraves fourragères au rendez-vous, même en année compliquée
Les betteraves ont été implantées le 7 avril avec le semoir d’un collègue, et récoltées mi-octobre. Le Gaec de Morante compte repartir cette année sur la même variété : « elle se conserve mieux qu’une fourragère à 17-18 % MS ». Les betteraves sont stockées en vrac dans la stabulation. Elles sont broyées dans le godet pendant le chargement avant d’être mises dans la mélangeuse.
« Nous les chargeons à la main dans le godet, ce qui permet de trier les cailloux et de faire tomber la terre qui a séché. Cela nous prend un quart d’heure par jour pour 540 kg de betteraves. On est en AOP brie de Meaux, en lait cru (600 000 litres) : c’est important qu’il n’y ait pas de terre par rapport à la listeria », précise Nicolas Philippe.
Des betteraves à 22 % MS, 1,3 UFL et 70 % de sucres
La ration semi-complète est équilibrée à 25 litres avec 8 kg de betteraves, 7 kg de luzerne à 70 % MS, 9 kg d’ensilage de prairies naturelles de 1re et 2e coupes (tous deux récoltés à l’autochargeuse), 2,5 kg de paille de blé, 7 kg de maïs grain humide, 300 g de minéraux 0-7-30 et 700 g de tourteau de soja 46 non OGM. Les vaches, à 31 litres de production journalière, sont en traite robotisée ; elles reçoivent au robot en moyenne 2 kg de VL et 2 kg de tourteau 46. À partir du mois de mai, les betteraves vont être remplacées dans la ration des laitières par 3 kg de pulpes sèches. « Elles nous permettent d’être moins dépendants des pulpes. Avant, il fallait nous faire livrer un camion de 30 tonnes tous les trois mois. »
« Le réglage de la ration a été difficile au début, reconnaît Nicolas Philippe. Des racines à 22 % MS doivent être bien broyées, elles ne l’étaient pas suffisamment. Les vaches les triaient, et au bout de deux heures se couchaient. La production avait baissé. » Le Gaec de Morante a donc mi-décembre adapté son godet en doublant le nombre de couteaux. « La ration est beaucoup plus homogène. Tout est rentré dans l’ordre. »
Témoignage : Betteraves fourragères et foin, un duo gagnant
« Le désherbage est très technique »
« Le désherbage de la betterave exige d’être précis: il faut intervenir dès qu’on voit des mauvaises herbes et avec de bonnes conditions climatiques », explique Nicolas Philippe, qui fait aussi de la prestation en tant qu’ETA. Le Gaec a fait quatre passages à microdoses en intervenant tôt le matin, avant 6 h, pour profiter de l’hygrométrie. Ce qui a permis d’avoir des betteraves très propres avec un coût des traitements herbicides à 80 €/ha, comparable à celui du maïs. « Le plus contraignant est de bien rincer l’automoteur à chaque fois que l’on passe de la céréale à la betterave. Cela prend une heure, on utilise un produit de rinçage biodégradable qui doit agir une demi-heure. »
Le Gaec a dû aussi traiter les betteraves contre la jaunisse. La dérogation concernant le traitement de semences ne s’applique pas aux betteraves fourragères. « Comme les pucerons se mettent en dessous de la feuille, les insecticides de contact ne sont pas efficaces, il faut utiliser un insecticide à action systémique (Teppeki )à 20 €/ha. »