Aller au contenu principal

Apprendre à travailler avec un salarié

Le salariat prend de l’ampleur en élevage laitier. Recruter et employer un salarié exigent des compétences spécifiques. Le besoin de professionnalisation est patent.

Plus d’une exploitation laitière sur cinq a recours au salariat, contre seulement 3 % il y a quinze ans. L’évolution est spectaculaire, même s'il semble y avoir eu un petit tassement entre 2013 et 2016. D'après les enquêtes structures d'Agreste 2016, 21,3 % des exploitations employaient de la main-d'œuvre salariée permanente et cette main d'œuvre permanente représentait 10,4 % de la main-d'œuvre totale. Le recours à des formes moins engageantes (salariés occasionnels, ETA, Cuma avec chauffeurs...) est bien plus fréquent, ce qui fait grimper à 16,7% la part de la main-d'œuvre salariée dans la main-d'œuvre totale des exploitations laitières (17 % en 2013).

Les raisons sont multiples et connues. Elles se cristallisent autour de la raréfaction de la main-d’œuvre familiale, de l’agrandissement des cheptels et de nouvelles attentes en matière de qualité de vie. Parallèlement, les formes sociétaires ne cessent de progresser. Ces évolutions, qui n’ont aucune raison de s’arrêter, posent aux employeurs de main-d’œuvre un nouveau défi, celui de la gestion des ressources humaines, auquel peu sont préparés. La formation initiale propose de solides bases techniques pour conduire un élevage et les cultures associées, mais n’aborde que rarement les questions de management et de vivre et travailler en équipe« Nous sommes sont confrontés à deux problèmes, affirme Daniel Perrin, éleveur en Lorraine et président du groupe évolution des structures au Cniel. Un : trouver des salariés compétents. Deux : acquérir les compétences du management. »

Des solutions mais peu de professionalisation

Sur la base de ce constat, le groupe qu’il préside a commandé à l'institut de l'élevage (Idele), un vaste travail sur la « gestion des ressources humaines, salariat et association en exploitation bovin lait », qui a été conduit avec une douzaine d’organismes partenaires(1). Vingt éleveurs localisés dans trois zones d’élevage laitier (plaine, montagne et polyculture-élevage), dont seize employeurs de main-d’œuvre, ont été enquêtés pour connaître leurs motivations ou freins à l’embauche et les pratiques liées à l’emploi. « Les éleveurs ont trouvé des solutions en termes de salariat et de recrutement, mais on sent peu de conceptualisation. Certains s’en sortent bien, il y a des marges de progrès pour d’autres et un besoin de professionnalisation. Ils n’ont pas forcément intégré tout ce que le fait de devenir employeur allait leur demander, constate Sophie Chauvat, responsable de projet à Idele sur les approches sociales et le travail en élevage. La gestion des ressources humaines ne se limite pas à la communication et aux relations humaines. Elle fonctionnera bien si les missions et le contrat de travail avec le salarié sont clairs et si le travail est bien organisé. »

Les outils qu’utilise toute entreprise qui embauche

Pour clarifier les missions à confier au salarié, le futur employeur doit d’abord mettre noir sur blanc ses besoins en matière de travail. Il pourra alors définir ce qu’il en attend : aptitudes et compétences, qualités et motivation... Le recrutement est alors lancé en connaissance de cause et avec les outils qu’utilise toute entreprise quand elle embauche : fiche de poste, annonce, diffusion, entretien de recrutement... Quand le salarié est en fonction, il s’agit d’organiser et d’anticiper le travail de l’exploitation pour qu’il soit le plus efficace possible. De veiller aussi à entretenir sa motivation en lui montrant de la reconnaissance et en lui donnant progressivement de l’autonomie. Quant à la communication, si elle est naturelle pour certains employeurs, elle l’est beaucoup moins pour d’autres. Il y a alors intérêt à la formaliser en prévoyant notamment des rendez-vous réguliers pour faire le point avec le salarié. « La professionnalisation de la gestion des ressources humaines n’est pas insurmontable, rassure Sophie Chauvat. Nous donnons des recommandations qui peuvent aider à formaliser les choses. Mais le plus important pour que ça se passe bien, c’est que l’employeur ait avec le salarié un comportement comme il aimerait que n’importe quelle personne ait avec lui-même. » Devenir un bon manager passe aussi par la formation. « Il y a une offre, dans de nombreux départements, mais peu de personnes s’inscrivent à ces formations, regrette Sophie Chauvat. Ce n’est pas encore considéré comme une compétence en soi. » Vous en découvrirez quelques clés tout au long de ce dossier.

(1) APCA et CA 37, Gaec et Sociétés, BTPL, Cerfrance, MSA, France Conseil élevage, Service de remplacement, Anefa, Cuma France, RMT Travail en élevage, Vivea, Anact.

Former et accompagner les éleveurs

Suite à ce travail sur la gestion des ressources humaines en élevage laitier, le Cniel et Idele ont formulé des recommandations pour former et accompagner les éleveurs sur cette question, aussi bien dans un cadre sociétaire que hiérarchique (salariat). « C’est un déterminant stratégique pour la pérennité des élevages laitiers français », estime Daniel Perrin (Cniel). Mission est donnée aux Criel de développer les réseaux et les compétences des conseillers et de l’enseignement, pour qu’ils intègrent ces questions dans leurs conseils et formations. Le Cniel veut aussi renforcer l’attractivité du métier de salarié en élevage laitier car c’est une des grandes raisons des difficultés de recrutement : diffusion des bonnes pratiques pour améliorer les conditions d’exercice du métier ; promotion du métier de salarié en direction de l’enseignement, des professionnels de l’orientation et des personnes en recherche d’emploi.

En savoir plus

Le dossier Cniel-Idele « Organiser le travail en élevage laitier » regroupe 15 fiches très pratiques qui vous guideront pas à pas dans la gestion des ressources humaines. Parmi lesquelles : quel profil de salarié choisir ? Comment le recruter ? Combien va-t-il me coûter ? Quelles sont mes obligations en tant qu’employeur ? Comment gérer les premiers contacts ?... Il est disponible à l’adresse https://bit.ly/2R37UZc ou sur le site www.cniel-infos.com en utilisant l’outil de recherche. Vous trouverez sur ces mêmes pages le compte-rendu des enquêtes réalisées auprès de 20 éleveurs.

Les plus lus

trois éleveurs associés du Gaec Honoré
Stabulation rénovée avec trois robots de traite : « Nous avons gagné en confort de travail »
En 2020, nous avions suivi les associés du Gaec Honoré dans leur projet de construction d’une nouvelle stabulation afin d’…
éleveurs laitiers
« Grâce à la microméthanisation et au robot, nous pérennisons notre élevage laitier dans la Meuse »

Le Gaec de Veline, dans la Meuse, a opté pour l’installation d’un microméthaniseur et d’un robot de traite. L’objectif ?…

Romain et Marc Pascal, Baptiste Mallet et Olivier Salat, Gaec Pascal Mallet dans le cantal.
Mammites : « Grâce aux analyses de lait, nous avons éradiqué la source de contamination »

Dans le Cantal, le Gaec Pascal Mallet apporte un prélèvement de lait chez le vétérinaire au moindre doute de mammite. La…

Une prairie inondée.
Récolte des fourrages : la FNSEA demande aux pouvoirs publics de réagir

Les fédérations de ruminants affiliées à la FNSEA demandent aux pouvoirs publics de mettre en place les promesses sur les…

Maïs fourrage 2024 : les dates de récolte s’annoncent tardives en France

Au regard des dates de semis du maïs fourrage dans des conditions météorologiques difficiles, Arvalis estime que les premiers…

FCO 3 : l’expédition des veaux laitiers est autorisée sous conditions depuis la zone régulée

Depuis vendredi 2 août 2024, une partie du nord et de l’est de la France est en zone régulée pour limiter la propagation de la…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière