Allo véto : trois mésusages de médicaments vétérinaires à ne pas reproduire en élevage laitier
Loin de gagner du temps en esquivant la case véto ou la lecture de la notice, un mésusage d’un produit vétérinaire peut avoir des conséquences dramatiques sur l’animal et votre portefeuille. Voici trois cas à ne pas reproduire.
Loin de gagner du temps en esquivant la case véto ou la lecture de la notice, un mésusage d’un produit vétérinaire peut avoir des conséquences dramatiques sur l’animal et votre portefeuille. Voici trois cas à ne pas reproduire.
Comme en santé humaine, un médicament convient à un usage particulier, avec une certaine posologie. Une erreur peut vite arriver : sur la dose ou la voie d’administration ; sur l’indication (diurétique sur une diarrhée ; antibiotique à la place d’un anti-inflammatoire ; cortisone à la place d’un autre anti-inflammatoire…) ; et parfois même erreur sur l’espèce de destination (un vermifuge bovin comme l’ivermectine tue facilement un border collie).
Ces erreurs sont facilement évitables. Les protocoles de soins, distribués aux éleveurs par leur vétérinaire sanitaire, listent les principales pathologies rencontrées en élevage et les mesures à mettre en œuvre pour traiter et prévenir ces pathologies. La notice ou l’ordonnance indique le dosage, la voie d’administration et les contre-indications y figurent. Et si vous n’êtes pas très « papier », un coup de téléphone au vétérinaire permet d’être fixé.
Claudine Fouquet, vétérinaire
Des diurétiques sur une diarrhée et c’est la déshydratation assurée
« Bonjour, j’ai un veau à diarrhée qu’il faudrait perfuser. » Pas de problème, j’arrive ! L’animal est dans un état catastrophique, couché avec les yeux au fond des trous, un pli de peau persistant bien au-delà du raisonnable. Le pronostic est d’emblée mauvais. Qu’a-t-il eu comme traitement ? Antibiotique (un sulfamide parfaitement adapté), argile comme pansement digestif. Puis, comme il n’allait pas vraiment mieux, l’éleveur lui a fait une injection de Diurizone. Après tout, ça fait beaucoup de bien à un veau en pneumonie !
Oui mais il faut regarder parfois la notice ou demander un avis. Car dans la Diurizone, il y a un corticoïde, molécule indiquée pour l’inflammation pulmonaire mais pas digestive et un diurétique, c’est-à-dire une molécule qui accentue l’évacuation d’œdème et de liquide. Un diurétique est complètement contre-indiqué sur une diarrhée, puisqu’on cherche plutôt à ce que le veau garde toute son eau ! Résultat, une déshydratation carabinée et un veau mort.
Une dose pour une génisse de 1,6 tonne…
« Bonjour, j’ai une génisse de 1 an pas en forme. » Elle est maigrichonne par rapport aux copines et a un peu de diarrhée. Elle a reçu un vermifuge. L’éleveur avait dans sa pharmacie une ivermectine pour les strongles et un produit buvable pour la douve et le paramphistome. C’est une bonne idée, elle a reçu un traitement complet. Cela permet d’exclure complètement le problème de parasitisme.
C’était il y a trois jours, mais elle est maintenant par terre, avec une diarrhée carabinée et toujours pas de fièvre. Elle a eu combien de produit douve ? « Euh… Je ne sais plus très bien. J’ai donné un demi-litre environ par voie orale. Je n’ai plus de pistolet drogueur, j’ai donné à la bouteille. » Cela correspond à la dose pour 1,6 tonne ! Résultat : les intestins sont archi-irrités. Par sûr qu’on arrive à lui faire remonter la pente. Coût d’un pistolet drogueur : 60 €. Prix de la génisse ?
Un avortement à la cortisone
« Bonjour, j’ai une vache tarie qui vient de descendre de la bétaillère et de se casser la figure. Je lui ai administré un anti-inflammatoire. » La vache a effectivement une boiterie marquée d’un postérieur, sans fracture associée a priori. À surveiller de près quand même. Quel anti-inflammatoire a-t-elle eu ? « Un nom en -one » Jackpot ! La vache se remettra ou non de sa boiterie, mais elle va être allégée d’un poids : celui de son veau, à cause de l’avortement provoqué par la cortisone qui vient de lui être injectée. La notice mentionnait « induction de la parturition », ce qui signifie provocation de la mise bas.
Mise en garde
Précautions avant utilisation d’un médicament
• Vérifier la posologie : ordonnance, notice ou véto
• Vérifier l’indication : protocoles de soin, notice ou véto
• Vérifier les contre-indications et les délais d’attente
• Dans le doute : appeler le véto !